T.040 – Le contrôle

Comme une cage en acier que nous ne voyons pas, dont les barreaux sont faits de mensonges, qui nous ensorcellent. C’est un besoin qui nous dépasse, un penchant destructeur. C’est une menace à la liberté véritable, un obstacle à l’Esprit du Dieu vivant.

Cette sournoise insoumission pousse l’être humain à vouloir tout contrôler, et contrôler les autres, sans être capable de se contrôler soi-même.

Inconsciente et perfide obsession que celle de commander, de diriger, de surveiller ;  de vouloir penser à la place de l’autre et de penser à la place de Dieu.

Vouloir toujours tout décider. Ne jamais lâcher prise…

Se cramponner à cette corde imaginaire qui relie l’homme à sa sécurisante réussite. La serrer de toute notre poigne sous l’illusion de la survie, alors que cette corde est celle de notre potence, car c’est elle qui nous perdra.

« Il y a telle voie qui semble droite à l’homme, mais dont l’issue est la voie de la mort » (Proverbes 16:25).

Comment s’approcher de Dieu si nos mains ne sont pas libres ? Et comment éviter Son châtiment si nous nous obstinons à vouloir réussir selon nos propres critères et par nos propres forces ?

Mais de quelle réussite s’agit-il, si elle n’en est pas une aux yeux de l’éternité ? Passer sa vie à tirer sur une corde imaginaire, voilà une chose bien éphémère et bien vaine ! La société a fabriqué cette corde et elle n’a cesse de l’épaissir. Nous avons de plus en plus de mal à garder les mains bien serrées autour d’elle.

L’angoisse est omniprésente : la peur que cette corde nous échappe et qu’elle glisse à jamais de nos doigts engourdis. La peur que nous soyons jetés dehors avec la mention « échoué » tatouée jusqu’à notre dernier soupir sur notre front trop fier. Mais qui a le pouvoir de nous jeter dehors ? En dehors de quoi ? Du monde ?

Si je me suis donnée à Jésus-Christ, le monde ne m’appartient pas et je ne lui appartiens pas non plus. Le monde peut me jeter dehors, me discriminer, me railler  et m’interdire l’accès à certains domaines, mais cela ne me concerne pas réellement dans mon être profond. Cela ne doit pas être ma préoccupation première, puisque l’Amour du Dieu auquel j’appartiens est ma préoccupation. Vivre cet Amour divin et demeurer dans cet Amour, voilà mon univers.

« En effet, aucun de nous ne vit pour soi-même, et aucun de nous ne meurt pour soi-même. Si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur ; et si nous mourons, nous mourons pour le Seigneur ; soit donc que nous vivions, soit que nous mourions, nous sommes au Seigneur. Car c’est pour cela que Christ est mort, et qu’il est ressuscité, et qu’il a repris la vie, afin de dominer sur les morts et sur les vivants » (Romains 14:7-9).

Mais la chair est faible. Et j’ai en moi cette hantise : cette obsession, qui ne vient pas de Dieu. Contrôler ma position, contrôler les risques, contrôler tout ce qui concerne ma vie. Ne surtout pas lâcher la corde. Et Dieu n’en a que faire de cette corde ! Il voudrait que je la lâche. Il a besoin de mes deux mains. Il souhaite m’apprendre à demeurer dans l’apesanteur de Sa sublime Volonté, au cœur de Sa Grâce, en harmonie avec Ses lois, qui défient celles du monde.

Hélas, trop souvent, nous hésitons. Nous préférons rester dans notre cage plutôt que de nous élever dans cette apesanteur divine dans laquelle nous sommes appelés à vivre. Les barreaux de notre cage ne nous importent guère puisque nous ne les voyons pas. Seul compte pour nous de sentir le sol sous nos pieds et de tenir fermement notre corde. Nous croyons naïvement que notre vie, telle que nous l’agençons,  nous appartient, et que le sol sous nos pieds nous appartient. Mais la corde est fictive et le sol friable peut s’ouvrir et disparaître. Rien ne nous appartient.

Car la terre n’appartient qu’à Dieu seul, et la propriété dans ce monde n’est qu’un leurre. Seul Dieu est Maître et Créateur. Il tient la vie entre Ses mains gigantesques, Il tient le monde. Il possède l’univers. Chaque étoile, chaque planète, tout Lui appartient. Rien ne peut se faire sans qu’Il le sache.

« la terre est à l’Éternel » (Exode 9:29).

« Voici, à l’Éternel ton Dieu appartiennent les cieux et les cieux des cieux, et tout ce qui y est » (Deutéronome 10:14).

Rien ici-bas n’est durable, rien n’est sûr. Seul le rocher éternel, intemporel et indestructible qu’est notre Dieu souverain est en mesure de nous garder de l’érosion physique, morale et spirituelle du monde. Il est le seul sur lequel nous pouvons tenir ferme, non en serrant nos poings sur quelque chose qui n’existe pas, mais en lâchant prise dans une foi absolue.

« Fais-moi entendre dès le matin ta bonté, car je me suis confié en toi ; fais-moi connaître le chemin où je dois marcher, car j’ai élevé mon âme à toi » (Psaume 143:8).

Dès le réveil, croire connaître le déroulement de la journée. En faire une liste exhaustive. Planifier la semaine. Se projeter dans l’avenir. Prendre rendez-vous avec des personnes qui peuvent disparaître. S’appuyer sur un programme concocté personnellement chaque jour. Penser constamment à ce qui vient après. Prévoir les imprévus. Réfléchir à un plan B. Faire des comptes, des pronostics. Miser, gagner ou perdre. Mettre le plan B à exécution. Réfléchir à un plan C. Se projeter dans l’avenir, auprès des personnes que l’on ne veut pas voir disparaître, croyant qu’elles seront toujours à nos côtés. Faire des prévisions annuelles. Économiser. Programmer ses vacances. Vivre chaque jour avec un stylo, une calculatrice et un agenda dans les mains. Et si l’on vit dans la vague du temps, un téléphone mobile ultra-perfectionné suffira et sera notre compagnon idéal.

Oublier que rien, absolument rien n’est sous notre contrôle. Oublier que nous sommes faits à partir de la poussière du sol, modelés pour prendre vie l’espace d’un souffle et disparaître sous la terre.

« Tous sont assujettis au temps et aux circonstances. Car l’homme ne connaît pas même son temps ; comme les poissons qui sont pris au filet fatal, et les oiseaux qui sont pris au lacet, ainsi les hommes sont enlacés au temps de l’adversité, lorsqu’elle tombe sur eux tout d’un coup » (Ecclésiaste 9:11-12).

« Car dans tout dessein il y a un temps et un jugement, quand le malheur pèse sur l’homme. Car il ne sait pas ce qui doit arriver, et qui lui dira comment cela arrivera ? L’homme n’est point maître de son esprit, pour pouvoir le retenir, et il n’a point de puissance sur le jour de la mort ; il n’y a point d’exemption dans cette guerre, et la méchanceté ne délivrera point ceux en qui elle se trouve » (Ecclésiaste 8:6-8).

Celui qui lâche la corde est rejeté. Il est pris pour un fou. On ne le comprend pas, on évite sa compagnie. On lui colle toutes sortes d’étiquettes sur le visage et, bien qu’au début, l’Esprit de Dieu agissant comme une huile, ne permet pas qu’elles restent collées, elles finissent souvent par adhérer : « démodé », « rabat-joie », « instable », « paresseux », « excessif », « fanatique », « naïf », « dangereux », « parasitaire »… Des vignettes autocollantes qui tapissent le front, descendant jusqu’au cœur, culpabilisantes et donnant la sensation d’être inférieur.

Mais ne voyez-vous pas, gens du monde, églises du monde, que la société vous contrôle, tout comme vous aspirez à contrôler ce qui vous entoure ? Est-ce là votre sécurité ? Ou bien est-ce là votre perdition ?

« Après cela viendra la fin, quand il remettra le royaume à Dieu le Père, après avoir détruit tout empire, toute domination et toute puissance » (1 Corinthiens 15:24).

Lâcher prise, ce n’est pas faire une pause entre deux rendez-vous, en s’allongeant un moment ou en buvant un café bien chaud. Ni faire une séance de yoga ou de Taï-chi. Ce n’est pas non plus sortir de son quotidien en perdant le contrôle de soi le temps d’une soirée bien arrosée, ni faire l’amour avec n’importe qui. Ce n’est pas non plus accepter n’importe quoi sous prétexte qu’il s’agit du « destin » et pérégriner sans but de manière absurde et tout à fait aléatoire, au gré des divers courants de croyances et de pensées.

Lâcher prise, c’est mettre un terme au besoin instinctif de tout contrôler. C’est s’en remettre à Dieu pour toutes choses, en toutes occasions, en tous lieux. C’est comprendre la petitesse de l’être humain et son incapacité à gérer le monde, qu’il soit grand ou petit. Que ce soit à l’échelle du globe ou à l’échelle de nos vies, ou à l’échelle de notre étroite perception, nous ne pouvons gérer aucune loi, aucune justice, aucune action, ni aucune pensée sans l’intervention et le secours de Dieu.

« Certainement il n’y a point d’homme sur la terre, qui fasse le bien et qui ne pèche point » (Ecclésiaste 7:20).

Lâcher prise, c’est lâcher cette corde qui nous tient, qui nous lie, qui nous dicte comment vivre, comment rester intégré dans un système que nous sommes obligés d’approuver. Elle nous dicte comment nous divertir, comment nous habiller, comment travailler, comment devenir important, comment être heureux… Cette corde, n’est qu’un leurre, un outil de programmation atroce pour meubler des vies au détriment des âmes. Or, la vie passe et l’âme est mortelle. Elle se réveillera une dernière fois pour le jugement final, car ceux qui auront craint le jugement des hommes sur la terre seront surpris par un jugement supérieur, ô combien plus effrayant et plus décisif !

Lâcher prise, c’est accepter d’appartenir au Christ seul, et Le laisser nous prendre. C’est avoir les mains vides, mais être dans la main de Dieu. Lâcher tous les mensonges, toutes les emprises, les jugements et les superstitions, pour saisir l’unique Vérité du Dieu invisible et vivant, Créateur du ciel et de la terre, Rédempteur glorieux, dont la venue approche à grands pas.

Lâcher prise, c’est ne plus essayer — selon la tendance de notre chair humaine — de contrôler le navire qui, désormais, ne nous appartient plus, mais plutôt voguer dans l’apesanteur de la Volonté de Dieu, sous la directive de la Grâce, par la force de Son Esprit.

Ai-je besoin de tenir quelque chose ? Un stylo pour écrire, des livres pour lire, de multiples objets, des ustensiles, des outils et des souvenirs… Mais si l’on m’enlève tout cela, suis-je perdue ? Lâcher prise, c’est n’avoir besoin de rien, si ce n’est de la Grâce du Dieu Sauveur. C’est être déjà avec Lui en esprit et avoir déjà dit « adieu » à tout ce qui m’entoure.

« Et certes, je regarde toutes les autres choses comme m’étant nuisibles en comparaison de l’excellence de la connaissance de Jésus-Christ mon Seigneur, pour l’amour duquel je me suis privé de toutes ces choses, et je les estime comme du fumier, afin que je gagne Christ » (Philippiens 3:8).

Celui qui est capable d’un tel recul n’est pas victime de sa souffrance, non pas qu’il soit exempt de sentiments et d’émotions, puisque sans eux nous ne serions plus des humains, mais parce que sa vie est véritablement en Christ, cachée en Christ, confiée à Christ, au Dieu vivant qui contrôle toutes choses ici-bas comme dans tout l’univers.

Que le Seigneur vous bénisse. Qu’Il nous accorde Sa Grâce, la Grâce de n’appartenir qu’à Lui seul et d’être déliés de l’oppressante corde du monde.

Anne-Gaëlle

« O Éternel, ta parole subsiste à toujours dans les cieux. Ta fidélité dure d’âge en âge ; tu as fondé la terre, et elle demeure ferme. Tout subsiste aujourd’hui selon tes ordonnances ; car toutes choses te servent. Si ta loi n’eût été mon plaisir, j’eusse alors péri dans mon affliction. Je n’oublierai jamais tes commandements, car par eux tu m’as fait revivre. Je suis à toi » (Psaume 119:89-94).




T.039 – Une relation exclusive

En me promenant un soir, j’ai soudain considéré combien il peut être bon de vivre et à quel point il est possible de négliger ce don. Il n’est pas seulement dommage de ne pas apprécier sa vie, mais il est surtout vital de vivre vraiment. Or, dans une prison, il est difficile de vivre : on se contente de survivre, c’est-à-dire, de s’imposer ce but assez trouble de s’en sortir et de ne pas « crever ».

Une prison n’est pas seulement faite de briques, puisqu’il en existe tant d’autres, et la pire est celle qui est forgée par les murs de notre perception. Si je vis dans le péché – parce que je suis sous la loi du péché – ma perception est défectueuse par rapport à la Vérité unique instaurée par Dieu et qui est en Dieu. Sans prise de conscience, je suis dans la prison de ma perception, qui ne génère qu’orgueil ou mépris.

« L’œil est la lumière du corps : si donc ton œil est sain, tout ton corps sera éclairé ; mais si ton œil est mauvais, tout ton corps sera ténébreux. Si donc la lumière qui est en toi est ténèbres, combien seront grandes ces ténèbres ! » (Matthieu 6:22-23).

Si je me perçois comme un être coupable et si je me désapprouve sans cesse, sans que la Grâce de Dieu ne puisse m’atteindre et m’affranchir, je suis également en prison. Mon regard trop sombre dénature ma vie, jusqu’à ne plus être en mesure de reconnaître ça et là les marques de la Présence de Dieu, de Son Amour, ni de Sa Bonté envers tous, Lui qui « fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et il fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes » (Mattieu 5:45) ; sachant qu’à l’échelle de la Justice de Dieu, personne ici-bas n’est suffisamment bon ou juste pour mériter Sa Grâce.

Il est bon de se la rappeler continuellement, afin de ne pas s’enorgueillir ; mais il faut faire attention de ne pas tomber dans le piège inverse. À force de se culpabiliser et de se dévaloriser chaque jour, un mécanisme mental dangereux peut se mettre en place : une sorte de « barrière anti-grâce », qui empêche le coeur assoiffé de boire, le cœur affamé de se nourrir et qui éloigne donc le chrétien de son Dieu, même s’il croit en Lui de toutes ses forces.

Cette situation peut s’avérer très inconfortable, car on se retrouve dans un état de paralysie interne, non pas mort, si l’on est de ceux qui ont goûté à la Vérité, mais pas réellement vivant, puisqu’incapable de s’affranchir, incapable d’apprécier la vie, ni de vivre chaque jour consciemment avec reconnaissance, comme un don sacré de Dieu.

« Et l’Éternel Dieu forma l’homme de la poussière de la terre, et souffla dans ses narines une respiration de vie ; et l’homme devint une âme vivante » (Genèse 2:7).

Pourtant, la vie est précieuse. Même les humanistes, les défenseurs des droits humains, et ceux de la cause animale, les protecteurs de l’environnement, tous se rejoignent avec nous sur ce point : la vie est précieuse.

La Bible dit que « quant à l’âme de toute chair, c’est son sang ; il lui tient lieu d’âme » (Lévitique 17:11), et « le sang c’est l’âme » (Deutéronome 12:23), elle parle de « l’âme précieuse de l’homme » (Proverbe 6:26). La vie précieuse se trouve dans le sang de l’être vivant ; le sang étant l’âme de celui-ci, on peut aisément en déduire que l’âme et la vie sont indissociables, et lorsqu’on parle de la valeur d’une âme, on parle de la valeur d’une vie.

« Car c’est toi qui as formé mes reins, qui m’as façonné dans le sein de ma mère. Je te loue de ce que j’ai été fait d’une étrange et merveilleuse manière ; tes oeuvres sont merveilleuses, et mon âme le sait très bien. Mes os ne t’étaient point cachés, lorsque j’étais formé dans le secret, ouvré comme un tissu dans les lieux bas de la terre. Tes yeux m’ont vu, lorsque j’étais comme une masse informe, et sur ton livre étaient inscrits tous les jours qui m’étaient réservés, quand aucun d’eux n’existait » (Psaume 139:13-16). La vie est un mystère, un cadeau, une source inépuisable d’étonnement et d’émerveillement.

La vie est également source de jouissance pour celui qui sait dominer sur son sentiment de culpabilité. Or, il n’existe que deux moyens pour atteindre cela : celui du diable et celui de Dieu. Celui du diable consiste à faire taire sa conscience, à la dompter peu à peu en lui dictant ses propres lois afin qu’elle finisse par obéir à sa propre volonté, puis qu’elle l’approuve, l’accepte et la normalise.

Le moyen de Dieu, quant à lui, est diamétralement opposé. Il fait disparaître la culpabilité par la Puissance de la Grâce divine, à travers la foi dans la suffisance du sacrifice unique de Jésus-Christ offert pour nous, qui nous délivre lorsque nous implorons Son pardon d’un coeur sincère.

« Il n’y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ, qui marchent, non selon la chair, mais selon l’esprit » (Romains 8:1).

Si la culpabilité est un iceberg, le pécheur – qui, naturellement, refuse de souffrir et veut librement jouir de sa vie – s’habitue aux températures très basses. Il s’adapte avec toutes sortes de compromis et de stratégies de compensation pour ne plus être gêné par le froid glacial, ni même remarquer qu’il vit sur un iceberg. Malgré ce que sa perception lui dit, qu’il le ressente ou non, il vit dans le froid. Et s’il en a conscience, comme le dit l’expression : « il fait avec ».

La Grâce de Dieu, quant à elle, est comme le soleil dans sa puissance, qui fait fondre l’iceberg et le fait disparaître. La glace fondue rejoint la masse des eaux de l’océan et plus personne ne peut dire où était l’iceberg, pas même Dieu, qui affirme : « C’est moi, c’est moi qui efface tes forfaits pour l’amour de moi, et je ne me souviendrai plus de tes péchés » (Esaïe 43:25).

Alors, pourquoi tant de chrétiens prennent-ils des moyens détournés pour se libérer de leur sentiment de culpabilité ? Et pourquoi y a-t-il dans nos vies d’énormes morceaux de l’iceberg qui n’arrivent pas à fondre ?

Dieu a-t-Il créé l’Homme pour qu’il soit abattu ? Est-ce le souhait ou la norme de Dieu pour Ses créatures humaines – summum de toute la création – qu’elles errent dans l’incapacité d’apprécier d’être en vie ?

« Le cœur joyeux vaut un remède ; mais l’esprit abattu dessèche les os » (Proverbes 17:22).

Si l’on se figure de manière imagée que les os –  placés au plus profond de notre corps – représentent l’homme intérieur, on peut visualiser l’effet de l’abattement psychologique sur celui-ci : il se dessèche, perd de sa vigueur, de son entrain, jusqu’à se perdre lui-même.

Dans ma vie, le sentiment de culpabilité ou celui de ne pas être à la hauteur m’ôtent peu à peu la joie de vivre. Et si je suis incapable d’être joyeuse et d’apprécier simplement le cadeau de Dieu de m’avoir mise au monde, c’est très culpabilisant. Qui me délivrera de ce cercle vicieux ?

L’important est d’en prendre conscience, non pas pour consolider les murs de ma prison mais pour en sortir. Celui qui peut me faire sortir de ma prison, c’est Jésus-Christ par Sa Grâce et Sa Puissance souveraine.

Dieu a peut-être du plaisir à me voir sourire. Il est probable que Son cœur se réchauffe à l’écoute de ma louange, quand Il m’entend chanter seule dans mon coin. Et il se peut qu’Il éprouve beaucoup de joie dans les moments où j’accorde à la vie toute son importance, en l’appréciant à sa juste valeur.

Se repentir est une bonne chose, mais se repentir vers quoi ? Se détourner de sa mauvaise perception et de sa conduite coupable pour aller vers quoi ? Le péché revient si facilement, si on ne lui barre pas la route avec un changement concret et radical.

Dans mon état d’esprit dépressif, à attendre passivement un changement dans ma vie et à m’habituant au vide d’un quotidien devenu très banal, j’étais en proie à une sorte d’addiction qui me permettait de m’enfuir loin de ma vie et de ma culpabilité, dans toutes sortes de lieux et d’histoires, et pour quelques heures de ne plus être moi-même. Je partais régulièrement à la médiathèque emprunter des films que je regardais jusqu’à tard dans la nuit. Bien que mon choix restait généralement correct – évitant en toute conscience l’excès de violence et de scènes sensuelles – je me suis rendue compte, au bout d’un certain temps, qu’en m’endormant juste après, cela générait en moi des rêves absurdes et fort désagréables. Mon sommeil s’en est trouvé troublé et je n’étais plus en forme. Parfois, les rêves étaient en rapport direct avec les films visionnés, parfois il n’y avait pas de rapport, mais le contenu des rêves était païen, mondain et même très vulgaire et immoral.

Pourquoi le diable rentre-t-il dans mon sommeil, me demandais-je. Pourquoi l’Esprit de Dieu ne le repousse-t-Il pas ?

En me réveillant, j’avais honte. J’étais comme coupée en deux : une partie de moi pensait être totalement étrangère à ces cauchemars, car ils ne la concernait pas dans la réalité, et il suffisait donc de les oublier. Mais quelque chose dans mon cœur reconnaissait être en relation directe avec le mal et les péchés malsains commis fictivement dans les rêves.

Intuitivement, j’ai compris que ces rêves obscurs dépeignent ma condition humaine : sans le vouloir, il y a bel et bien quelque chose de sombre en moi, un potentiel à faire le mal, un potentiel à m’avilir et à me détruire, un potentiel à aimer le monde et à me perdre. Sans en tenir compte, je nourrissais ce potentiel, alors que je ne prenais que très peu de nourriture divine, à savoir la Parole de Dieu. C’est un peu comme si je choisissais un autre dieu.

Puis j’ai soudain réalisé le regard du Christ, un regard perçant et coupant, qui voit à l’intérieur de l’être humain la fissure entre le croyant fidèle et le criminel potentiel. Et j’ai compris que Jésus-Christ voit en nous la partie sombre que nous faisons souvent semblant de ne pas connaître, qu’Il la connaît mieux que nous la connaissons nous-mêmes et que, malgré toute l’horreur qu’elle suscite, Il nous aime.

« Oui, tu as ça en toi, » me souffle-t-Il, « mais Moi Je veux mettre autre chose en toi. Ne t’éloigne plus de Moi ! »

Alors, j’ai réalisé combien je m’étais éloignée de Lui. Je ne chante plus mon amour, ni ma reconnaissance envers Lui. Je ne me prosterne plus devant Sa Majesté. Je ne célèbre plus de culte à mon Seigneur, sous prétexte que je suis seule et que j’ai quitté les assemblées. Je ne suis plus dans les parvis de l’Adoration.

« Mais toi, quand tu pries, entre dans ton cabinet, et ayant fermé ta porte, prie ton Père qui est dans ce lieu secret ; et ton Père qui voit dans le secret te le rendra publiquement » (Matthieu 6:6).

En allant rendre une visite spontanée à ma belle-sœur, qui est radicalement catholique, je suis arrivée au moment où elle et sa famille étaient en train de suivre l’office de la messe à la télévision. Conscients des « déviations » liées à l’égarement massif des chrétiens dans les temps de la fin, ils vivent leur foi de manière autonome et intime, ayant quitté leur assemblée, toutefois sans avoir pris conscience des mensonges sur lesquels ils s’appuient encore.

J’étais très surprise quand, en rentrant dans leur salon pour les saluer, je vis leur fille de seize ans agenouillée sur le sol, prosternée face contre terre, chantant et souriant d’une manière si touchante que j’en fus complètement troublée. La joie et la paix qui rayonnaient sur son visage m’émurent profondément.

Je compris alors que Dieu avait guidé mes pas ce jour-là, afin de me montrer que ces personnes, que je pense profondément perdues, ont, malgré leur mauvaise compréhension de la Bible, quelque chose que je n’ai pas : quelque chose que j’ai perdu et qui pourtant est essentiel. Ils adorent le Christ et vénèrent Dieu en Lui offrant chaque jour des moments consacrés uniquement à l’adoration. Ils sanctifient le Nom de Dieu en séparant ce qui est profane de ce qui est saint, vivant ce temps à part comme une priorité exclusive, un devoir et un besoin.

« Tu ne prendras point le nom de l’Éternel ton Dieu en vain ; car l’Éternel ne tiendra point pour innocent celui qui aura pris son nom en vain » (Exode 20:7).

« Je ferai connaître mon saint nom au milieu de mon peuple d’Israël, et je ne laisserai plus profaner mon saint nom ; et les nations sauront que je suis l’Éternel, Le Saint en Israël » (Ezéchiel 39:7).

Nous débattîmes à propos des divergences de nos croyances respectives. Je leur expliquai ce que je sais des évènements à venir prophétisés dans le livre de l’Apocalypse. Egalement, dans l’expectative des signes décrits par notre Seigneur Jésus et suivant de près les évènements politiques et économiques, nous nous retrouvâmes sur plusieurs points et je rendis grâce à Dieu que la conversation fut possible.

En repartant chez moi, je me posais cette question que j’avais tendance à ne poser que pour les autres : « sommes-nous prêts ? » Etrangement, cette question s’adressait aussi à moi.

Avant que n’arrive le grand chaos final, sommes-nous sûrs d’être du bon côté ? Du côté du Christ, du vrai Christ, tandis que la foi se ramollit et que les faux prophètes surgissent de plus en plus ?

Avons-nous l’ingrédient essentiel pour faire face aux guerres et aux persécutions quand elles nous toucheront subitement et brutalement ? Même si nous pensons être de ceux qui seront miraculeusement épargnés, protégés, comment réagirons-nous en voyant tout autour ce qui se passera ? Serons-nous assez forts pour ne pas tomber dans le gouffre du deuil et de l’abattement ?

Et pour être sûrs de passer au travers de la folie générale et de la manipulation démoniaque, posons-nous cette question : appartenons-nous vraiment au Christ ?

Le vrai Christ inspire Crainte et Adoration, parce qu’Il est à la fois Autorité et Grâce, Roi, serviteur, douceur et ferveur, bonté mais Justice. Il voit notre attitude, Il connaît nos failles. Il peut Se servir de tout un chacun pour exhorter, redresser, secouer, châtier. Il n’y a rien qui Le limite, si ce n’est nous-mêmes.

J’ai limité Dieu, j’ai limité Sa force en moi, dans la mesure où je ne Lui ai plus attribué Sa juste place. Mais Son regard est gracieux pour qui accepte de prendre conscience et de changer d’attitude. La partie sombre en moi ne limite pas l’Amour de Dieu, mais elle me limite moi, si je la nourris – consciemment ou inconsciemment – car elle m’empêche de vivre ma relation exclusive avec le Seigneur. Or, sans cette relation exclusive manifestée par des temps d’adoration, de prière et de méditation de Sa Parole, même si nous croyons détenir la vérité, elle nous échappe.

« Je suis le chemin, la vérité et la vie ; personne ne vient au Père que par moi » (Jean 14:6).

Nous ne Lui échappons pas, car Sa main de bon Berger ne se desserre pas, mais la nôtre, oui. Nous ouvrons la main pour lâcher la Sienne et nous cramponner à des choses sans valeur.

Mais par Sa Bonté, à cause de l’Amour qu’Il a pour nous, Il nous rattrape, nous corrige, parfois par le moyen de l’humiliation, afin que la correction s’imprègne profondément en nous, comme marqués par le fer : ce qui a été le cas pour moi, puisqu’allant chez des personnes que je pensais plus perdues que moi, leur apportant la Lumière de la Vérité, je réalise que moi-même je me perds, les trouvant dans l’attitude dans laquelle Dieu me demande de vivre !

Mais pour celui ou celle qui a vraiment goûté à l’Amour du Christ, l’humiliation par laquelle Dieu est contraint de nous faire passer est délicieuse, car elle précède le retour à la Grâce et à l’épanouissement de l’être intérieur qui était morne et desséché, et qui a tellement besoin d’être régénéré. En d’autres termes, elle nous ramène vers une relation exclusive.

« Car la parole de Dieu est vivante, et efficace, et plus pénétrante qu’aucune épée à deux tranchants, perçant jusqu’à la division de l’âme et de l’esprit, des jointures et des moelles, et jugeant des pensées et des intentions du cœur » (Hébreux 4:12).

« Dieu est amour » (1 Jean 4:8).

Soyez bénis,

Anne-Gaëlle

 




T.038 – La grande confusion

J’ai passé quatre jours avec un homme, dont le souvenir n’évoque pour moi que paradoxe. Il fut le seul dans le stage, auquel je participais, à sembler apprécier ma compagnie. Il s’assit près de moi et tandis que je me livrais à la laborieuse écoute d’une matière trop complexe (loi, fiscalité, comptabilité…), il semblait me rejoindre sur deux points : sa dénonciation d’un système capitaliste impitoyable et son détachement psychologique par rapport à ce système. A première vue, je me sentais bien avec lui, puisqu’il m’expliquait les choses avec humour, alors que tous les autres trop sérieux ne parlaient que d’argent et de rentabilité.

Comme souvent en ma présence, les discussions prennent un axe spirituel, nous ne tardâmes pas à aborder les grandes questions existentielles. Dès la première pause-déjeuner, il m’exposa avec noblesse d’esprit toutes ses croyances et je fus réellement éprouvée devant l’immense confusion qu’il tenta de semer en moi. Tandis que chacune de mes ripostes était perçue comme une écrasante marque d’orgueil, il fallait pourtant que je pose les bonnes questions et que je donne les bonnes réponses.

Ce fut navrant pour moi d’être perçue comme un clown vaniteux – un clown parce que je le faisais rire – cramponnée à des idées « grotesques et obsolètes », comme celle de ne croire qu’en un seul Dieu et en Sa création réalisée en six jours. Un clown trop vaniteux, car croyant détenir l’unique vérité, montrant donc mon inavouable « supériorité », selon lui forcément associée à des pensées fascistes. Chacune de mes paroles était perçue comme un jugement et rien de ce qui brillait en moi ne pouvait atteindre son œil.

Dieu me trouve-t-Il trop orgueilleuse à vouloir défendre la Vérité ? Que dois-je tirer de cette expérience ?

Ma leçon à retenir pourrait être que la Vérité se défend d’elle-même. Mais alors, à quoi puis-je servir ? Est-ce une marque de vanité que de souffrir de mon inutilité dans ce monde ? Jésus n’a-t-Il pas parlé du serviteur inutile ? Ai-je servi Dieu pendant ces quatre jours ?

La confusion est là, elle grandit de plus en plus. Elle est comme une immense toile d’araignée et elle veut me prendre. Je suis seule et éprouvée, je suis fatiguée de fuir. Dans tous les endroits de ce monde, je trouverai la même chose : un réseau diabolique aux valeurs inversées et aux lois contraires à celles de mon Dieu. Que le Père éternel soit mon Maître et mon secours !

Cet homme m’a dit qu’il n’y a pas de vérité, que tout est vérité, que la vérité est illusoire. Il dit que tout n’est que perception : ce que nous voyons, ce monde, nous-mêmes. Il parle d’univers parallèles, de physique quantique, de perpétuels changements. Il se dit indéfinissable, car selon lui rien n’est fini, tout est infini et on ne doit s’accrocher à rien. Il affirme que se fixer, c’est mourir et que la seule certitude ici-bas, c’est la mort.

S’il a un dieu, c’est la terre sur laquelle il vit, respire et meurt. Il parle du Yin et du Yang, car pour lui, le bien et le mal n’existent pas. Il évoque sa liberté, qu’il dit totale, et la compare à ma « prison » (mes préceptes religieux). Il semble avoir pitié de moi.

Dieu sait combien de personnes ici-bas pensent comme lui. Si je l’ai rencontré, ce n’est pas par hasard. Le Seigneur me confronte au monde ; Il me confronte à sa médiocre réalité pour que la Vérité grandisse en moi.

Mais moi, je vais mal. Je ne suis pas imperméable. Les choses que je repousse s’imprègnent en moi. Ma lumière ne brille plus :

Je veux être amour, mais l’image que je donne en est si loin.

Je veux prouver ma liberté, mais on me voit captive et on me plaint.

Je veux être compatissante, mais on se heurte à mon intolérance.

Je dis ce que je pense et on s’irrite de mon « orgueil ».

Je dis ce en quoi je crois et je perds toute crédibilité.

Pourquoi suis-je au seuil du nouvel-âge ? Pourquoi tout ce que je touche, tout ce que je côtoie en fait indéniablement partie ? Si je suis contrainte à intégrer un groupe, ce sont ses partisans qui entrent en communication avec moi, comme si nous nous attirions. Si je fuis, je me retrouve dans l’isolement.

Quand j’affiche mon appartenance au vrai Dieu, on se moque ouvertement de moi. Je dois supporter les railleries et les blasphèmes… Mais cela n’est pas important, puisque Son Nom m’est préférable à tous les trésors de la terre, et Sa Gloire, à celle que recherchent les humains.

Savoir que le chemin sur lequel je marche est étroit et savoir que les tourments et persécutions sont ma norme terrestre ne me console pas. Ma seule consolation réside dans l’affection que Dieu me porte. Mais où est-elle ?

Le système est une sangsue immense qui aspire l’énergie et noie les rêves humains dans une mare d’injustice. Je n’ai plus d’énergie. Je n’ai bientôt plus de rêves. Je suis tout juste capable de prononcer cette courte prière :

« Seigneur, donne-moi Ta Pensée, remplis-moi de Ta force.

Manifeste-moi Ta Bonté, entoure-moi de Ta Présence.

Ne me laisse pas oublier quelle est Ta Volonté. »

Le système me dicte un chemin qui n’est pas fait pour moi. Il me pousse à adorer l’argent et à ne vivre que pour le faire fructifier. Il me pousse dans la misère en générant des dettes. Il me fait croire qu’il y a beaucoup de mérite à s’enrichir, que le bonheur repose sur l’ambition.

Les hommes de ce siècle me suggèrent une voie bien courante, celle qui contourne l’injustice et pallie les lacunes de ce système, afin de faire des bénéfices et de ne pas couler. Mais même si on la dit légitime, c’est la voie de la fraude.

Y a-t-il un autre chemin ? Comment échapper au système tout en restant intègre ?

Celui qui ne fait plus la différence entre le bien et le mal ne cherche que son propre intérêt. Or mon intérêt, c’est de suivre le Seigneur et de ne pas me perdre loin de Sa Justice. Pourtant, ma route n’est pas balisée, le brouillard s’épaissit et je n’y vois plus rien.

Le désir de suivre le Christ est-il suffisamment gravé en moi ? Suis-je capable de chercher Sa volonté ? La peur d’échouer est-elle si forte pour me faire dérailler ?

Cet homme aux croyances paradoxales, qui me disait que tout le monde dit la vérité – parce que, selon lui, il n’y a pas de vérité unique – et qui pourtant ne voulait pas de la mienne, croit que l’univers est régi par des énergies.

Par des paroles et pensées négatives, j’appelle l’échec, dit-il. Mais qui est maître de ses pensées ? Qui parvient à n’en générer que des bonnes, des pures, des constructives ?

Je voudrais n’être qu’un avec le Seigneur pour ne plus penser par moi-même. Car je sais que la liberté de pensée est une illusion. Le mental est soumis à la loi du péché ; il est programmé pour obéir au mal et servir au plan de Satan.

Or, la seule manière d’échapper au mensonge, c’est en trouvant la délivrance par la foi dans le Sacrifice de Jésus-Christ, en me fiant à Sa Parole et en vivant par Sa Grâce.

Il ne voit pas les barreaux de sa cage. Il ferme les yeux, pratique la méditation transcendantale ; il « se vide de lui-même » et ne fait plus qu’un avec la terre ; il « sort de son corps » et visite la galaxie. Pour lui, rien n’existe et le bonheur consiste à en prendre conscience et, donc à profiter du moment présent. « Nous sommes tous reliés, » dit-il, « et un petit caillou a autant d’importance qu’un être humain ».

Il dit qu’il est divin, car « le divin est en chacun ». Il affirme que chaque créature est « parfaite », même les êtres humains qui commettent des actes pervers. La vérité de chacun est bonne puisque tout est « relatif », puisque tout change et que rien n’est certain… Comment fait-il pour vivre sans certitude ?

Combien de personnes sont-elles prises dans cette étrange religion ? Pourquoi leur nombre augmente-t-il aussi rapidement ? C’est une vague immense qui balaie toute la terre ; celui qui ne sait pas nager apprend à flotter dans la vague, et celui qui nage à l’encontre finit par couler, à moins d’être sauvé par Dieu Lui-même.

Qui peut avoir assez de force pour lutter contre la puissance de ce courant diabolique ? Je n’ai de force que celle d’attendre le divin secours.

Si je n’existe pas, ma souffrance n’existe pas non plus. Mais à quoi je sers ? Pourquoi je vis ? Ne suis-je qu’un amas d’énergie qui se transforme ?

Certes, il est bien aisé dans cette philosophie de maîtriser la souffrance existentielle de l’Homme sans Créateur, mais y trouve-t-il réellement une motivation pour vivre ?

Pour ma part, même dans la souffrance, je veux continuer à croire que pour mon Dieu, j’existe. Je veux garder en moi la certitude de Son Amour et puiser dans ma foi ma seule raison d’être.

Faite à Son image, je veux chanter pour Lui, sans jamais laisser l’impie me dicter ma conduite. Emplie de Son Esprit, je veux briller pour Lui, sans laisser rien ni personne éteindre ma lumière. Je veux défendre mes idées sans rougir, sans me taire. J’aimerais goûter au bonheur d’être à plusieurs pour aimer Dieu, plutôt que de Le servir misérablement en solitaire.

Ce qui est vraiment frustrant, c’est que les partisans du nouvel-âge ne sont pas seuls. Ils font partie d’un très grand réseau et se sentent bien partout. Ils ont la faculté de s’adapter comme des caméléons, d’adopter une pensée par intérêt ou de relativiser les choses pour les rendre supportables. Ils sont capables de jouir de la vie, disposant d’un tas de techniques pour se débarrasser de ce qui leur pèse et pour atteindre le bien-être qu’ils affichent si fièrement. Ils sont « connectés » les uns aux autres, ils ne sont jamais seuls !

Là est peut-être la plus grande tentation : celui qui vit pour être fidèle à la Vérité suivant l’exemple du Christ – « venu dans le monde pour rendre témoignage à la Vérité » (Jean 18:37) – se retrouve comme un agneau entouré de loups ; l’amitié entre l’agneau et le loup étant improbable. Le Berger tarde à arriver et l’agneau se dit parfois qu’être un loup, ça doit être formidable.

« J’ai porté envie aux insensés, voyant la prospérité des méchants. Car ils ne sont point liés jusqu’à leur mort, et leur force est en son entier. Quand les mortels sont en peine, ils n’y sont point, ils ne sont point frappés avec les humains. C’est pourquoi l’orgueil les entoure comme un collier, la violence les couvre comme un vêtement. Leurs yeux sont enflés à force d’embonpoint ; les désirs de leur cœur se font jour. Ils sont moqueurs et parlent méchamment d’opprimer, ils parlent avec hauteur. Ils portent leur bouche jusqu’au ciel, et leur langue parcourt la terre. […] Ceux-là sont des méchants, et, toujours heureux, ils amassent des richesses » (Psaumes 73:3-9 et 12).

Pourtant, en toutes circonstances, il faut garder à l’esprit que le plus important reste à venir. Le plus important n’est pas encore visible.

Dans le règne présent, celui du matérialisme, de l’argent, du pouvoir élitiste et de la séduction charnelle, on ne voit que l’injustice des hommes ; la justice de Dieu est invisible, mais cela ne la rend pas inexistante. Un jour, l’avidité, la cupidité, l’avarice, la perfidie et l’hypocrisie seront mises à nu ; tous les voiles tomberont. Tout ce qui aura tenté et éprouvé les enfants de Dieu n’aura plus aucune force, plus aucun impact ni aucun intérêt.

Ce sera la fin soudaine de ces choses, qui sera de grand intérêt, car Dieu rendra à chacun selon ses œuvres : ceux qui auront fait preuve de malice auront mal et ceux qui auront fait preuve d’orgueil seront humiliés. Ceux qui auront séduit à tort et à travers ne seront plus séduisants, ils connaîtront le tourment d’être rejetés. Et ceux qui auront adoré la richesse n’auront plus rien à posséder, ni rien derrière quoi se cacher.

« J’ai donc réfléchi pour comprendre ces choses, et cela m’a semblé fort difficile ; jusqu’à ce qu’entré dans les sanctuaires de Dieu, j’aie pris garde à la fin de ces gens-là. Car tu les mets en des lieux glissants ; tu les fais tomber dans des précipices. Comme ils sont détruits en un moment ! Enlevés et consumés par une destruction soudaine ! Tel un songe quand on s’éveille, ainsi, Seigneur, à ton réveil tu mets en mépris leur vaine apparence » (Psaumes 73:16-20).

Le réveil de Dieu ne signifie pas qu’Il dort, comme peuvent le croire beaucoup de personnes qui, face à la misère croissante, se détournent de Lui en le pensant inactif, absent ou inexistant.

Le réveil du Seigneur est une image pour figurer Son glorieux retour sur la terre en temps que Juge redoutable qui vient détrôner les puissants quand la très longue période de grâce arrivera à son terme. Pendant des siècles, Dieu a été plus que patient ; cette miséricordieuse patience peut être figurée comme un long sommeil.

Alors écoute, mon âme, ne les envie pas ! Regarde-les avec les deux yeux : un œil qui les voit au travers de la Loi divine – violée, profanée, ignorée – et les répercussions à venir ; et l’autre œil qui les voit au travers de la Miséricorde divine afin de ne pas les haïr, ni les mépriser et garder l’espoir de leur repentance.

Que le fort prie pour le faible, car tous les membres du corps ne sont pas égaux en force ni en sagesse. L’envie et le manque se trouve en chacun, assez pour avoir pensé au moins une fois combien le chemin large semble préférable.

Que Dieu protège et défende Son peuple.

Soyez bénis,

Anne-Gaëlle

 

 




T.037 – Conversation avec Dieu

« Seigneur, mon comportement n’est pas digne d’une princesse, et c’est pourtant ce que je suis à Tes yeux. Mais personne ne le sait, pas même moi, puisque je me conduis parfois de manière bien absurde. Une princesse se conduit toujours bien, sans jamais s’écarter du protocole de la cour et de l’étiquette. Et, bien que ma cour soit Ton Royaume et mon étiquette la Sagesse de Ta Parole, bien que mon Père soit le Roi de l’univers, je ne me conduis pas en princesse. Je laisse les éléments extérieurs dominer sur moi. Pourtant, tous les éléments sont dans Ta main ; Tu les disposes et les transformes à Ta guise.

J’ai parfois du mal à croire que Tu m’aimes. Je le sais pourtant, mais il y a tant de distance entre la connaissance et la conscience ! Je peux savoir quelque chose sans en être personnellement vraiment sûre. Et la preuve de mon incertitude, c’est qu’au fond de moi, j’ai peur de perdre Ton amour. Il y a donc un conflit quelque part : je sais quelque chose, mais je ne le prends pas pour acquis. Ton ennemi, qui rôde sans cesse autour de moi, se place entre ma tête et mon cœur, afin que jamais les deux ne se rejoignent.

Si je perdais Ton amour, que me resterait-il ? Où irais-je ? Que ferais-je ?

Si Tu venais à m’abandonner, je mettrais fin à mes jours, car sans Toi je n’aurais plus de raison de vivre. Ma vie se base sur Ton amour et sur l’attente de Ton glorieux retour. Il me resterait encore ma fille, certes. Mais je n’aurais plus aucun espoir, ni pour elle, ni pour moi. Or, aujourd’hui j’ai foi en Ton alliance. Et même si mon attitude au quotidien n’est pas digne du rang que j’occupe à Tes yeux, je demeure attachée à notre alliance. Je continue à croire qu’elle est encore valable.

Notre alliance est toujours actuelle ; elle me permet –  par la vertu de Ton sacrifice à la croix – de me présenter devant Toi et de Te parler sincèrement, quelque soit la charge qui me pèse. Ainsi, je Te supplie, mon Seigneur et mon Dieu, de nous manifester Ton amour et Ta miséricorde !

Le monde manque de charité. On dit que la planète se réchauffe, et moi je dis qu’elle se refroidit ! Dans chaque situation, je crains toujours d’être rejetée. Ma fille aussi expérimente cela quotidiennement. Elle a du mal à se faire aimer. Je sais qu’à Tes yeux, cela est tout à fait normal : Tu nous as prévenus que le monde nous haïra. Mais Toi qui connais le rejet et la douleur qu’il occasionne, peux-tu me dire pourquoi faut-il que, l’ayant vécu moi-même, je revive cette souffrance au travers de mon enfant ? Faut-il qu’elle vive la même chose que moi ? N’est-il pas naturel pour une mère de vouloir l’épargner ? A cela tu réponds « Je n’ai pas épargné mon Fils »…

Oui, quand Toi, le Dieu qui a créé l’univers, es devenu un Fils, le Ciel ne s’est pas vidé de Toi et Tu as souffert doublement : en Victime expiatoire et en Père qui doit juger équitablement la terre. Ta Parole le dit, il n’y a aucune souffrance qui ne te soit inconnue.

Ici-bas règne l’ignorance de ce qu’est l’Amour. C’est le règne de la jalousie, du mépris et de l’esprit de compétitivité. La notion de compassion est absente des mentalités. On ne se met jamais à la place de l’autre. Le don de soi est si rare. Je parle bien sûr du don de soi aux autres et à Dieu. Mais les gens ne Te connaissent pas, ou bien mal. Ils se donnent à eux-mêmes pour satisfaire leurs propres appétits. Leur dieu, c’est leur ventre ou leur ambition.

Et moi qui veux construire ma vie sur le roc de Ton Évangile, je voudrais tant faire preuve du don de moi-même, mais je me demande comment me donner dans un monde si égoïste. Vers quelle maison aller ? Vers qui ? Qui peut avoir besoin de moi ?

C’est le règne de l’autosuffisance. La plupart des gens se satisfont eux-mêmes et rejettent tout changement dans leur vie. Ils ne veulent pas s’encombrer. Et pourtant, ils ne savent pas que leur vie est déjà un encombrement et que Toi, Seigneur, Tu peux les désencombrer, les libérer complètement. Encore faut-il Te laisser une place !

J’essaie de Te laisser toujours plus de place dans ma vie. Mes choix et mes décisions tournent la plupart du temps autour de cet axe. Me libérer des contraintes terrestres superflues pour avoir le temps et l’espace dans mon esprit, afin d’être disponible pour Toi et de T’appartenir entièrement. Mais plus je fais cela et moins je trouve ma place dans ce monde. Comment trouver ma place ici-bas ?

Je vis dans le monde de l’autosuffisance et je ne suis pas autosuffisante : rien ne me suffit, si Tu n’es pas là avec moi. Je ne peux rien puiser en moi-même pour éprouver de la satisfaction et atteindre le bonheur. Certes, Tu as mis des dons en moi et j’éprouve de la satisfaction en m’appliquant à les développer, mais ma joie dans cela est de savoir que mes dons viennent de Toi, de m’exercer sous Ton regard et de le faire à Ta Gloire. Sinon, mes dons ne servent à rien et ma satisfaction n’est que momentanée.

Il n’y a que Toi qui puisses pallier à mes manques, à mes imperfections et à mes incohérences. Je ne suis pas un dieu. En vérité, chaque épreuve me montre combien je suis petite et perdue sans Toi. Mais avec Toi, je crois que je peux faire de grandes choses. Je sais que si Ton Esprit prend le gouvernail, Il pourra m’emmener plus loin que je n’ose imaginer, car Tu vois plus loin et plus haut que moi. Je sais que, si je Te fais entièrement confiance, Tu peux m’emmener loin, même seule, même dans ce monde trop grand, trop confus, trop sombre et trop angoissant.

Alors, entends ma voix ! Ne me laisse pas m’épuiser en vain ! Ne me laisse pas fondre comme un morceau de cire au soleil ! Réanime-moi ! Revivifie-moi ! Redonne-moi foi et courage pour que rien ne me paraisse impossible. Aide-moi à voir comme Tu vois de là-haut, de Ton Trône céleste où tu sièges au-dessus des hommes. Donne-moi la faculté de voir avec des yeux spirituels, dans cette civilisation basée sur les apparences, dans ce monde qui adore les images, dans cette modernité où les écrans s’élèvent sur un trône toujours plus haut ! Aide-moi à vivre, moi qui suis différente. Moi qui me méfie beaucoup du progrès et qui ne le perçois pas comme tel, parce que l’esprit qui se cache derrière la haute technologie est en inimitié avec Tes valeurs.

L’idolâtrie de l’informatique et de la robotique est un phénomène de masse qui s’amplifie dans les derniers temps. Aide-moi, Seigneur, à surmonter la solitude qui est le lot de ceux qui nagent à contre-courant. Mais la solitude n’est rien comparée à la discrimination destinée aux adeptes d’une vie authentique aux antipodes de la mondialisation. Aide-moi à m’y préparer, puisque l’avenir avant Ton grand retour sur terre n’apportera que le funeste déclin de la liberté.

Seigneur, Tu me connais. Tu sais combien j’aime Ta création et combien je souffre de ce qu’elle devient, quand l’homme entreprend de la détruire.

J’aime planter les graines des fruits que je mange. J’aime les regarder germer puis se transformer en arbre et en fleurs. J’aime prendre soin des plantes et des créatures vivantes, parce que Tu les as créés. Elles m’apportent plus de joie et de réconfort que tout ce que l’homme a fabriqué depuis des siècles.

Alors, je regarde autour de moi et je me demande : quand trouverai-je quelqu’un qui me soit semblable et qui profondément me comprenne ?

Si seulement je pouvais prier selon la touchante prière de François d’Assise, dans laquelle il ne cherchait pas à être compris, mais à comprendre et il ne demandait pas à être aimé, mais à aimer. Quelle abnégation merveilleuse ! Ne rien vouloir pour soi, vouloir tout simplement donner. Etre tourné vers son prochain et uniquement son prochain. Ne pas servir les autres par intérêt. Ne pas chercher de bénéfices, de récompenses, de compensations… Trouver tout son plaisir dans la Volonté de Dieu.

J’aimerais avoir ce fond réellement pur, mais malgré la purification qu’opère la Parole de Dieu en moi, je dois bien constater qu’aimer mon prochain m’est une tâche des plus difficiles. Et comprendre mon prochain est encore plus éloigné.

Je ne comprends pas les humains et parce que je ne les comprends pas, j’ai cette rage qui bouillonne en moi.

Comment, par exemple, peuvent-ils écouter cette musique qui n’est pas de la musique ! C’est du vacarme blasphématoire sans mélodie, sans émotion et sans intelligence ! Et pourtant ils l’écoutent fort sans jamais s’en lasser. Comment leur cerveau peut-il coopérer ? Et comment peuvent-ils vivre si salement, en considérant le sol comme une immense poubelle où l’on peut jeter n’importe quoi n’importe où ? Et comment peuvent-ils être dénués de compassion pour les créatures qui les entourent, au point de les laisser mourir ou de les écraser, comme si elles étaient inexistantes ? Et comment peuvent-ils « élever » leurs enfants dans l’absence totale de loi et de règle morale, en les laissant librement enfreindre le code de la civilité le plus rudimentaire ? Comment peuvent-ils les laisser saccager, voler, insulter ? Doit-on punir ces enfants quand ils ne font que reproduire ce que font leurs parents ? Comment les regarder vivre et comment les comprendre ?

Si seulement je me rappelais comment je vivais autrefois, avant que Ta Grâce vienne me trouver. Si je me rappelais comment je pensais et comment je ne pensais pas, j’arriverais peut-être à les comprendre. Mais celle que j’ai été il y a plus de douze ans n’est plus. Rien ne peut la faire réapparaître et son souvenir est de plus en plus flou. Je ne veux, ni ne peux déterrer les morts.

Tu as fait de moi une nouvelle créature. Tu as fait quelque chose de merveilleux à partir de rien. Alors, si je n’arrive plus à m’identifier à cette personne que je ne suis plus, je dois me rappeler que je n’étais rien et que Tu as fait de moi quelqu’un. Tu n’as pas fait cela pour que je manque de compassion envers mes semblables.

Seigneur, aide-moi à voir en eux le germe de ce qu’ils pourraient devenir. Et si je n’arrive pas à les comprendre, donne-moi de les aimer. Non pour la manière dont ils vivent, non pour le mal qu’ils font, mais pour ce qu’ils sont malgré tout : des êtres faits à Ton image. Des êtres égarés, comme moi je l’étais avant que Tu me trouves.

Finalement, Seigneur, j’ai pitié d’eux. Je les vois vivre et je sais que des esprits démoniaques se cachent dans leurs vêtements, dans leur maison et derrière leur attitude désinvolte. Au fond, ils ne sont pas heureux. Ils font semblant de l’être en riant fort, en chantant, en parlant avec beaucoup de fierté, mais, en vérité, je sais qu’ils ne sont reliés à la vie que par un fil. Et ce fil, c’est Toi qui le tiens, Seigneur. Tout dans leur vie est bancal. Ils sont obligés de se droguer et de boire pour supporter leur vie. Si rien ne change, leurs enfants se drogueront à leur tour. Ce que ces petits apprennent, c’est que tout est permis : de parler n’importe comment, de s’amuser à n’importe quel prix, de dormir avec des personnes différentes, homme ou femme, de vivre dans la dépravation et l’oisiveté. Seigneur, vas-Tu intervenir ? Me demandes-Tu d’intervenir ? Que puis-je faire toute seule, face à des êtres antipathiques et agressifs et face à tous leurs démons ?

Tu me dis de surmonter le mal par le bien, de ne pas donner prise au diable et de le fuir. Tu me dis de Te demander le secours et de l’attendre calmement. Tu me dis que tout concourt à mon bien, parce que Tu m’as appelé à Te suivre et à T’appartenir. Je sais donc que bientôt, Tu me placeras quelque part où je n’aurai plus à subir la vie bruyante et dissolue des impies. Tu m’offriras le calme dont j’ai besoin pour prier, travailler, créer, dormir et ouvrir ma porte à ceux et celles qui par Ta Grâce viendront chez moi.

Même si, pour l’instant, Ta délivrance n’est pas visible, c’est sur Toi que je m’appuie. Combien même on me dirait « Où est ton Dieu ? », je répondrais : « Il est avec moi ». Et si mon interlocuteur s’étonnait de ma réponse, déplorant que mon Dieu soit invisible et inaudible, s’il me demandait à quoi bon croire en un tel Dieu, je lui dirais que ce n’est pas une question d’intérêt, ni de profit, mais de vérité. Le fait est que ce Dieu existe et qu’Il m’a choisi pour Se révéler à moi, de manière à ce que je le proclame dans tout ce que je dis et dans tout ce que je fais.

On pourrait croire que je sers un Dieu bien étrange, mais je sais Seigneur que Tu n’es pas bizarre. C’est la mentalité de l’humanité qui devient de plus en plus bizarre. Toi, Tu es Saint. Tu es Lumière, tu es Amour. L’ombre et la crainte se trouvent dans l’homme, pas en Toi.

Si le vide m’habite, Toi Tu es Plénitude. Si j’ai la mort dans l’âme, Toi Tu es Vie. Si je suis incapable de m’exprimer, Toi Tu T’exprimes. Si je suis sourde, Toi Tu entends tout.

Ne pas t’entendre, c’est être sourd. C’est être coupé de la vie. C’est sans doute la grande souffrance qu’ont vécu Adam et Eve lorsque Tu les as chassés du jardin d’Eden, si, durant leur vie restante, Tu ne T’es plus adressé à eux. Cela a dû leur causer un énorme vide et une tristesse incommensurable. S’ils étaient habitués à entendre Ta voix, à avoir des conversations quotidiennes avec Toi, ils ont dû se retrouver soudain dans un silence angoissant et dans une solitude partagée…

Seigneur, parfois je me sens comme eux ont dû se sentir. J’ai eu autrefois le privilège de recevoir une manifestation surnaturelle de Toi : je jouissais de sentir sur moi Ton majestueux regard, de sentir Ta présence d’une manière si forte. C’était au-delà de la foi. Je n’avais pas besoin de croire en Toi, car Ta Présence était si manifeste que je ne pouvais la remettre en question.

Or, après toutes ces années, je me sens parfois coupée de Ta présence. Comme Adam et Eve qui gardaient le souvenir de leurs douces conversations avec Toi, je garde le souvenir d’avoir été ce petit enfant que tu tenais par la main en permanence. Je te parlais continuellement et Tu me répondais de mille manières. Je vivais dans une grâce indescriptible, comme la fille cadette d’un vieux roi, dont la vieillesse ne serait que tendresse et soins envers sa petite protégée. Où est passé ce temps-là ? Qu’est devenue cette grâce ?

Il m’arrive parfois de me sentir comme si cette petite princesse était enfermée dans le cachot du château, sous la garde d’un ennemi qui l’aurait capturée et qui aurait tué son père pour prendre sa place. Ce serait une situation sans issue pour elle, car, sans son père ni personne pour la délivrer, elle n’aurait plus aucun espoir ni pour elle, ni pour son peuple,  et elle se laisserait mourir.

Pourtant, Tu n’es pas mort et je n’ai pas changé de maître. J’ai tout simplement oublié qui je suis pour Toi. J’oublie que, malgré le temps qui passe et les changements qu’il opère, je reste à Tes yeux le même enfant que Tu as adopté jadis. Je voudrais ressentir la même chose qu’autrefois, la même tendresse paternelle, Ta présence, Ta main dans la mienne.

Je ne veux pas être au centre de mes préoccupations, je veux être au centre des tiennes, au centre de Ton affection.

Si je suis au centre de moi-même, ce sont ma tristesse et ma solitude qui sont au centre, et mes épreuves m’aspirent comme le sable mouvant. Si je suis au centre pour moi-même, je me noie dans l’égocentrisme ambiant et je deviens un avec les ténèbres du monde.

Mais si je suis au centre de Ton cœur, je ne m’inquiète plus de moi. Au cœur de Ton affection profonde, je me réfugie dans la sécurité d’exister pour Toi, d’être aimée de Toi et je me tourne vers des pensées agréables, car Ta tendresse balaye la tristesse et la peur.

Mais l’égo, farouche ennemi, lutte pour se placer toujours au centre, et encore davantage dans les temps de la fin.

Ainsi je te prie, Seigneur, de détrôner cet égo et de me donner la grâce de sentir à nouveau Ta Présence, de chanter Ton Nom sublime et d’agréer mes prières, même si elles sont parfois longues et qu’elles pèsent lourd dans mon cœur. Offres-moi le privilège qu’Adam et Eve ont perdu. Je souhaite vivre avec Toi, par Toi et pour Toi.

Je t’aime, plus que j’aime la vie, plus que j’aime Ta création, plus que les êtres qui me sont chers. Je t’aime plus que j’aime le soleil et la lumière des astres dans la nuit. Je t’aime plus que tout ce qui me fait vivre. Je t’aime parce que c’est Toi qui m’as aimée le premier. »

Que ma prière soit une bénédiction pour tous ceux et celles qui, dans les temps que nous vivons, luttent pour ne pas chanceler et se questionnent sur les déserts et les silences, les injustices et les difficultés à vivre dans un empire qui n’est pas le nôtre, ici-bas dans ce monde auquel nous n’appartenons pas.

Soyez bénis,

Anne-Gaëlle

« Il n’y a que parjures et mensonges ; meurtres, vols et adultères ; on use de violence et un meurtre touche l’autre » (Osée 4:2).

« Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent ; faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous outragent et qui vous persécutent » (Mattieu 5:44).

« Voici, la main de l’Eternel n’est pas trop courte pour délivrer, ni son oreille trop pesante pour entendre » (Esaie 59 ; 1)

 




T.036 – La souffrance

Elle est inévitable. Parfois immense et imposante, souvent profonde et silencieuse. Générée par notre condition terrestre, nos épreuves et expériences traumatisantes. Dès notre premier souffle, nous apprenons à la connaître. Toute notre vie, elle nous accompagne.

Notre instinct, c’est de la fuir. Et la volonté divine, c’est de l’apprivoiser ; apprendre d’elle, la laisser être notre alliée sur le chemin étroit que nous devons suivre. C’est elle qui peut nous ouvrir les portes vers la véritable sagesse. C’est à travers elle que nous grandissons : non en terme de gloire, mais en purification intérieure.

« Je suis crucifié avec Christ, et si je vis, ce n’est plus moi, mais c’est Christ qui vit en moi ; et si je vis encore dans la chair, je vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé, et qui s’est donné lui-même pour moi » (Galates 2:20).

« Ceux qui appartiennent à Christ ont crucifié la chair avec ses passions et ses convoitises » (Galates 5:24).

Et pourtant, parce que son visage fait peur, l’humanité la repousse, la chasse par beaucoup de subterfuges. Le plaisir, les divertissements, la drogue, l’ambition, l’exaltation du soi… Il y a mille manières de contourner la souffrance, mais aucune pour la faire disparaître. Quand on arrive à la faire taire, ce n’est jamais définitif, car la souffrance est la fatalité de l’homme pécheur, et elle fait partie de l’alliance des rachetés.

« Quiconque ne porte pas sa croix, et ne me suit pas, ne peut être mon disciple » (Luc 14:27).

Si le Maître a souffert, s’Il a pris sur Lui tous les maux de la terre, ce n’est pas pour que nous soyons exempts de douleurs. C’est une erreur monumentale que de croire en un évangile de prospérité et cette croyance a fait dérailler une quantité considérable de chrétiens hors du chemin étroit de Dieu. Au contraire, Jésus-Christ a bravé la pire des souffrances pour être notre modèle, notre courage et notre consolation.

« Mais si vous supportez patiemment la souffrance pour avoir bien fait, c’est à cela que Dieu prend plaisir. Car c’est à cela que vous êtes appelés, puisque Christ aussi a souffert pour vous, vous laissant un exemple, afin que vous suiviez ses traces » (1 Pierre 2:20-21).

Il a souffert et nous montre en cela Sa disposition de cœur, Son obéissance et Sa grande connaissance de la condition humaine : ces vertus que nous avons besoin d’acquérir. Il nous montre, au travers de Son parcours semé d’embuches, Sa profonde sensibilité. Puisqu’Il a Lui-même souffert injustement accusations et trahisons, nous pouvons être sûrs qu’Il est sensible à nos injustices.

Le fait de souffrir nous rend – si nous marchons avec Lui – plus sensibles et plus compatissants. Mais si nous sommes étrangers à la souffrance, comment comprendre celui qui souffre ?

Nous savons que notre Seigneur est sensible à notre souffrance – qu’elle soit visible ou non – et qu’Il est miséricordieux. Mais souvent, dans les moments les plus sombres et malgré nos supplications, Sa grâce seule doit nous suffire. Pourquoi ? Parce que l’enjeu de notre souffrance n’est pas seulement notre foi, mais également le chemin de purification par lequel elle nous fait passer.

Dans tout ce qui encombre notre cœur, il y a des habitudes à perdre, une perception à modifier, des péchés à confesser et la nature du Christ à revêtir. Tout cela ne peut se faire que par un chemin de souffrance. La souffrance nous rend petit, elle nous ouvre les yeux sur notre fragilité, notre désespoir et notre besoin de salut.

« Ma grâce te suffit ; car ma force s’accomplit dans la faiblesse » (2 Corinthiens 12:9).

Un Dieu qui permet la souffrance est un sujet de discorde pour l’humanité. L’instinct de l’Homme est de chercher le bonheur et principalement le bonheur immédiat. Cet instinct est en inimitié avec Dieu. La majorité de l’humanité se détache donc du chemin étroit qu’elle devrait (et devra) parcourir pour se ruer sur la voie spacieuse, mais personne ne peut se soustraire aux épreuves qui font partie de la vie. Ces épreuves et les douleurs qu’elles causent arriveront tôt ou tard, alors mieux vaut-il apprendre à y faire face dès que possible, afin d’y puiser les richesses invisibles que le Seigneur souhaite nous voir acquérir. Ces richesses ne se cueillent pas sur l’arbre de l’aisance et de la bonhommie.

« Entrez par la porte étroite ; car large est la porte et spacieuse est la voie qui mènent à la perdition, et il y en a beaucoup qui y entrent. Car étroite est la porte et resserrée la voie qui mènent à la vie, et il y en a peu qui la trouvent » (Matthieu 7:13-14).

Pourquoi envier ceux et celles qui jouissent d’une vie comblée de biens ? Pourquoi décréter que ces personnes « bénies » par le système réussissent leur vie ?

La véritable bénédiction est celle qui provient de Dieu. La véritable richesse découle de la purification d’un cœur contrit et humilié, et de l’apprentissage à l’Ecole de Dieu. La véritable réussite dépend de ce que nous faisons de notre souffrance : l’ignorer, la compenser, la fuir, la laisser nous endurcir ou bien l’accepter pleinement pour la laisser nous modeler à l’image du Christ, selon la volonté de Son Esprit-Saint.

« Par la foi, Moïse devenu grand, refusa d’être appelé fils de la fille de Pharaon ; choisissant d’être maltraité avec le peuple de Dieu, plutôt que d’avoir pour un temps la jouissance du péché ; estimant l’opprobre de Christ comme un trésor plus grand que les trésors de l’Egypte, parce qu’il avait en vue la rémunération » (Hébreux 11:24-26).

Quand je perçois ma souffrance comme mon alliée dans mon périple de purification intérieure, comme moyen choisi par Dieu pour aboutir à la sanctification, et comme autel de rencontre privilégiée avec mon Seigneur, je ne cherche plus à la fuir. Elle ne me paraît plus effrayante.

« Nous nous glorifions même dans les afflictions, sachant que l’affliction produit la patience, et la patience la vertu éprouvée, et la vertu éprouvée l’espérance » (Romains 5:3-4).

Certes, cette souffrance, que je traîne en moi depuis mon enfance et que la vie a nourrie depuis, est trop lourde à porter. Mais le Christ me dit de la Lui donner, tel un seau d’eau qui serait beaucoup trop lourd, et de la partager avec Lui. Ce n’est qu’ainsi que le fardeau devient supportable.

« Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous soulagerai. Chargez-vous de mon joug, et apprenez de moi, parce que je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos de vos âmes ; car mon joug est aisé, et mon fardeau léger » (Matthieu 11:28-30).

Comment viendrais-je à Lui, s’il n’y avait pas cette souffrance ? Ma prière ne serait pas si authentique, aussi profonde et si pressante. Je ne brûlerais pas de venir à Lui. Or, Il est mon Maître ; je veux qu’Il m’enseigne à faire face à ma douleur, à la maîtriser et à la transformer par Sa grâce en sujet de joie.

« Mon âme languit, même elle se consume après les parvis de l’Éternel ; mon cœur et ma chair crient vers le Dieu vivant » (Psaume 84:3).

« Heureux l’homme dont la force est en toi, ceux qui aiment les chemins de ta maison ! Passant par la vallée de Baca (des larmes), ils en font une source vive, et la pluie d’automne la couvre de biens » (Psaume 84:6-7).

Plus je souffre de la condition de cette terre où j’habite et plus je sais que je Lui appartiens. Car là est la nature de ma souffrance présente : la terre est plongée dans le noir, la terre est privée de la Vérité. La terre est privée de la Gloire de Dieu. Et ma vie est cachée en Christ. Le présent est caché ; tout est à venir. Je suis prisonnière du temps, prisonnière des mœurs, de l’impiété et de la vilénie de ce monde.

Ma seule liberté est dans la foi en la Parole de Dieu, en Ses promesses. Cette liberté se traduit concrètement par un isolement, des prières incessantes et l’acceptation de Sa souveraine Volonté, qui s’accomplit dans la souffrance parce que c’est mon chemin en temps que disciple du Christ. Une liberté bien différente de celle que nous présente le monde !

Le monde nous dit : « Tu ne vis qu’une fois, choisis entre la souffrance et l’amusement ! » Mais Dieu nous dit : « Accepte tes peines car tu seras consolé. Ne recherche pas les biens de ce monde, car sinon il n’en restera plus d’autres pour toi dans le royaume à venir ».

« Mon fils, souviens-toi que tu as eu tes biens pendant ta vie, et que Lazare y a eu des maux ; maintenant il est consolé, et toi tu es dans les tourments » (Luc 16:25).

Si j’ai fait vœux de pauvreté, je dois m’y tenir.

Si j’ai fait vœux de chasteté, je dois m’y tenir.

Si j’ai fait vœux de sobriété, je dois m’y tenir.

Si j’ai fait vœux de découvrir la Vérité et de la préférer au mensonge, je dois m’y tenir.

Si j’ai fait vœux de sortir de Babylone, je ne dois pas y retourner.

Si j’ai fait vœux de rechercher la Sagesse de Dieu, de la vénérer et de la préférer à tous les trésors de la terre, je dois m’y tenir.

Si au travers des vœux que j’ai fait pour Dieu, j’ai changé et je me retrouve seule, en marge du monde, je dois tenir bon.

Si mes amis m’abandonnent, si la seule présence amicale est celle du Christ que je ne vois pas, Sa grâce doit me suffire.

Si je suis faible et malade, je dois accepter que mes forces m’abandonnent, car ainsi viendra en moi la force de Dieu, qui ne vient qu’après la capitulation de mon orgueil.

« Je me glorifierai donc plus volontiers dans mes infirmités, afin que la force de Christ habite en moi » (2 Corinthiens 12:9).

J’ai le droit d’être triste. J’ai le droit de pleurer et d’être en colère contre le monde et le système. Mais si j’accepte ma souffrance, mon mal n’est pas sans issue. Je peux l’apporter à Dieu sur Son autel, au pied de la Croix, et ma colère s’adoucira. Peu à peu, elle se changera en compassion. Mes bourreaux ne m’apparaîtront plus comme tels ; ils éveilleront en moi de la pitié. Si j’apporte ma souffrance à Dieu, elle n’évoluera pas en rébellion.

Accepter sa souffrance, en la partageant avec Jésus, c’est être en paix. Cela ne met pas un terme à la douleur ressentie, mais ainsi la blessure peut être pansée avec le bandage de l’Amour divin, vécu au travers de l’épreuve.

Le but suprême est de nous dépouiller de notre égoïsme, de notre vanité et de nos mensonges afin de grandir dans l’Amour : être capable d’aimer et de pardonner à l’image de notre Dieu miséricordieux. Comment atteindre notre but si, au lieu de nous dépouiller de nous-mêmes, nous nous dépouillons de notre souffrance ? Comment grandir si nous refusons les leçons de Dieu ?

« Quiconque parmi vous ne renonce pas à tout ce qu’il a, ne peut être mon disciple » (Luc 14:33).

Tout un chacun devra apprendre les leçons de Dieu. Il ne faut pas envier ceux qui commencent leur apprentissage plus tard puisqu’ils n’en seront pas dispensés. Au contraire, quand une personne n’a jamais appris à accepter de souffrir, le jour venu il lui sera impossible de supporter et de comprendre.

De nos jours, les caprices des enfants ne sont plus perçus comme tels : les parents cherchant la facilité donnent de plus en plus souvent à leurs petits une satisfaction immédiate. Ainsi, la moindre frustration devient pour eux insupportable et intolérable. L’égocentrisme s’en trouve décuplé. Les enfants deviennent des tyrans qui viennent à bout de leurs parents et c’est trop tard pour retourner en arrière, car la leçon primordiale n’a pas été apprise. La société se dégrade.

Autrefois, dans les temps difficiles, la population savait que vivre, c’est savoir souffrir. On le savait dès le plus jeune âge, car, dès la jeunesse, il y avait des contraintes et on les acceptait. Il fallait se frayer un chemin. La vie ne consistait pas à rechercher constamment le bien-être.

Mais l’être humain, qui se veut dieu lui-même, a décrété être au-dessus de la vie, et être sur terre non pour devenir sage, mais pour explorer son propre potentiel. Potentiel de bonheur, potentiel à faire le bien, potentiel d’autosuffisance… Que de leurres et de mensonges !

« Heureux ceux qui ont le cœur pur, car ils verront Dieu » (Matthieu 5:8).

Jésus dit que les personnes heureuses sont celles qui ont le cœur pur, celles qui jouiront un jour de voir Dieu. Mon cœur n’est pur que dans la mesure où je Le laisse le purifier : en acceptant la situation dans laquelle je me trouve, non pas dans un esprit de fatalisme, ni de « je-m’en-foutisme », mais dans un esprit d’unité avec Dieu, comprenant que là où je me trouve, si je m’agenouille devant Lui, je suis au cœur de Sa Volonté. Quelque soit la situation ou l’endroit, Dieu a permis que j’y atterrisse pour m’y rencontrer et pour que, dans un dialogue sincère avec Lui, j’apprenne de mes erreurs.

« Mon fils, ne rejette point la correction de l’Eternel, et ne perds pas courage de ce qu’il te reprend ; car l’Eternel châtie celui qu’il aime, comme un père l’enfant qu’il chérit » (Proverbes 3:11-12).

Jésus-Christ a été brisé. Pourquoi refuser d’être brisée moi aussi ? Est-ce une question d’orgueil ? Ou bien est-ce parce que l’on m’a enseigné qu’en temps que chrétien, il faut toujours être fort, joyeux, lumineux ? Mais ce qui brille dans le monde ne brille pas forcément selon Dieu.

J’ai été à un rassemblement de chrétiens qui ont loué le Seigneur ouvertement dans la rue, manifestant beaucoup de joie par des danses, des chants, des acclamations… Ils attiraient les regards des passants. Ils étaient déguisés en Israélites, avec des costumes magnifiques : de longues tuniques, des foulards, des voiles, des ceintures avec des bijoux et des rubans. On se croyait presque en Israël, du temps de Jésus. Mais tous ces artifices ont-ils vraiment honoré Dieu ?

Le concert était édifiant, car, bien sûr, les chants étaient inspirés ; je ne remets pas en doute l’adoration des chanteurs et danseurs qui s’agitaient avec passion. Mais un lieu d’adoration est-il une « discothèque spirituelle » ?

Chacun dansait et je cherchais l’amour du Christ. Il y avait des costumes, des danses, des micros et même un âne terrorisé, mais personne avec qui partager ma foi solitaire. Je n’ai pas senti l’unité. J’ai vu des personnes qui se cachent derrière leur parure et croient qu’Israël est un lieu saint dans lequel on peut puiser des bénédictions en ramenant des vêtements et des objets, ou en se faisant baptiser dans le Jourdain.

« Car en Jésus-Christ ce qui est efficace ce n’est ni la circoncision, ni l’incirconcision, mais la foi agissant par la charité » (Galates 5:6).

Et j’ai entendu des propos disant que si la joie nous fait défaut, nous ne sommes pas animés par l’Esprit de Dieu et Jésus ne vit pas en nous. Mais quand on lit les psaumes, on se rend compte que la tristesse et la douleur qui revient sans cesse sont celles d’un enfant de Dieu qui cherche à se décharger de sa peine en cherchant refuge auprès du Très-Haut.

Je sais que ma souffrance honore Dieu, parce qu’elle est vraie, authentique et incommensurable. Parce qu’elle me dépasse et me rend la vie impossible sans Lui. Parce que je la partage avec Lui dans une intimité que je n’ai avec personne d’autre. Ma souffrance n’a pas besoin d’artifice ; elle est directement reliée à ma foi. Plus je souffre et plus je m’approche de mon Sauveur, plus je prononce Son Nom salvateur. Quand ma vie ne tient qu’à un fil, je dépends entièrement de mon Créateur. Quand je suis fragile, je m’en remets entièrement à mon Rédempteur. C’est ainsi que cette parole se confirme : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? » (Romains 8:31).

Cette parole a quelque fois été mal interprétée : certains croient lire ici une promesse, comme quoi le chrétien étant dans le camp de Dieu ne peut avoir d’ennemis, c’est faux. Au contraire, on commence à avoir un bon nombre d’ennemis quand on répond à l’appel de Dieu. Mais dans ma situation de fragilité – moi qui suis enfant de Dieu et qui me soumets à Sa volonté dans les circonstances présentes – personne ne peut émettre de jugement qui me condamne. Dieu, qui connaît mon cœur et ce que je traverse, ne permet pas qu’un jugement soit prononcé contre moi. Si calomnie il y a, Dieu ne laissera pas cela impuni, ni sans correction. Un jour, Il mettra ma vie en lumière et le monde saura que, malgré ma fragilité, j’ai laissé Dieu être mon Maître, je L’ai suivi au prix de la souffrance.

« Heureux ceux qui sont dans l’affliction car ils seront consolés » (Matthieu 5:4).

Quand un homme est aveugle de naissance et qu’on lui propose de voir, il réfléchit avant de répondre, car voir, c’est accepter de percevoir tout ce qui se trouve aux alentours, y compris ce qui est hideux, effrayant et ce qui éblouit.

Accéder, par la grâce de Dieu, à la Vérité, c’est voir avec des yeux tout neufs. Voir un monde en décomposition. Un monde de violence, de mensonges et de perversité. Il est normal de souhaiter parfois redevenir aveugle, car c’était plus confortable ; quoique ceux à qui Dieu a accordé la vue ne se sont jamais vraiment sentis à l’aise dans ce monde, source de questionnement et d’incertitudes. C’était donc commode d’être dans l’ignorance pour un moment, mais Dieu, dans Sa grâce, pousse Ses élus à désirer ardemment retrouver la vue. Et comme toujours, un don extraordinaire va de pair avec souffrance et difficultés.

On dit que les enfants surdoués souffrent beaucoup et que certains d’entre eux maudissent le génie qui loge dans leur petit cerveau, parce que le don qu’ils ont reçu – cette intelligence bien au-dessus de la moyenne – les plonge dans un mal-être profond vis-à-vis de leurs congénères, et dans une grande solitude. « Pourquoi moi ? » se disent-ils, tandis qu’au fond d’eux-mêmes, ils aspirent à la normalité.

Sur le plan spirituel, puisque nous sommes animés de l’Esprit de Dieu dans un monde aveugle et malade, et puisque, selon Son Esprit et la Sagesse qu’Il nous donne, nous avons une sensibilité surnaturelle, nous sommes en quelque sorte « les surdoués de Dieu ». Et comme des enfants à part, nous en souffrons.

« Mais vous, vous êtes la race élue, la sacrificature royale, la nation sainte, le peuple acquis, pour annoncer les vertus de celui qui vous a appelés des ténèbres à sa merveilleuse lumière » (1 Pierre 2:9).

La norme de ce monde, c’est le péché. Nous, élus de Dieu, aspirons à la norme divine, qui est la pureté du cœur : la Charité dans toute sa puissance et sa simplicité, selon la description que nous fait l’apôtre Paul, dans 1 Corinthiens 13. Voilà la déchirure.

Dieu connaît notre déchirure. Et grâce aux souffrances du Christ, Dieu a déchiré le voile qui nous séparait de Lui, afin que nous puissions joindre nos souffrances aux Siennes et que nous ayons accès à Sa Miséricorde en tout temps, ainsi qu’à Son divin secours. Ce que je n’arrive pas à porter, je le Lui donne. Chaque jour, je me décharge sur Lui.

« Ayant donc, frères, la liberté d’entrer dans le sanctuaire, par le sang de Jésus, chemin nouveau et vivant, qu’il nous a consacré à travers le voile, c’est-à-dire à travers sa chair ; et ayant un grand Sacrificateur établi sur la maison de Dieu ; approchons-nous avec un cœur sincère, dans une pleine certitude de foi, ayant les cœurs purifiés des souillures d’une mauvaise conscience, et le corps lavé d’une eau pure » (Hébreux 10:19-22).

Bientôt, très bientôt, Il viendra sécher nos larmes et Il donnera à chacun son salaire, selon le cheminement de foi, de purification et d’obéissance. Personne sinon Dieu ne peut savoir qui sera récompensé et comment. Personne sinon Lui ne connaît la vie des autres. Certains semblent avoir une vie facile et n’en ont pas. Certains semblent faire des efforts et n’en font pas. Certains peinent à avancer et se rabaissent selon leur propre jugement, alors qu’il est facile de se tromper puisque seul Dieu peut émettre un juste jugement sur une vie, Lui qui peut-être donnera à ceux qui se disent faibles louange et honneur, lorsqu’Il reviendra.

« En cela vous vous réjouissez, quoique vous soyez maintenant attristés pour un peu de temps par diverses épreuves, puisqu’il le faut, afin que l’épreuve de votre foi, plus précieuse que l’or périssable, qui pourtant est éprouvée par le feu, vous tourne à la louange, à l’honneur et à la gloire, lors de l’avènement de Jésus-Christ » (1 Pierre 1:6-7).

Beaucoup de souffrances sont cachées. Beaucoup de personnes cachent en eux les marques de la maltraitance dont ils ont été victime, parce qu’en cachant cela, ils pensent minimiser leur douleur et l’oublier. Un jour, tout sera mis en lumière : le mal qui a été fait, l’injustice, le déshonneur. Ce ne sera plus la victime qui rougira de honte, mais le coupable. N’attendons pas ce jour pour apporter notre mal-être à Dieu. Ensemble avec Lui, il convient de chercher le chemin de l’acceptation et du pardon.

« Heureux les miséricordieux car ils obtiendront miséricorde » (Matthieu 5:7).

Là réside la seule véritable liberté : ne plus être esclave de sa souffrance et ne plus en avoir peur, mais l’avoir comme alliée. Ainsi, nous découvrirons qu’il est possible de souffrir et d’éprouver simultanément de la joie, ce que le monde ne peut concevoir.

Soyez bénis,

Anne-Gaëlle

« Voici, nous regardons comme heureux ceux qui ont souffert avec constance ; vous avez entendu parler de la constance de Job, et vous connaissez la fin que le Seigneur lui accorda ; car le Seigneur est plein de miséricorde et de compassion » (Jacques 5:11).

« Heureux est l’homme qui endure la tentation ; car après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie que le Seigneur a promise à ceux qui l’aiment » (Jacques 1:12).

 




T.035 – Un état des lieux honnête

« Cieux, écoutez ; terre, prête l’oreille, car l’Eternel parle… »

Du haut de Son trône, plus élevé que le ciel étoilé, le Créateur de l’univers ouvre la bouche pour S’adresser à toute Sa création. Sa voix résonne avec autorité, elle sort de l’antre de l’infini, jaillit au travers de certains hommes que le Tout-puissant a choisis parmi des milliers et parcourt la terre en vue d’atteindre les oreilles et les cœurs. Les prophètes parlent, mais on ne les écoute guère.

Et la Bible, témoignage immortel, comme une bouche vivante, vient parler à son tour. Elle ne crie pas sur les toits comme l’ont fait les prophètes, puisque ce temps est révolu. Mais elle vient chuchoter à l’oreille des humains, discrètement, en secret. Elle parle doucement, mais clairement, à ceux qui cherchent la Vérité. A ceux qui s’interrogent sur le pourquoi de leur existence, sur le motif de la fatalité qui s’acharne contre eux. Sur la raison de leurs difficultés et du silence de ce Dieu invisible et énigmatique. L’Eternel, par Sa Parole, vient donner et redonner Son message…

« J’ai nourri des enfants, et je les ai élevés… »

Mon âme, as-tu souvenir du jour où Dieu l’Eternel est devenu ton Père ? As-tu réminiscence de tout ce qu’Il a fait pour toi ? As-tu compté le nombre de jours où Il t’a nourri ? As-tu pensé réellement combien ta nourriture a été une grâce, un bienfait, un réconfort ? As-tu pris conscience de la parfaite paternité de ce Dieu, qui t’a nourri, aussi bien sur le plan physique que par Sa Parole pleine d’Amour et de Vérité ? Oui, le Seigneur nourrit Ses enfants. Libre à eux de prendre ou de laisser la nourriture. Cette nourriture, Il la leur a donnée.

Mon cœur, toi qui te plains sans cesse, pourquoi penses-tu si souvent que tu es livré à toi-même ? Depuis combien d’années l’Eternel Dieu t’a-t-Il pris sous Sa tutelle ? Depuis quand est-il ton Instituteur ? N’y a-t-il personne qui t’enseigne et t’indique la voie ? Dieu S’est proposé d’être ton éducateur, Il a donné Ses instructions. Il a exhorté, averti, châtié et il continue de le faire, comme un Père envers Ses enfants. Comment pourrait-Il Se prétendre Père s’Il ne le faisait pas ?

Le Seigneur a élevé Ses enfants depuis l’aube de la création, depuis le jardin d’Eden. Depuis qu’Il eut créé un fils, qu’il appela Adam, et une fille, qu’Il appela Eve. Tels furent Ses premiers enfants. Il les a nourris et Il les a élevés au milieu de la beauté qu’Il avait créée pour eux. Il a eu d’autres enfants depuis, des milliers d’enfants de toutes races, de toutes provenances, des quatre coins de la terre. Des milliers d’enfants inscrits dans le livret de famille de Dieu, par la vertu du cachet officiel de la foi en Jésus-Christ, l’unique et véritable Messie.

Le Père a nourri Ses enfants avec le meilleur pain, celui issu du Ciel, qui donne la vie. Il les a abreuvés avec la meilleure eau, celle qui renouvelle la pensée et donne l’intelligence, l’eau vive de Son Esprit. Et Il les a élevés : comme un père aimant élève ses enfants. Il les a élevés : du statut d’esclave au rang d’héritier. Il les a élevés au-dessus de leur condition de brebis errantes et pauvres.

« Mais ils se sont rebellés contre moi. Le bœuf connaît son possesseur, et l’âne la crèche de son maître : Israël n’a point de connaissance, mon peuple n’a point d’intelligence. »

La rébellion, terrible maladie. Terrible fléau. C’est cette maladie qui fit de Lucifer, l’ange porteur de lumière, une créature ténébreuse et un instrument du néant. C’est ce fléau qui détruisit la terre lorsque la guerre éclata dans le ciel, la guerre entre les anges rebelles et les anges fidèles à Dieu. La guerre entre le bien et le mal, entre la voix du mensonge et celle de la Vérité. La terre était devenue informe et vide, le néant l’avait emporté. Mais Dieu, Créateur de la vie, recréa la vie. Il créa un Eden à l’image de Son Royaume. Un Eden où poussaient les fleurs et les fruits, mais aucun chardon, aucune ronce. Un Eden habité par des animaux magnifiques, tous paisibles et bienveillants. Dieu ne pouvait pas créer de créatures malveillantes. Dieu n’est pas malveillant. Cet Eden qu’Il S’était créé ne connaissait ni violence, ni effluve de sang. Les animaux étaient là pour glorifier leur Créateur. Personne n’avait idée de leur faire du mal, ni de les sacrifier. La nourriture ne faisait pas défaut. La température était agréable, il n’y avait pas d’intempérie. Les premiers enfants de Dieu étaient nus, ils n’avaient besoin de se protéger de rien et ils n’avaient rien à cacher. Tout était parfait.

Les animaux, quelque soit leur rang dans la création, sont des créatures honorables. Ils sont cités en exemple, à la honte de l’humanité qui se croit de beaucoup supérieure et qui n’est pas capable de régner sur eux de manière douce et équitable. Les animaux connaissent leur maître, ils ne vont pas chercher ailleurs. Même les bêtes qui souffrent de la cruauté de leur possesseur sont capables de leur rester fidèles, alors qu’elles auraient raison de fuir pour chercher un meilleur maître. Mais l’humanité, qui pourrait avoir comme maître Dieu — le Créateur de la vie, l’Inventeur de l’Amour — est coupable de la plus grave des infidélités. Elle accorde à des idoles le divin pouvoir et s’y réfugie aveuglément, sans penser une seconde combien son choix est absurde et sa croyance irraisonnée. Elle confond création et Créateur, et adore n’importe comment, n’importe quoi. Les animaux, en termes de fidélité, semblent supérieurs, même à ceux qui se proclament enfants de Dieu.

Quel enfant n’aime son père que le dimanche ou le samedi ? Quel enfant prend des mains de son père le cadeau qu’il lui donne, pour le laisser fermé et le ranger dans le grenier, sans jamais le déballer ni en avoir l’utilité ? Quel enfant dit à son père « je t’aime » pour le trahir ensuite, en faisant exactement le contraire de ce qu’il lui a commandé ? Quel enfant remercie son père du bout des lèvres, mais se plaint et l’accuse par derrière, en parole, en acte et en pensée ? Quel enfant s’allie avec le pire ennemi de son père, malgré ses avertissements et tout le mal que cet ennemi a causé à ce dernier ? Quel enfant change de père, en lui préférant son ennemi ? Peut-on encore l’appeler « fils » ?

Un animal n’est pas un fils, mais il ne fait pas tout cela. Un animal — parce qu’il vit pleinement sa vie d’animal dans la condition que Dieu lui a choisi, sans s’élever au-dessus — adore son Créateur en Lui rendant gloire, même inconsciemment.

Toutes les mauvaises actions et les mauvaises paroles découlent d’un manque de connaissance et d’un manque de foi, non pas en la capacité de l’être humain, mais en Dieu, comme Père Tout-puissant et Source de Vérité absolue.

De tous les animaux, qui peuvent s’avérer simples et fidèles, il en est un qui est fourbe et rusé par-dessus tout. Malhonnête et pernicieux, il vient se faufiler dans l’humanité et rampe sans faire de bruit. Il a observé les humains et a trouvé les failles. Il vient proposer des vérités mensongères et des solutions utopiques, il offre des placébos et des chimères. Il extirpe peu à peu de l’humanité ce qui la rendait belle, comme il retira la beauté de la nudité des premiers humains en Eden, lorsqu’il fallut soudain confectionner de grotesques habits en fourrure au prix de la vie des animaux innocents. Adam et Eve ont-ils pleuré lors du tout premier sacrifice ? Peut-être ont-ils trouvé la dépouille de leurs protégés, peut-être l’ont-ils enterrée tristement en se promettant de ne plus jamais commettre le mal. Mais une fois chassés d’Eden, ils eurent faim. Il n’y avait plus autour d’eux l’abondance qu’il y avait dans le jardin magnifique que Dieu leur avait aménagé. Leur cœur s’endurcit. Prêtant foi au serpent, ils avaient choisi de devenir des dieux et à partir de ce moment, il se passa le contraire de ce que le menteur leur avait prédit : la connaissance devint de plus en plus rare sur la terre, ainsi que l’intelligence.

On construisit des tours, des citadelles, des nations. On inventa toutes sortes de choses. Alors, l’humanité prit l’envol d’une fusée vers l’inconnu. La connaissance de Dieu et la véritable sagesse se firent de plus en plus rares. Des religions se créèrent, toutes plus ou moins contradictoires et incertaines. Puis la science érigea son trône, comme la reine Certitude, mais elle changea constamment de visage, ne pouvant apporter aucune constance ni sécurité aux humains. Et même parmi les enfants de Dieu, le serpent ancien s’infiltra pour imposer sa marque, sans même qu’ils puissent s’en apercevoir. Les chrétiens se mirent à adorer la science. Les chrétiens se mirent à adorer l’argent et le prestige. Ils prirent l’habitude de puiser davantage dans les ressources humaines que dans les ressources de Dieu. Ils recherchèrent de plus en plus la sécurité dans le confort, au lieu de la chercher dans la Vérité.

Mon âme, ne comprends-tu donc pas que tout ce qui te freine, ce qui t’entrave, ce qui te fait souffrir est dû au manque de connaissance ? Pourquoi ne recherches-tu pas l’intelligence de Dieu, que Son Esprit et Sa Parole peuvent te procurer et développer en toi ? Pourquoi recherches-tu en permanence des solutions terrestres à tes problèmes terrestres ? Jusqu’à quand continueras-tu d’ignorer la cause du mal qui te ronge ?

« Ah ! Nations pécheresses ! Peuple chargé d’iniquités ! Race de méchants ! Enfants corrompus ! Ils ont abandonné l’Eternel, ils ont méprisé le Saint d’Israël, ils se sont détourné par derrière. »

Quelle souffrance que celle d’un Père qui a tout fait pour Ses enfants, qui a tout sacrifié, jusqu’à Sa vie et Sa sainteté… Quitter Son incomparable Royaume, Son trône magnifique, la compagnie du conseil des chérubins et des séraphins. Quitter la perfection, la quiétude, la transparence de la mer de cristal pour se plonger dans les eaux troubles et polluées de la vie sur terre, hors d’Eden. Quitter la Sainteté et l’excellence de la pureté pour se retrouver sur une terre profane et hostile, au milieu de nations païennes et de complots sournois. Renoncer à Son rang, à Sa divinité pour enfiler la tunique d’un simple homme, une tunique salie par les contraintes de la vie terrestre. Une tunique maculée de sang, du sang de Son propre sacrifice… Et tout cela, fut-ce-t-il annoncé ou accompli, a-t-il eu un réel impact dans le cœur des hommes ? Dans le cœur d’Israël ? Dans le cœur des enfants de Dieu ?

Les humains font des alliances qui ne durent pas. Celle que Dieu a proposée est une alliance qui ne finit pas. Elle n’a comme frontières que l’orgueil et la désobéissance des hommes. Cette alliance est sainte, mais qui la considère comme telle ? Qui prend soin d’elle comme de sa propre vie ? Qui considère sa valeur de manière concrète, quelles que soient les conditions présentes, sans les laisser prévaloir sur elle ? Qui adore Dieu sept fois par jour ? Qui se lève la nuit pour L’adorer ? Pas même moi qui écris ces lignes. A mes yeux, je suis un traître, un traître de cette alliance. Le regard des saints anges est rivé sur moi et, tandis qu’ils rapportent fidèlement à Dieu tout ce que je fais et tout ce que je dis, j’oublie leur regard. J’oublie le regard de Dieu. J’oublie qu’Il est mon Père. Je me mets en colère. Je parle comme s’Il n’était plus là. J’agis comme si j’étais livrée à moi-même. Je me lamente. Je laisse le serpent me dire beaucoup de choses. Je les écoute, plutôt que d’écouter Dieu. Je suis comme Eve. Je n’ai pas le droit de lui en vouloir pour ce qu’elle a fait, car à sa place, j’aurais certainement fait pareil.

Chaque jour, une voix se fait entendre pour nous dire « Ils ont abandonné l’Eternel. Ils ont méprisé le Saint d’Israël ». Chaque jour, le nom de Dieu est profané. Chaque jour, Son alliance est trahie. Mais même à Pierre, qui renia publiquement son Maître par trois fois, la repentance fut offerte, ainsi que le pardon. Cette voix, qui dénonce l’infidélité, ne s’adresse pas qu’aux malfaiteurs et aux traîtres. Nous sommes tous des traîtres, quand nous songeons à l’immense abîme qui nous sépare de Dieu, s’Il n’eut pas pris sur Lui l’initiative de faire de nous des fils et des filles. Or, Il choisit de nous remodeler à Son image, comme si nous avions été formés le sixième jour à partir de la poussière. A Ses yeux, grâce au premier-né d’entre les morts — Jésus-Christ le Juste — nous occupons le même rang qu’Adam et Eve avant leur acte de désobéissance et nous avons la perspective de vivre éternellement dans un Eden renouvelé et cette fois, incorruptible.

« Où vous frapper encore, si vous continuez vos révoltes ? Toute la tête est malade, et tout le cœur, languissant. De la plante du pied jusqu’à la tête, il n’y a rien de sain ; ce ne sont que blessures, meurtrissures, et plaies vives, qui n’ont point été pansées, ni bandées, ni adoucies avec l’huile. »

Peut-on imaginer un enfant, qui a tant causé de mal et qui a tant été châtié, qu’il ne reste plus de place sur tout son corps pour le châtier une nouvelle fois, tant sa peau est couverte de bleus et de blessures ? S’il rentre ainsi à la maison en ayant une fois de plus dépassé les bornes, son père peut prendre la baguette, mais où frappera-t-il ? La question, qu’il se posera sera : comment châtier encore mon enfant ? Comment faire pour qu’il comprenne enfin ? » Bien sûr, les châtiments corporels violents sur les enfants sont à proscrire ; c’est une image pour nous faire comprendre le dilemme de Dieu. En réalité, les blessures dont il est question sont dans le cœur et dans la tête des humains. Elles ne sont souvent pas visibles physiquement, mais on peut aisément les voir au travers de leurs conséquences, à savoir, notre comportement.

Ce que décrit cette affirmation, c’est l’état de ma tête, siège de ma pensée et de mon entendement, et l’état de mon cœur, siège de mes sentiments et émotions. Et puisque la tête et le cœur sont ensembles le noyau qui constitue ma personnalité, mon être intérieur, s’ils sont malades, toute ma personne en est gravement affectée. Ce n’est pas une hypothèse. Dieu ne parle pas en hypothèses, mais Il dit la Vérité qu’Il connaît parfaitement, combien même cette vérité est intrinsèque. Le Seigneur, qui m’a faite et qui sait tout de moi, connaît mon état intérieur. Je peux le cacher sous des habits somptueux. Je peux le camoufler sous un sourire angélique. Dieu voit dessous. Il sait quand je suis au bord des larmes. Il connaît tous les drames que j’ai vécus. Il connaît le nombre des cicatrices dans mon cœur et déclare qu’il y a même des plaies vives qui n’ont pas pu cicatriser.

Quand on a une plaie sanglante, se prendre un autre coup fait extrêmement mal. Nous connaissons tous l’expression « remuer le couteau dans la plaie », c’est ce que nous faisons tous, nous, les humains. Nous remuons le couteau dans les plaies qui sont vives et nous concentrons nos efforts pour ne plus souffrir, en essayant tout un tas de stratégies. Mais certaines de nos plaies n’ont pas été pansées ni bandées, ni adoucies avec une huile. Quelle huile peut bien adoucir une plaie vive ? L’Esprit de Dieu est la seule huile bienfaisante. Et Sa Parole, le seul pansement, le seul bandage à appliquer, le temps de la cicatrisation et de la guérison.

Parfois, il suffit d’une odeur, parfois d’un son, d’une mélodie. Pourquoi le Seigneur nous a-t-Il créés avec des sens en si étroite relation avec notre émotivité ? Le sens olfactif, par exemple, est directement relié à une partie du cerveau propre aux émotions. Les personnes hypersensibles ne le sont pas seulement en qualité de sensibilité émotionnelle, mais également en termes de perceptions sensorielles. Pourquoi est-ce ainsi ?

Il suffit de sentir une odeur précise pour fondre en larmes, tandis que les pensées étaient à des milliers de lieues du sujet qui attriste subitement. Une seule odeur. Un seul son. Une seule mélodie. Et nous voilà plongés dans une souffrance torturante, dans une nostalgie sans fin, en dehors de l’espace et du temps, car ancrés dans nos souvenirs les plus personnels et les plus douloureux. C’est une plaie qui s’ouvre. Une blessure enfouie. Une meurtrissure, comme celles que nous accumulons tout au long de notre vie sur terre. Mais nous ne sommes pas en mesure de les soigner, même si certains payent des fortunes dans l’espoir d’y parvenir un jour. Aucun psychologue, ni aucun psychiatre, ni aucun guérisseur ne peut changer l’état des lieux que l’Eternel Dieu a fait sur l’être humain dans son for intérieur, depuis que le péché est entré dans l’homme.

Les plantes peuvent soigner les maux physiques et avoir des vertus apaisantes, mais elles ne peuvent procurer la paix intérieure. Les pierres sont des jolies créations de Dieu, mais elles n’ont aucun pouvoir pour guérir, ni aucun impact sur la personnalité. Les techniques de relaxation et activités sportives issues des traditions orientales ne sont que des moyens de capter les énergies émotionnelles pour donner à l’homme l’illusion qu’il les maîtrise et qu’il les transforme à sa guise. Mais en vérité, dans cette thématique ancestrale de la condition humaine et de son mal existentiel, il n’est pas question d’énergies, il est question de blessures, de meurtrissures, de plaies vives. Le cœur du problème reste le même, que l’on se détende, que l’on se sente un avec la nature ou que l’on fume un joint pour planer au-dessus de sa condition. La souffrance est là. Le réveil est là. La plaie finit toujours par s’ouvrir.

« Votre pays est dévasté, vos villes sont consumées par le feu, l’étranger dévore vos campagnes sous vos yeux ; tout est dévasté comme après un ravage fait par l’étranger. »

L’humanité a-t-elle des yeux pour voir ? A-t-elle des oreilles pour entendre ? Chaque pays ici-bas est dévasté par le péché et ses conséquences. Chaque ville est consumée par le feu de la convoitise, de l’idolâtrie, de l’orgueil. Et l’étranger dévore le fruit de notre labeur, il le fait sous nos yeux impuissants.

La société profite des humains. Quand nous travaillons, il y a toujours quelqu’un qui essaie de tirer profit de nos efforts. Même si nous épargnons de l’argent petit à petit dans l’espoir de réaliser un projet, il y a toujours quelqu’un qui tire profit de ce que nous espérons épargner. La société est faite ainsi : le gouvernement se sert, il fait des promesses, mais utilise ses fonds à sa guise, ne poursuivant en vérité qu’un seul but. Et une poignée d’hommes se partagent le monde. Pour l’instant, c’est eux les propriétaires par l’entremise de Satan, pendant que des millions d’humains triment, crèvent de faim et souffrent — en plus des meurtrissures invisibles — de blessures et maladies physiques. Malgré l’abolition de l’esclavage, il y a toujours des esclaves et il y a des hommes libres, mais un jour la justice de Dieu viendra s’établir sur la terre et ceux qui se croyaient libres reconnaîtront leur captivité dans le péché. Ils devront se repentir de leurs actes ou devront disparaître définitivement de la surface de la terre.

La terre est dévastée, comme après un ravage causé par l’étranger. L’étranger, c’est Lucifer qui apporte continuellement au monde, qu’il croit dominer pour toujours, une fausse lumière et de fausses promesses. Quand une vie est fondée sur cette fausse lumière, sur ces fausses promesses, la désillusion est un ravage incomparable et la mort est souvent la seule issue accessible à l’homme dans une pareille épreuve. Quand un foyer est fondé sur de fausses croyances et sur le mépris de la loi de Dieu — le mépris de Sa justice — la prospérité n’est que passagère et le bonheur apparent d’un tel foyer n’est pas solide.

« Et la fille de Sion est restée comme une cabane dans une vigne, comme une hutte dans un champs de concombres, comme une ville assiégée. »

Les véritables enfants de Dieu peuvent se retrouver dans cette parole, car elle décrit parfaitement l’état dans lequel ils se trouvent. L’apôtre Paul nous appelle « le temple de Dieu », mais actuellement, nous ne ressemblons pas à un temple, nous n’avons rien d’un bel édifice majestueux comme celui de Salomon. Nous ressemblons à une petite cabane précaire et fragile, comme une hutte au milieu de nulle part. Futurs citoyens et rois de la Jérusalem céleste, nous ne ressemblons pas encore à un beau temple. Les pierres sont souvent mal taillées, elles sont friables par endroit, elles ne sont pas encore bien cimentées ensembles. Tout est à venir.

Les véritables enfants de Dieu se sentent comme une ville assiégée, car les peuples ennemis qui adorent les idoles et servent d’autres dieux dévorent nos campagnes. Ils prennent toujours plus de place, toujours plus d’emprise dans notre vie, dans notre foyer, dans notre cœur. Nous luttons comme des exilés pour garder notre identité d’enfants de Dieu, de race élue. Nous luttons pour garder la foi dans les temps qui sont les nôtres. Nous nous sentons assiégés de toute part. Et si nous sommes seuls, c’est encore plus dur, parce que notre cabane est visiblement misérable et que rien ni personne ne nous rappelle qui nous sommes réellement.

Mais il y a une voix qui S’est fait entendre. Elle a été mise par écrit pour que nous la lisions, pour que nous l’apprenions, pour que nous l’entendions véritablement. Cette voix S’adresse à nous aujourd’hui, avec autant de force et de persévérance qu’il y a des milliers d’années. Elle interpelle et dit : « Cieux, écoutez ; terre, prête l’oreille, car l’Eternel parle… »

Cette voix m’a parlé et j’ai commencé à l’entendre au plus profond de moi. Elle m’a soulagée. Cette voix connaît qui je suis, ce que je suis, dans quel état je suis. Cette voix me rassure, et elle m’exhorte à la laisser me remplir. La connaissance qu’elle m’apporte est salvatrice et bienfaisante pour moi. Elle panse et bande mes blessures. Elle guérit mes meurtrissures. Elle cicatrise mes plaies vives.

J’ai commencé à l’apprendre par cœur, pour que l’ennemi ne cause plus de ravage en moi. Ainsi, je peux me la réciter pour que, si nouvelles blessures il y a, elles n’aient pas le temps de me faire mal.

Dieu a déversé Son huile sur mes plaies. L’Esprit-Saint, c’est Lui qui me montre quel pansement choisir ; c’est Lui qui a ouvert ma Bible au livre d’Esaïe, quand je demandais à Dieu « Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? ». Et dans ces lignes, dans tout ce premier chapitre, j’ai trouvé des réponses à mes questions et un miroir honnête pour ne plus me mentir.

Que ces lignes parlent également à tous ceux que le Seigneur veut toucher, aux quatre coins de la terre, car Sa Parole est intemporelle, immortelle et toute-puissante. Elle atteint l’âme au plus profond et sauve ceux qui se noient dans la douleur et dans l’ignorance.

Que Dieu vous touche et vous bénisse. Que Sa grâce surabonde, là où elle n’a pas encore été pleinement reçue.

Texte biblique tiré d’Esaïe 1:2-8.

Anne-Gaëlle

 




T.034 – Le cœur de Dieu

J’ai passé une journée bien étrange. Alors que, depuis des jours, je me lamentais sur mon sort, noyée dans des difficultés administratives et financières, et dans un grand sentiment de solitude. Tandis que je me réfugiais quotidiennement dans les petits sentiers invisibles des champs de canne à sucre – me sentant moi-même invisible – la main de Dieu est venue m’arracher à mon insignifiance et elle m’a délivrée des griffes de la mélancolie.

Je passais des heures entières à marcher dans les champs de cannes, plus hautes que moi, car elles me cachaient du reste du monde. Je recherchais la tranquillité à tout prix et le moindre bruit me rendait agressive. Je m’isolais et, dans des endroits que j’estimais assez vierges de l’esprit du monde, assez perdus pour qu’aucune âme ne vienne à passer par là, je m’adressais à Dieu en pleurant.

Certes, le Seigneur m’avait maintes fois encouragée et Il m’avait appris tant de choses, mais dans ces jours-ci, il m’était impossible de m’en souvenir ou de me les approprier. Je ressentais en moi une grande souffrance qui n’avait cesse de remonter à la surface. Je ne saurais dire exactement d’où me provenait cette douleur intense ; elle prenait la forme d’un manque d’amour, d’un rejet cruel, d’un sentiment d’abandon.

Malgré la sympathie des habitants, je demeurais très solitaire, trop solitaire pour réussir à m’intégrer. Cette société, quoique plus joviale et plus détendue qu’en Europe, restait malgré tout la société des hommes et femmes d’aujourd’hui, à mille lieues de mes aspirations idéalistes. N’est-ce pas un paradoxe cruel que d’avoir un cœur qui fuit le monde et de désirer de tout son cœur être aimé ? L’un et l’autre ne sont pas compatibles… Alors, je priais Dieu de me donner la faculté de me satisfaire de ma vie solitaire, sans amitié, sans amour, et la force de rester vivante pour Lui, mais surtout pour ma fille et nos animaux qui seraient perdus sans moi.

La misère matérielle venait à rajouter à cette dimension morose une dose supplémentaire de dramatisme. Je n’avais même plus les moyens de faire la cuisine. Ayant fraîchement déménagé, je me trouvais en permanence au milieu de mes cartons et de mes affaires disposées un peu partout à même le sol. Sans pouvoir ranger ce foutoir, à défaut de meubles, je me sentais comme dans un chantier en ruine. Chaque jour passait dans l’attente d’un peu d’argent et, aussitôt qu’il en rentrait une once, j’allais le dépenser dans un esprit de survie.

Les problèmes administratifs ne se résolvant pas, j’essayais de les oublier en fuyant dans les champs de cannes.

Ma misère matérielle — survenue après avoir épuisé toutes les économies que j’avais faites avec tant de sacrifices — me poussait également à fuir dans les champs de cannes.

Mon incapacité momentanée à tisser des liens avec les habitants ou à renouer avec mes anciens amis, que je n’avais plus contactés depuis des années, m’incitait à m’isoler dans les champs de cannes.

Et entourée de toutes ces tiges épaisses et denses, qui formaient un mur entre moi et le monde, je laissais libre cours à ma mélancolie.

Dans un moment de grande tristesse, je dis à Dieu que même ici, sur cette île paradisiaque où Il m’avait donné un toit, je désirais mourir. Je m’imaginais tenant une fiole de poison dans la main et buvant comme dans « Roméo et Juliette », sauf qu’à part ma fille, je me disais qu’il n’y aurait personne pour déplorer ma mort. Prisonnière du présent, j’étais incapable de m’élever au-dessus de ma condition. Le séjour des morts, dans lequel il n’y a ni pensée, ni sentiment, m’apparaissait comme l’endroit ou l’état idéal… Mais, Dieu merci, il y avait à la maison, au milieu des cartons, une fille, un chien et deux chats qui m’attendaient et je gardais encore la notion du temps et des responsabilités, et, plus que tout, je gardais en moi la conviction d’appartenir à Dieu et donc l’interdiction absolue de mettre moi-même fin à mes jours.

Je me souviens de la dernière prière que j’ai adressée à Dieu, le soir, lors de ma marche quotidienne, avant de revenir à la maison : « Seigneur, ce que je souhaite le plus au monde, c’est que tu me délivres de mon insatisfaction et que tu diriges chaque seconde de ma vie. Prends les rênes et conduis-moi, je ne sais pas où je vais ». C’était la veille d’une journée extraordinaire…

Je marchais de bon matin, vers le centre du village, pour me rendre à la salle informatique afin de suivre mes démarches en cours, lorsqu’une dame âgée me salua gaiement. Il y avait dans ses yeux beaucoup d’amour. Elle me dit gentiment qu’elle me trouvait jolie : un compliment qui vint du cœur de manière spontanée et qui me fit le plus grand bien. Cette dame avait un chapelet autour du cou et je compris qu’elle était – comme la majorité des habitants de cette île – catholique. Mais elle semblait avoir un amour sincère pour Dieu, ainsi que pour son prochain.

Elle me raconta combien elle était bénie, car elle avait des enfants et ils étaient pour elle le plus beau cadeau que Dieu lui avait donné. Cette dame âgée souriante, avec son modeste chapeau et ses savates, me raconta son témoignage de la grâce de Dieu qui lui avait donné la force de tenir bon dans la misère, elle qui était veuve et dont la vie fut jonchée d’épreuves et de miracles. Nous discutâmes quelques minutes, puis je lui dis « au revoir » ; elle me quitta en me donnant le conseil de demander chaque jour à Dieu la force dont j’avais besoin…

Je voulais consulter l’état de mon compte bancaire, car je redoutais depuis plusieurs jours une catastrophe… Mais je fus agréablement surprise en découvrant qu’une somme avait été créditée, ce qui me permettait ce jour de me réapprovisionner en nourriture, et même d’acheter enfin un parapluie ! La pluie, dans le pays où je vis, est très forte et toujours imprévisible…

Mon soulagement fut d’autant plus grand, lorsque j’ouvris mon courrier électronique et découvris le message d’un ami, celui qui m’est le plus cher au monde. Son message, annonçant une triste nouvelle, n’était pas pour me réjouir ; mais il arrivait après plusieurs semaines de silence afin de me montrer qu’il pensait à moi, qu’il ne m’oubliait pas et que dans son cœur, j’existais encore. Bien que pleurant à chaudes larmes à cause de la triste nouvelle, je souriais car mon cœur grelottait de moins en moins.

Cet ami me rappela aussi que ma présence épistolaire – ce que j’écris pour partager mes expériences et mes réflexions avec d’autres chrétiens – a de la valeur, et qu’il y a quelque part des personnes à qui cela profite. Cela me donna le sentiment de ne pas être complètement inutile dans ce monde, le sentiment d’exister vraiment.

En sortant de la salle informatique, je me dirigeai vers la poste, en vue du distributeur. Je passais devant la mairie quand je lus une affiche « Heures de permanence des élus ». Ces mots, que je ne lisais que machinalement, eurent dans mon esprit un effet étrange. « Les élus » répétai-je. Cela sonnait à mes oreilles avec tant d’importance ! « Ces personnes doivent avoir la grosse tête… », pensai-je. Ils ont été élus, choisis consciemment parmi tant d’autres ! Ils occupent une place spéciale et ont beaucoup de considération de la part des concitoyens. Sur le coup, je les enviais presque. « Les élus » répétais-je. Puis, vint un moment d’éblouissement céleste : je réalisais soudain pourquoi cette affiche m’avait tant interpelée… Moi aussi, je suis élue ! Je suis élue, choisie consciemment par Dieu parmi tant d’autres ! Il m’a choisie et, même si la raison de Son choix est un mystère que je ne pourrai jamais percer, Il m’a élue ! Je me rendais à l’évidence que Dieu seul savait pourquoi Il me voulait et aussi, qu’en aucun cas il regretterait son choix. Ma misère me parut soudain injustifiée. Je pris conscience que mes faiblesses présentes n’étaient pas une entrave au choix de Dieu dans Son plan majestueux qui ne pouvait que dépasser mon entendement.

Sur le chemin du retour, je reçus un appel téléphonique du directeur du collège le plus proche, dans lequel je tentais vainement d’inscrire ma fille depuis plus d’un mois. Il m’appelait pour me rassurer et me dire que, s’il n’y avait présentement pas encore de possibilité, il y aurait toujours une solution et qu’elle se présenterait à moi en son temps. Il était très aimable et respectueux. Quand je lui dis que j’allais continuer de prier, il me parla avec une touche d’humour du Saint-Esprit et je sus que, même ainsi, Dieu me rappelait Son omnisciente présence : Il me faisait un petit clin d’œil pour m’encourager !

Une fois rentrée à la maison, je décidai, dans la force des circonstances, de prendre le car pour descendre en ville avec ma charrette à courses. Mais, prise dans la préparation d’un courrier, je loupai le bus et dus me résoudre à prendre le suivant. Le chauffeur fut celui dont la compagnie m’était le plus agréable et avec qui j’avais pu discuter quelques fois. Il témoignait d’un grand intérêt pour moi et me demandait souvent où j’en étais dans mon installation. Apprenant que j’aimais marcher, il me proposa de faire une randonnée avec lui. Depuis mon arrivée sur l’île, je déplorais de ne pas encore avoir pu faire de vraie randonnée, celles qui durent au moins toute une journée et qui se font sur des parcours escarpés et perdus. Ma fille n’aimant pas marcher en montagne, je n’avais personne pour m’accompagner.

Le sourire et l’amabilité du chauffeur de bus me réconfortèrent. Il me témoignait beaucoup de respect et me disait qu’il aimait bien discuter avec moi. Cela donna encore un coup de poing sur mon sentiment d’insignifiance !

Mon mal-être commençait à décroître. Dieu me souriait. Je n’étais pas seule. Il m’avait rappelé que, malgré mes états d’âme, Il m’avait consciemment choisie. Il m’avait montré qu’il est possible de vivre dans les difficultés et dans la misère, possible de vivre et de vieillir seule, comme cette dame âgée qui demandait à Dieu chaque jour la force nécessaire. Il m’avait montré d’où vient cette force et Il m’avait exhorté à la Lui demander.

Il me rappelait aussi que, pour chaque problème, il y aurait toujours une solution et que ce n’était pas à moi d’essayer de la forcer à apparaître, mais que seul l’Esprit de Dieu est en mesure de le faire, en Son temps. Et Il me prouva que, souvent, les problèmes sont déguisés en urgences et en détresses, mais qu’en vérité, ils se résolvent parfois d’eux-mêmes – sans même qu’on s’en aperçoive – parce que le Seigneur S’en occupe discrètement, comme Il S’est occupé de mon solde bancaire.

Dieu me permit de me remémorer la bénédiction liée à la descendance, puisqu’un enfant, c’est un cadeau de Dieu, même si, souvent dans ses difficultés, une mère a tendance à l’oublier. Cette dame au crépuscule de ses jours remerciait le Seigneur pour sa descendance. Dans sa vieillesse, elle n’était pas complètement seule : ses enfants restaient présents, même loin, ils pensaient à elle et lui donnaient l’affection qu’ils avaient reçue étant petits. Là était la bénédiction issue de la semence d’amour qu’elle avait plantée autrefois et dont elle avait pris soin avec labeur.

Aujourd’hui, je ne vois pas forcément ma bénédiction, je ne l’identifie pas comme telle, mais aux jours de ma vieillesse – s’il me sera permis de vieillir – je verrai les fruits de cette bénédiction.

Dieu me permit également d’entrevoir qu’en dehors de mon univers esseulé, il y a des personnes bien réelles que ma présence importe et sur qui mon existence peut avoir un impact. Des personnes animées par des sentiments bienveillants à mon égard. Comme un magicien pouvant sortir d’un chapeau haut-de-forme un lapin, Dieu peut susciter des êtres pour qui je peux jouer un rôle, directement ou indirectement.

En y songeant, je pris la décision une fois rentrée chez moi de prendre ma plume, mais je n’étais pas encore au bout de mes surprises…

Je fis mes courses avec énergie et tranquillité d’esprit. Comme il me restait encore une heure avant le dernier bus, je décidai de la passer près de la côte, devant la grandeur de l’océan, afin de m’imprégner de la paix présente en ce lieu. A cet endroit surplombant la plage de galets noirs, le sol était recouvert d’un mélange herbeux vert et beige, formant un tapis volumineux et douillet, d’une douceur sans pareille. Je m’y allongeai et regardai les vagues. C’est alors que j’eus une autre illumination céleste…

La douceur sur laquelle mon corps reposait – qui était comme une caresse m’englobant toute entière – c’était la douceur du cœur de Dieu dans lequel je pris conscience d’exister réellement. Le contact si doux de cette couverture végétale me donna littéralement la sensation d’être dans le cœur de Dieu !

Je remerciai le Seigneur pour cette douceur et pour la grâce immense d’être ici. Je réalisai qu’il ne pouvait y avoir aucun autre endroit au monde où je me sente autant chez moi que sur cette île où Dieu était venu me chercher jadis, quand Il m’avait choisie parmi les brebis égarées ; cette île où Il continuait de Se révéler à moi dans toute Sa plénitude, au travers de Sa création et de Ses créatures.

La sensation d’être chez soi est une sensation ordinaire pour la plupart des humains, mais pour moi, c’est seulement à 35 ans que je la découvre et il m’est impossible de décrire ce que cela produit en moi… Une paix profonde. Un sentiment de sécurité absolue. Une grâce merveilleuse.

J’étais si triste à l’idée de devoir quitter ce lieu, que j’emportai avec moi une touffe de cette plante qui recouvrait le sol. Je cherchais à saisir cette sensation merveilleuse d’être dans le cœur de Dieu, à la saisir de toutes mes forces et à la ramener chez moi. Je me connaissais et je savais que la mélancolie était toujours là, tapissée au fond de moi et prête à surgir pour me clouer à nouveau sur le sol de ma turpitude. Cette mélancolie qui prend sa source dans la nostalgie, quand le présent présente des vides que l’on ne peut combler…

Arrivée chez moi, j’eus tout juste le temps de déballer mes courses et d’offrir à ma fille les petites choses que, par la grâce de Dieu j’avais pu acheter, lorsque le téléphone sonna. C’était un ancien ami, un être cher qui venait d’être informé de mon retour sur l’île, après ma longue absence de neuf années. Il était très ému et très heureux de me parler. Et dans la conversation, il glissa en pleurant une phrase qui me marqua profondément : « Anne-Gaëlle, je t’aime, parce que tu es dans les gènes de mon cœur, dans les gènes de mon âme, je t’aime ! »

Personne ne m’avait jamais dit cela et je compris que les écluses du ciel venaient de s’ouvrir pour susciter un ami et lui faire dire ce que mon Dieu voulait tellement que je comprenne : je suis aimée ! Je suis dans les gènes du cœur de Dieu ! Dans les gênes de Son âme ! Mon âme et l’âme de mon Sauveur sont reliées par l’Amour, quoiqu’il arrive et quelque soit le temps qui passe !

Quand on se sent aimé, la mélancolie a moins de pouvoir. Elle ne nous entraîne plus constamment dans un repli sur soi et la vie peut reprendre le dessus, sans plus avoir besoin de se cacher. Quand on se sent aimé, on ne vit plus dans la honte et dans la peur. Peur des autres, de leur regard, peur des défis ou du lendemain…

Il ne s’agit pas de chercher l’amour en particulier. Il s’agit de savoir reconnaître les marques de l’Amour de Dieu, les traces de Son passage, qui précède le nôtre. Comme me le rappela cet ami au téléphone, c’est Jésus seul qui trace mon chemin et personne d’autre. Cette phrase me troubla, parce que cet ami n’était pas chrétien.

Je n’ai pas ici de frère en Christ, mais pour Dieu, ce n’est pas un obstacle, car s’Il veut me dire quelque chose, Il le fait sans être handicapé par le fait que je sois probablement la seule chrétienne dans mon entourage. S’il a quelque chose à me dire ou à me montrer, Il ne se limite pas dans Ses moyens : Il peut ouvrir la bouche de n’importe qui. Il peut incliner le cœur de n’importe qui pour accourir à mon secours. Dieu seul choisit Ses intermédiaires.

Il faut se rappeler que notre alliance, scellée par le sang de l’Agneau, ne vieillit pas. C’est une alliance vivante, avec un Dieu vivant. Il ne sert à rien de s’appuyer uniquement sur des expériences passées, même si, dans ces souvenirs, nous étions aimés de Dieu. Il faut savoir que nous continuons à l’être dans le présent ! Il faut nous construire de nouveaux souvenirs dans lesquels Dieu continue à être notre Dieu et à nous révéler personnellement son Amour.

Je crois que beaucoup de chrétiens se reposent sur leurs souvenirs les plus glorieux, sans que leur âme soit véritablement en repos. Ils se repaissent de leurs exploits passés, en termes de foi, et ne se posent plus la question de savoir ce qu’il en est aujourd’hui. Cette attitude ne peut être satisfaisante que dans la mesure où l’on accepte la compromission et où l’on fuit la remise en question et le changement. Il me semble que notre Seigneur a parlé de cela dans une de Ses lettres aux sept Églises et que cet avertissement nous concerne tous.

Il faut oser dire à Dieu ce qui nous trouble présentement. Il ne faut pas craindre de Lui dire franchement ce que nous pensons ou ressentons, car là est notre liberté et pour nous, la seule manière sûre de faire appel à Lui. Si nous avons l’impression de perdre la foi, et même si nous aimerions parfois disparaître, il faut le Lui dire.

Par ce témoignage de confiance envers Lui, nous L’honorons. Par notre sincérité, nous L’honorons. Par notre attente – parce que nous en sommes réduits à attendre et savons que Lui seul peut mettre fin à notre attente – nous L’honorons. Et Dieu, qui honore ceux qui L’honorent, interviendra. Il viendra encore et encore pour nous rappeler certaines choses et, entre toutes, la plus importante, celle qui brise notre douloureuse insignifiance : nous sommes aimés.

« Je suis assuré que ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni les principautés, ni les puissances, ni les choses présentes, ni les choses à venir, ni la hauteur, ni la profondeur, ni aucune autre créature, ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ, notre Seigneur » (Romains 8:38-39).

«  Ne vous inquiétez de rien, mais en toute occasion exposez vos demandes devant Dieu, par des prières et des supplications, avec des actions de grâce, et la paix de Dieu qui surpasse toute intelligence, gardera vos cœurs et vos pensées en Jésus-Christ » (Philippiens 4:6-7).

Soyez bénis, consolés, fortifiés !

Avec toute mon affection fraternelle,

Anne-Gaëlle




T.033 – Une soif inexprimable

Comme un puits sans eau, je me réveille desséchée. Une langueur profonde souffle en moi et remplit mon être d’un vide étrange. Cette langueur extrême m’assèche ; peu à peu le vide s’empare de moi. Puis vient la peur, la panique, la solitude. J’ouvre les yeux, j’essaie de crier, mais aucun son ne sort de ma bouche. Autour de moi, malgré le silence : le mal, l’incertitude. Je ne ressens que manque ; rien de beau ne percute mon âme. Les oiseaux chantent mais je ne perçois aucune mélodie. Tout semble creux, absurde. Et cette crainte tapissée au fond de mon cœur, elle m’empêche de respirer. J’ai soif, si soif ! Mon âme étouffe dans sa cage ! Ce monde est une cage.

Où est la lumière ? Où est l’oxygène ? Où est la pluie ? J’étouffe. Je crie de l’intérieur. La vie pèse trop lourd. La beauté n’atteint pas mes yeux. Je n’ai plus la force de fuir. Et où que j’aille, cette soif sera là. Elle fait partie de moi. Elle me tourmente dès le lever et rien de terrestre ne peut l’apaiser. Je suis incapable de l’exprimer telle qu’elle est. Ce n’est pas la soif d’eau, ni de nourriture. Ce n’est pas la soif de sensation, ni d’aventure. Ce n’est pas la soif d’objet, ni de fortune. Ce n’est pas la soif de projet, ni la soif d’activité. Ce n’est pas une soif de dimension humaine. C’est une soif divine. Car même au milieu de toutes ces choses, elle est là, elle persiste et elle m’empêche de jouir de la vie.

Si je suis matériellement riche, cette soif ineffable m’empêche de jouir de mes richesses. Si je suis entourée de ma famille ou de mes amis, elle m’empêche de jouir de leur compagnie. Si je suis entourée de beauté, elle m’empêche de l’apprécier à sa juste valeur. Si je suis dans l’abondance de nourriture, de mets succulents, elle m’empêche d’y trouver mon plaisir. Et si j’avais un mari, s’il me prenait dans ses bras et me prodiguait une tendresse sincère, cette soif étrange qui habite en moi formerait un rideau invisible entre nous : un rideau qui m’empêcherait de recevoir ses caresses.

Cette sensation de soif est tel un précipice abrupt qui me donne le vertige. Comme un séisme terrifiant à l’intérieur de moi, un séisme qui me prive de la moindre sécurité. Cette soif me coupe du monde, elle me coupe de la vie. Et pourtant, c’est elle qui me permet de revenir à la vie… Car la soif dont je parle, c’est la soif du Dieu vivant.

Elle me prend dès le lever, cette étrange maladie. Comme un nageur pris de crampe en pleine course : impossible de continuer à nager, impossible de continuer à vivre. Je n’arrive pas à faire semblant. Je n’arrive pas à vivre avec cette crampe !

Tel un cerf-volant, dont le fil se déroulerait sur plusieurs kilomètres, qui partirait si haut, si loin qu’on ne pourrait plus le voir. L’enfant qui tient le cerf-volant panique : « Où est mon cerf-volant ? » Cette soif intense, que je ressens si fort, ressemble à la panique de l’enfant. Le cerf-volant s’est trop éloigné. Alors, la soif grandit au fur et à mesure que le fil se déroule, inexorablement. Il faut tirer sur le fil ! Il faut ramener le cerf-volant ! Il ne s’agit pas d’un jeu, ni d’un passe-temps. C’est de spiritualité dont je parle. Elle s’envole et disparait. Et le fil, c’est ma relation avec mon Créateur.

Dans ce monde anti-spirituel, il arrive si facilement que la spiritualité s’éteigne dans la vie du croyant. Dieu a inscrit Son Nom dans le cœur de ses élus. Il a implanté en eux une soif si profonde et si insatiable que Lui seul est en mesure de la combler vraiment. Seule l’Eau divine remplit les puits que nous sommes. Mais cette soif cruelle, qu’Il a mise en nous, n’est pas là pour nous tourmenter indéfiniment, ni pour nous couper de la vie. Au contraire, elle est là pour que nous l’identifiions et que nous réagissions : c’est elle qui nous permet de tirer sur le fil pour ramener le cerf-volant. C’est elle qui nous pousse à rechercher à tout prix l’irremplaçable Présence de notre Dieu vivant.

Il ne s’agit pas de tradition, ni de devoir moral, ni de placébo pour guérir notre mauvaise conscience. Il s’agit d’un cri du plus profond de l’âme, d’un appel au seul Etre capable de combler notre soif et de guérir ses symptômes.

En ce jour, des milliers de chrétiens se rejoignent et se réunissent en assemblées pour rendre un culte à Jésus-Christ. Je ne souffre plus de ne pas me joindre physiquement à l’une d’entre elles. J’ai gravi ce matin une partie de ma montagne, ou devrais-je dire « de Sa montagne », car elles Lui appartiennent toutes. J’ai cherché un endroit sauvage au milieu de Sa création. J’ai lâché mes cheveux en guise de voile, puisque c’est celui que mon Créateur m’a donné pour couvrir ma tête en Sa Présence. Je me suis assise sur la mousse végétale douce et humide qu’Il a déposée sous mes pieds. Et j’ai contemplé ce qu’il y avait devant, autour, à terre et au-dessus de moi…

J’ai contemplé les arbres, les plantes, les pierres, le ciel et la lumière du soleil. Puis j’ai commencé à Le remercier pour tout cela, ainsi que pour chacun de Ses bienfaits me concernant. Je Lui ai dit que j’avais choisi le temple de Sa création pour Lui offrir mon culte et que, même si j’étais seule, je venais ici pour Le rencontrer et Lui rendre grâce, au même titre que ceux qui se rassemblent dans un édifice avec des croix, des bancs et des pupitres. Et la soif qui me torturait est partie.

Le chant des oiseaux s’est transformé en mélodie. Un magnifique rapace en voie d’extinction a volé par deux fois au-dessus de moi. Le soleil a brillé d’une étincelante lumière. Le vent a sifflé un air doux et paisible, comme pour me conter la douceur de Dieu. Chaque trèfle m’a soudain montré sa perfection, se dressant fièrement autour de moi et dansant dans la brise. Les pousses de bambou se sont mises à me saluer gaiement et il m’a semblé que le vent à lui seul n’en était pas l’auteur. Car c’est dans Sa création que le Dieu vivant manifeste Son Amour à ceux qui le Lui réclament, et à tous ceux qui cherchent dans la nature des marques de Sa Bonté et de Sa Présence dans ce monde.

Un homme s’est approché de moi, venant du haut de la montagne. Il m’a demandé si tout allait bien. Peut-être était-ce ma solitude ou le fait d’être assise par terre au milieu des arbres qui l’interpellait. Je le saluai et lui répondis que j’étais en prière. Il crut que j’avais des problèmes : « C’est pour évacuer… » suggéra-t-il. Alors, je rétorquai joyeusement : « C’est pour dire merci ! »

Dans les mœurs humaines, quand on se tourne vers Dieu, la prière est associée à une requête ou un appel au secours, ce qu’elle peut être en toute liberté pour tout chrétien qui a compris le lien paternel qui le relie à Dieu. Mais dans les mœurs divines, prier c’est respirer, c’est boire à la Source, c’est être libre et heureux. Car prier, c’est être un avec notre Créateur et Sauveur. C’est vouloir être auprès de Lui, même s’il n’y a rien à y gagner sur le plan terrestre. Prier, c’est Lui dire merci, sans forcément avoir quelque chose à Lui demander.

Pour être capable de Lui dire merci, il faut être en mesure de s’émerveiller devant la moindre de Ses créations, devant le moindre être vivant qu’Il a façonné. Mais cette faculté de s’émerveiller est trop souvent inexistante ou éteinte, parce que le vide dans l’être humain prend tant de place que tout tourne autour du besoin de le remplir ! Mais tout ce qui n’est pas spirituel n’est que néant, ce qui revient à remplir le vide avec du vide. Cette soif si exigeante ne se laisse pas guérir facilement… Elle est nocive pour qui ne sait pas l’identifier.

Il faut être en mesure de reconnaître sa soif intérieure : soif de Dieu pour les croyants et soif indéfinissable pour tous ceux qui ne le sont pas encore… Il faut reconnaître que rien de ce que l’homme a créé ne peut égaler ce que Dieu a créé et que rien, à part le Dieu vivant, ne peut combler cette soif. Mais pour cela, il faut, dans bien des cas, avoir touché le fond : avoir vécu assez de déceptions et avoir assez souffert pour prendre conscience de ses propres limites et de la superficialité de la civilisation humaine moderne dans toute sa mondanité.

Et pour ceux que le diable tient occupés avec milles activités et artifices, il faut qu’ils apprennent à écouter leur soif et ne pas la couvrir avec encore plus d’occupations. Il leur faut se sensibiliser à l’appel de Dieu de se dénuer du monde pour entrer dans une dimension spéciale, pour certains encore inconnue : la véritable spiritualité qui prend sa source dans la prière et dans la contemplation, dans le cadre de la simplicité et du dénuement. Dans cette dimension spéciale, Dieu dessine autour du croyant un cercle de lumière qui l’accompagne partout où il va ; une protection visible, une grâce palpable dans laquelle réside la seule véritable Sécurité et le seul véritable Bonheur.

Une seule pensée remplit ma tête : Jésus, le Roi de l’univers. Comme un parfum enivrant, je veux sentir Sa Présence, recevoir Ses dons, Le comprendre, comprendre Sa manière d’agir. Je veux tout connaître de Lui, parce qu’Il m’a créée moi, parce qu’Il m’a appelée par mon nom, un nom qu’Il m’a donné. Parce qu’Il S’est révélé à moi quand je n’étais alors qu’un être misérable et charnel, loin de me douter qu’il existe une dimension ô combien supérieure et infiniment meilleure : la vie spirituelle, la vie avec le Dieu vivant !

Si j’étudie Sa Parole, c’est dans l’optique d’apprendre de Lui et d’échapper à la folie de ce monde voué à la destruction finale. Lire Sa Parole m’abreuve de Sa Paix et de Son Amour.

« J’écouterai ce que dit Dieu, l’Eternel, car il parlera de paix à son peuple et à ses bien-aimés, afin qu’ils ne retournent plus à la folie » (Psaume 85:9).

Le Psaume 85 me parle de Sa miséricorde et d’espoir :

« La vérité germera de la terre » (Psaume 85:12).

« La justice marchera avec lui et il la mettra partout où il passera » (Psaume 85:14).

Notre Seigneur a dit : « Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils seront rassasiés » (Matthieu 5:6).

La paix est déjà disponible pour tous ceux qui la recherchent en Dieu, par le Prince de Paix, qui n’est pas le prince de ce monde et dont le royaume n’est pas de ce monde, mais qui a créé ce monde – avant qu’il ne se corrompe – et tout ce qu’il contient de beau, de merveilleux, d’authentique. Sa Paix est disponible dans la contemplation avec les yeux du cœur, par l’Esprit de Dieu, qui nous ouvre à la rencontre avec notre Créateur dans toutes Ses manifestations glorieuses.

Les montagnes sauvages, que l’homme ne peut guère transformer à sa guise, sont une marque de Sa Grandeur et de Sa Supériorité sur l’homme. La flore multicolore aux milliers de senteurs et saveurs et avec toutes ses vertus médicinales, est une marque de Sa grande Sensibilité et de Son immense Génie. La complexité du corps humain, dans ses différents systèmes et leur parfaite coordination, est une marque de Son infinie Intelligence et de Sa Sagesse. Toute la faune dans sa multitude diversifiée est une marque de Son incommensurable Liberté artistique et du caractère grandiose de Ses Initiatives. Moi-même, je suis un mystère, sans être un mystère pour Lui. La galaxie est un mystère pour l’homme, mais Dieu n’a aucune question dont Il ignore la réponse.

Tout dans Sa création et dans Son œuvre au quotidien fait l’objet de mon émerveillement et le sujet de ma contemplation. C’est ainsi et seulement ainsi, que ma vie ici-bas prend un sens et que la terrible douleur enfouie dans mes entrailles charnelles disparaît : être Son œuvre parmi Ses œuvres, adorer, non pas la créature, mais le Créateur, et voir dans tout ce que Dieu crée le reflet de Sa gloire. Préférer la création de Dieu à la création de l’homme.

Certains prétendent que l’homme a créé Dieu. Mais l’homme ne peut rien créer de parfait. Pourtant, l’homme s’élève dans ces temps si sombres au-dessus de son rang par une mystérieuse déification. Et il s’exalte de tout ce qu’il crée ; il en oublie que Dieu lui fournit les matières premières et qu’Il lui donne l’intelligence et les lois physiques nécessaires pour inventer des choses. L’homme ignore que chacune de ses inventions a d’abord été pensée par Dieu – ou par le diable – avant qu’elle ne soit pensée par l’homme. C’est Dieu qui a donné à l’homme la faculté de penser ; Il sonde chaque pensée avant qu’elle ne se manifeste oralement ou sous la forme matérielle. Que Dieu agrée ou non les créations humaines, Il reste Juge et Propriétaire de l’univers qu’Il a modelé, et rien ni personne ne pourra jamais égaler le plus grand de tous les inventeurs. Ce n’est pas Dieu qui est une invention de l’homme, mais c’est l’homme qui est une invention de Dieu !

Au lieu de se glorifier d’être Sa créature, la plupart des humains rejettent l’idée d’être créé : une idée qui les amoindrit à cause de leur orgueil. Ils préfèrent avoir pour créateur le hasard, le néant, le big-bang, ou bien ils optent pour l’incertitude des agnostiques. L’homme se veut créateur et non créature. Mais tout ce qu’il crée est à double tranchant : une médaille qui brille de face et qui, de l’autre côté, n’apporte que misère, injustice et destruction. Et l’homme prétend que tout ce qu’il crée peut remplir le vide – remplir le puits asséché que nous sommes – et ainsi apaiser la soif intérieure. Mais la création de l’homme ne rendra sa soif que plus forte, sans jamais l’étancher. Un jour, il sera forcé de s’en rendre compte.

Ce jour là, enfin je me sentirai moins seule, avec ma soif invisible et inexprimable. Ce jour-là, je ne serai plus un coquelicot au milieu d’un champ de blé. Ce jour-là, les gens ouvriront leurs yeux et salueront à leur tour les pousses de bambou qui dansent dans le vent. Ils complimenteront les trèfles qui se dressent fièrement et ils admireront la forme des cailloux. Ils s’émerveilleront devant les branches des arbres en fleurs, entortillées et longues, qui s’élèvent vers le ciel. Ils lèveront les yeux et souriront à l’oiseau, au rapace majestueux, qui tournoie dans les airs. Ils observeront tout cela et jouiront des diverses saveurs et parfums de la création, sans avoir besoin d’en créer des artificielles. Ils aimeront la création, au lieu de la détruire. Ils aimeront chaque créature et comprendront enfin que rien ni personne n’existe par hasard. Le hasard sera un mot banni du dictionnaire, car ce sont les personnes athées qui l’ont inventé ; il sera remplacé par l’expression « providence divine » et personne n’osera plus remettre en question l’existence de Dieu, ni la Genèse.

C’est dans l’optique de voir venir ce jour que j’accepte d’être un coquelicot solitaire dans un champ qui n’est pas le mien, aussi longtemps que le Seigneur attendra. Cette attente devient un fardeau dans la mesure où je laisse le fil se dérouler et le cerf-volant se perdre au loin, mais si chaque jour je prends soin de mon cerf-volant, si j’apporte ma soif à Dieu et que je Le cherche dans la prière et l’action de grâce, mon attente s’en trouve plus douce et moins éprouvante.

Je remercie Dieu pour ma douleur, car c’est cette douleur qui me pousse vers Lui. Je Le remercie pour le vide en moi, car c’est ce vide qui me pousse vers Lui. Je Le remercie pour ma soif intérieure : elle est mon hydromètre spirituel. Comme Blaise Pascal l’a si joliment formulé : il y a en chaque personne un vide : un vide qui a la forme de Dieu. N’essayons pas de le remplir avec autre chose. Allons à la Source boire l’Eau du Christ, celle qui jaillira éternellement de nos cœurs le temps venu.

A tous mes frères et sœurs en Christ, isolés ici-bas, éprouvés ou dans l’incertitude, cherchez refuge dans la contemplation et dans la prière. Nous n’avons pas besoin de temple fait de main d’homme, avec des ornements et des services religieux, si ces services religieux ne sont pas sincères, ni authentiques, s’ils sont ordonnés par des instances corrompues. Ne croyez pas que votre solitude et votre isolement vous coupent de la Grâce de Dieu ; au contraire, sachez que le véritable adorateur est capable d’adorer Dieu tout seul, sur une montagne sauvage, dans une grotte ou dans le désert, ou même dans son lit, s’il n’est plus capable de le quitter. Sachez que l’Amour du Christ est comme une puissante cascade, même si elle ne fait pas de bruit. N’ayez pas peur du silence et vous découvrirez des chants que vous ne connaissez pas.

« J’estime qu’il n’y a point de proportion entre les souffrances du temps présent et la gloire à venir, qui sera manifestée en nous. En effet, la création attend, avec un ardent désir, que les enfants de Dieu soient manifestés, car ce n’est pas volontairement que la création est assujettie à la vanité, mais c’est à cause de Celui qui l’y a assujettie, dans l’espérance qu’elle sera aussi délivrée de la servitude de la corruption, pour être dans la liberté glorieuse des enfants de Dieu. Car nous savons que jusqu’à présent, toute la création soupire, et souffre les douleurs de l’enfantement ; et non seulement elle, mais nous aussi qui avons les prémices de l’Esprit, nous soupirons en nous-mêmes, en attendant l’adoption, la rédemption de notre corps. Car nous sommes sauvés en espérance. Or l’espérance que l’on voit n’est plus espérance ; en effet, comment espèrerait-on ce que l’on voit ? Mais si nous espérons ce que nous ne voyons pas, c’est que nous l’attendons avec patience. » (Romains 8:18-25).

« Vous n’avez point reçu un esprit de servitude, pour être encore dans la crainte ; mais vous avez reçu un Esprit d’adoption, par lequel nous crions « Abba, Père ». Car l’Esprit lui-même rend témoignage à notre esprit, que nous sommes enfants de Dieu. Et si nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers ; héritiers de Dieu et cohéritiers de Christ, si toutefois nous souffrons avec lui, afin que nous soyons aussi glorifiés avec lui. » (Romains 8:15-17).

« Réjouissez-vous dans le Seigneur » (Philippiens 3:1).

« Soyez toujours joyeux. Priez sans cesse. Rendez grâce en toutes choses, car telle est la volonté de Dieu en Jésus-Christ à votre égard » (Thessaloniciens 5:16-18).

Que Dieu vous bénisse abondamment !

Anne-Gaëlle




T.032 – Un partenaire à toute épreuve

Je suis ici, dans cette maison pleine de couleurs, une maison chaleureuse qui me reçoit le temps de me reposer, le temps de contempler Ta Gloire et d’écrire, puisque c’est à cela que Tu m’appelles, Seigneur Yeshoua. Je voulais continuer à dormir ce matin,  mais en vain : le titre de ce texte résonne dans mon esprit, ainsi que son contenu. Et je Te dis « je pourrai écrire tout à l’heure, ou bien demain… ». Puis, j’ai considéré cette maison bien calme et colorée, cette solitude hors norme – puisque j’ai laissé ma fille pendant trois jours – et cet ordinateur que j’ai emmené avec moi, en vue de me distraire dans le train : tout s’apprête et insiste soudain pour me pousser à écrire. Alors, je Te dis « oui », de tout mon cœur, si c’est pour cela que Tu m’as fait vivre tout ce que je vais écrire.

Le partenariat avec les humains peut être très décevant. Qui peut parfaitement répondre à nos attentes ? Qui peut respecter pleinement ses engagements en tout temps ? En réalité, personne ne le peut. C’est pour cela que les partenaires se séparent tôt ou tard : rares sont ceux dont le partenariat dure toujours et résiste aux épreuves, ainsi qu’aux déceptions qui viennent le briser. Mais il existe un Partenaire par excellence, un partenariat hors du commun dont l’alliance est indestructible. C’est de Celui-là dont il faut que je témoigne…

Quelle aventure ce fut que de déménager par le train ! Je quittai mon appartement et, malgré avoir envoyé beaucoup de colis par bateau, il restait sept bagages ainsi que les trois cages avec nos animaux. J’étais seule avec ma fille, pour qui le port de charge lourde est à proscrire. Et dans toutes les difficultés qui nous attendraient, il y avait deux changements de train ; nous n’aurions que peu de temps pour aller d’un quai à l’autre avec tous nos bagages…  Je ne serais pas honnête si je déclarais avoir affronté cette épreuve de ma foi en toute quiétude. Quand on a peu d’argent et quand le voyage est gracieusement offert, la pression est grande : l’adrénaline est à son apogée à la pensée de louper un train !

Dès le départ, les choses s’annonçaient compliquées : pas de taxi, des allers-retours à pieds jusqu’à la gare, chargée comme un âne. Il fallait partir une heure et demie avant le départ du train alors qu’en voiture, il aurait fallu dix minutes ! Mais je ne me suis pas découragée, car au fond de moi, je comptais sur mon Partenaire invisible : Celui qui allait me tenir la main durant tout le voyage. Le deuxième aller jusqu’à la gare, j’ai levé le pouce et une voiture s’est arrêtée pour me prendre. Le conducteur me déposa à la gare et porta mes valises jusqu’au quai. Malgré le nombre restreint de voyageurs, des mains solidaires soulevèrent nos bagages. Puis le train partit, nous emmenant dans une étrange euphorie.  Qui l’aurait cru ? Dans ce village fermé où personne ne nous disait bonjour, où jamais personne ne nous souriait, ce jour où nous avions vraiment besoin d’aide, les gens se mirent à nous sourire et à nous aider.

Arrivées à la gare où nous devions prendre notre correspondance, les mains solidaires déposèrent nos bagages sur le quai. Je me précipitai vers un contrôleur pour lui demander, le visage rempli d’appréhension, sur quel quai était notre prochain train. Et l’angoisse s’envola lorsqu’il me dit « ici-même ». Partenariat divin ! Dieu avait déjà résolu le problème ! Il y avait tant de quais, tant de distances entre chaque quai, des escaliers, des petits ascenseurs… Mais nous n’avions qu’à rester où nous étions et nous avions même assez de temps pour avancer jusqu’au bon wagon. Pour la montée dans le train, d’autres mains solidaires attrapèrent nos valises et nos animaux, et ainsi se prolongea l’euphorie…

Durant le trajet, le premier couple à qui j’ai demandé s’il s’arrêtait à Avignon m’a proposé de l’aide : ces personnes avaient le même changement de trains que nous ! Ce couple et une tierce personne portèrent nos bagages jusqu’à l’emplacement prévu pour notre wagon, bien qu’ils s’éloignaient de leur emplacement à eux : cette disposition surnaturelle à nous aider jusqu’au bout, à l’encontre de leur propre intérêt, me surprit beaucoup ! A force d’être habituée à l’indifférence générale, un élan de gentillesse désintéressée est une surprise sans pareille. Et le plus extraordinaire fut que cette fois encore, il n’était pas nécessaire de changer de quai ! Ainsi se déroula en toute simplicité le second changement de train, celui qui m’avait empêché de dormir la veille, tant je le redoutais…

Mon appréhension ne se limitait pas au transport des valises. J’avais également une crainte vis-à-vis du contrôleur : il m’avait été impossible d’acheter des billets pour mes animaux, car le guichet était exceptionnellement fermé, lorsque je m’étais rendue avec cette initiative à la gare de la ville la plus proche, la veille du départ. Mais durant tout le voyage, pas un contrôleur ne me les demanda. Les cages entassées les unes sur les autres étaient pourtant une réelle attraction pour les voyageurs qui n’avaient cesse de les regarder et de faire des commentaires à leur propos. Mais les contrôleurs ne les remarquèrent pas.

Jusque dans les moindres détails, tout fut divinement agencé pour notre voyage. Alors que je m’inquiétais à propos de la place disponible pour notre encombrante cargaison, il y avait dans chaque train un endroit parfait pour tout déposer, non loin de notre regard, et malgré le grand flux de passagers. Une dame me proposa spontanément d’échanger nos places avec elle, car elle était tout au fond du train et cela nous permettait d’être avec nos animaux sans gêner personne. Dans le train suivant, l’espace voyageur était rempli à ras-bord ! Mais dans l’entrée, devant les toilettes, il y avait un espace suffisant pour entasser toutes nos affaires. Par une divine coïncidence, la porte des toilettes était scellée avec un écriteau « hors d’usage ».

Un partenariat à toute épreuve, un Partenaire fidèle et omniscient. Quand on Lui donne l’honneur de Le laisser occuper Sa place, de Se charger de tout, absolument tout, jusque dans les moindres détails, Il démontre Ses qualités parfaites et Son pouvoir. Il Se manifeste par tout ce qu’Il utilise. Des mains, des sourires, des regards. Il utilise la force des uns, les moyens des autres. Il incline les cœurs. Il réquisitionne ce qui appartient à l’un pour le mettre à la disposition de l’autre : à la disposition de celui qui se trouve dans le besoin et dont l’âme crie à Lui. Il ouvre les yeux des uns et ferme ceux des autres, selon la situation et le danger potentiel. Et Il organise tout selon Sa Sagesse, dont la fondation se trouve dans une seule et même pensée qui traverse toute la terre : la pensée de Son Amour bienveillant qui veut le bien de l’autre. Le bien de tous ceux qu’Il aime. Voilà le secret de Sa Sagesse.

Avant de quitter définitivement la région, mon Dieu avait résolu tous mes problèmes, ou presque… J’avais des meubles et des affaires que je n’avais pas réussi à vendre et dont il me fallait me débarrasser. Il m’offrit l’amitié d’une personne qui les prit pour les stocker chez elle. Elle me fit la promesse de les vendre lors du grand vide-grenier d’été qui doit avoir lieu dans le village, et de m’envoyer le gain. Pour chaque problème, le Seigneur semblait déjà connaître la solution ! Mais un nouveau problème se présenta à moi…

Il fallait faire renouveler la carte d’identité de ma fille avant notre départ, ce que j’avais pris soin de faire : on me donna un rendez-vous à la mairie de la ville voisine deux jours avant le déménagement afin de venir récupérer la carte. Mais ce jour-là, j’appris que la carte n’était pas prête ; on ne me donna aucun renseignement sur la cause de ce retard, ni sur le délai à attendre ! Le système informatique et judiciaire impose au demandeur de carte d’identité de revenir en personne à la mairie dans laquelle la demande a été faite. Ma colère n’y pouvait rien changer. Mais je savais au fond de moi que cet important retard dans la production de la carte avait obligatoirement une cause, je veux parler bien sûr du point de vue spirituel. Si le Tout-Puissant permettait ce retard, Lui qui d’habitude coordonne si parfaitement tous les évènements et les circonstances, alors il fallait qu’Il ait une bonne raison de me faire à nouveau traverser la France pour revenir dans cette ville…

Il se passa deux semaines avant que je reçoive la bonne nouvelle de l’arrivée de cette précieuse carte d’identité, sans laquelle il est évidemment impossible de prendre l’avion. Il n’est pas nécessaire de décrire mon inquiétude, tandis qu’il ne restait que quelques jours avant la date du grand départ pour notre déménagement en outre-mer. J’achetai donc des billets de train pour effectuer le voyage de plus de 800 km afin d’aller récupérer cette carte. Je partis seule pour un rapide aller-retour, déplorant de perdre une somme importante dans ce voyage : l’argent que je comptais utiliser pour louer une voiture et nous rendre à l’aéroport de Marseille le jour J. Heureusement, peu avant avoir quitté le village où j’habitais, j’avais fait la connaissance d’une jeune femme très sympathique qui habite dans la ville où se trouve la mairie en question, et elle m’offrit de m’héberger gratuitement pendant mon séjour. C’est dans sa maison que je me trouve en cette heure, sa maison colorée.

A peine montée dans le train, alors que je n’avais parcouru que quelques kilomètres, le train s’arrêta brusquement. Le commandant de bord annonça d’une voix tremblante un accident de personne – un suicide – et par conséquent une immobilisation prolongée du train. Une personne désespérée s’était jetée sur les rails et les pompiers devaient ramasser les morceaux du corps. Une ambiance morose s’est installée peu à peu parmi les passagers. Le message de désespoir, les images épouvantables qui s’imposent dans l’imaginaire de chacun, l’empathie pour le conducteur dans cette situation traumatisante, la compassion des uns, la colère des autres, l’angoisse des complications pour tous ceux qui ne peuvent pas poursuivre leur voyage comme prévu… Cette étrange situation amena certains passagers à se poser des questions essentielles et à parler les uns avec les autres dans un climat de solidarité.

Une dame très intelligente m’adressa la parole : un esprit scientifique,  professeur d’université. Elle me parla de manière philosophique sur la vie, le monde et l’être humain. Nous échangeâmes avec simplicité sur nos croyances respectives. Ce ne fut pas un débat, mais plutôt une discussion merveilleuse. De toute ma vie, je n’avais jamais joui d’un tel échange avec une personne de sciences qui ne partage pas la foi chrétienne : ni orgueil, ni prétention, ni animosité ne vint ternir notre dialogue. Etant écrivaine et curieuse par-dessus tout, elle me demanda un de mes écrits. Je lui fis donc lire un texte, le seul que j’avais encore dans mon ordinateur. C’était la première fois que je l’emmenais dans le train ; je n’aurais jamais imaginé son utilité dans ce sens ! Elle le lit et me posa des questions sur ma foi, puis je lui fis le récit émouvant de ma conversion. Ainsi passèrent les trois heures d’arrêt au milieu de nulle part, enfermés dans un train. Puis je lui fis don de mes coordonnées, remettant en prière son cœur au Dieu de l’infini, qui nous avait placées côte-à-côte.

Cette personne, manifestement très optimiste, ne comprenait pas que je perçoive la nature humaine avec un regard à son goût trop pessimiste. Tandis que j’essayais de lui expliquer que la perfection et la pureté véritable n’existent qu’en Dieu, elle m’exposait ses croyances dans le domaine de la psychologie, comme quoi l’humain serait en mesure de se guérir et de s’améliorer par ses propres moyens. Lui disant de quoi Jésus m’avait sauvée et quelle transformation Il a opérée en moi, j’espérais qu’elle comprendrait et qu’elle réviserait ses théories sur le potentiel humain, afin qu’un jour elle aussi fasse appel au seul vrai Sauveur de l’humanité. Mais elle parla du verre à moitié vide et du verre à moitié plein. Pour elle, je faisais partie de ceux qui ne voient que le verre à moitié vide… Pourtant, c’est dans ce vide que Dieu est venu faire Sa demeure, c’est par ce vide qu’Il manifeste Son abondance et me remplit chaque jour.

Soudain, cette dame, qui avait commencé à me tutoyer, reçut un appel téléphonique qui la bouleversa. Elle se détourna de moi et se mit à pleurer. Elle reprocha des choses graves à son mari qui restait stoïque en face d’elle. J’entendis dans ses propos tout le contraire de ce qu’elle m’avait affirmé lors de notre discussion. Je compris que Dieu faisait soudain tomber son masque d’optimiste : profondément blessée, elle constata combien sa confiance l’avait trompée, et à quel point le cœur humain n’est pas fiable. Je restai silencieuse, intriguée par ce qui se passait, sans pour autant m’en mêler. Dieu savait. J’attendis qu’elle sèche ses larmes pour lui donner le petit papier avec mes coordonnées. Un jour peut-être en fera-t-elle bon usage.

Pendant le trajet entre Nice et Paris, puisque le train avait trois heures de retard et que j’avais loupé ma correspondance, je téléphonai à la mairie qui m’attendait le jour même, afin de reporter si possible mon RDV au lendemain. C’est alors que je pris conscience de ne pas avoir l’ancienne carte d’identité, dont la remise est absolument obligatoire. Je fus prise de panique en me rappelant l’endroit où je l’avais oubliée : dans la photocopieuse de la poste, où j’étais allée la veille, à Nice. Dans cette situation subitement angoissante, je dus m’en remettre à mon Partenaire céleste, qui Lui seul a le pouvoir d’arranger les choses les plus chaotiques et de réparer les erreurs les plus grotesques ! En effet, mon erreur était stupide : je n’avais nul besoin de faire une photocopie de cette ancienne carte d’identité, je l’avais fait par pur sentimentalisme, afin d’avoir un souvenir de ma fille quand elle était un beau bébé potelé…

La carte d’identité oubliée dans la photocopieuse fut gracieusement remise au guichet, et Dieu toucha le cœur de l’agent qui accepta de la rendre à ma mère. Elle fut envoyée par Chronopost à la mairie, où la nouvelle carte m’attendait, pour qu’elle arrive le jour suivant. Une personne se désista à cette date et on m’accorda un RDV de dernière minute. La précieuse carte d’identité pouvait alors enfin m’être remise !

Arrivée à Paris, je devais changer de gare. La dame avec qui j’avais si bien conversé était parisienne, elle m’avait bien expliqué comment faire et quel bus prendre. A l’arrêt de bus, je constatai que je n’avais pas de monnaie. J’abordai une personne souriante, la première que je vis, et elle m’offrit gracieusement un ticket, ce qui me permit de monter immédiatement dans le bus et d’arriver à l’autre gare à temps pour ma correspondance.

Dans le second train, un homme âgé m’aborda. Il devait descendre au Mans et comptait faire la route restante jusqu’à chez lui en voiture, celle-ci étant restée au parking de la gare. Il me proposa gracieusement de m’emmener dans la ville où je devais me rendre, et même de me déposer devant la maison colorée de mon hôte. Il n’habitait pas dans cette commune, et je ne pouvais que remercier mon Sauveur de faire venir à moi tant de gentillesse et tant d’aide, sans jamais s’en lasser ni être en panne de ressources !

J’aurais pu finir mon voyage en train, mais je n’avais que dix minutes pour prendre ma correspondance, et je devais me rendre au guichet pour faire changer mon billet de retour, sans quoi l’échange ne serait plus possible. L’homme me témoigna une grande courtoisie : il m’accompagna au service de vente, sollicita pour moi l’intérêt de l’agent de gare et partit chercher sa voiture, en m’attendant dans le parking. La personne au guichet fut très compréhensive. Mon billet fut échangé sans frais supplémentaires, ceci grâce au retard du train qui avait été immobilisé pendant trois heures, ce qui m’avait fait louper mon rendez-vous. Ce que cet agent compatissant ne savait pas, c’est que, retard ou non, je devais décaler le rendez-vous : par ma propre faute, puisqu’il fallait attendre l’envoi en Chronopost qui arriverait le lendemain. Autrement dit, j’aurai dû de toutes manières repousser mon retour et, en temps normal, ce changement est facturé à une somme non négligeable.

J’arrivais donc dans la maison où je me trouve à cette heure. La dame me reçut avec une attitude plus qu’amicale. Elle me confia la clef de sa maison, sa nourriture qu’elle mit à ma disposition, et me confia également une partie de son cœur, lorsqu’au cours de la soirée elle me parla de son enfance, de sa jeunesse, de sa souffrance et de tout ce qu’elle avait enduré. Je compris le pourquoi de mon voyage. Dieu avait suscité une personne qui l’écoute, quelqu’un qui cherche à la comprendre. Je ne dirais pas que deux soirs suffisent à transformer une vie, ni trois heures dans un train immobile. Mais je sais que cela n’est qu’une petite fenêtre dans le temps, et que Dieu a le pouvoir de susciter d’autres fenêtres, quand Il le jugera bon, et où Il le voudra. La vie est faite ainsi : une suite de moments décisifs, qui peuvent apporter dans leur contexte une prise de conscience pour avancer, se libérer et grandir.

La majorité des personnes savent cela, mais la fenêtre est vite refermée, puis oubliée. Et ils ne savent pas que Dieu en est l’architecte. Ils se fabriquent des maisons, des édifices entiers sans savoir qu’ils ne peuvent rien contrôler et que tôt ou tard il pleuvra sur leur édifice, et qu’il y aura toute sorte de grêlons qui s’abattront dessus, jusqu’à les obliger à sortir de leur sécurité artificielle et à faire tomber leur masque.

J’ai appris que, finalement, je n’aurais plus besoin de louer une voiture pour me rendre à l’aéroport. Le père de mon amie de jeunesse – celle, qui m’avait proposé de nous conduire – vient d’acheter une fourgonnette, qui est à notre disposition pour le grand départ. Ainsi, ma colère pour l’argent qui a été dépensé dans le train devient injustifiée. Là, où quelque chose disparaît, apparaît autre chose. La difficulté laisse place à la facilité. L’injustice n’est qu’une façade obscure ; elle s’effrite et laisse paraître une justice insoupçonnée…

J’ai moi-même beaucoup appris pendant ces voyages. J’ai finalement réussi à laisser Dieu guider toutes choses. J’ai senti combien mon angoisse a diminué, pour finir par se transformer en douce quiétude. Il m’a suffit de dire au chauffeur de bus à Paris « j’ai la foi » pour sentir le moteur prendre de la vitesse, et passer à chaque fois que le feu était orange, parce qu’il fallait que je change de gare et que je n’avais que trois quarts d’heure. Il suffit d’une parole, d’un regard, d’un sourire pour véhiculer la force de Dieu, quand on a foi en Son Amour qui nous accompagne, où que nous allions.

Autrefois, je luttais comme une brave évangéliste pour enseigner aux autres la doctrine de la Rédemption. Je croyais qu’il fallait tout expliquer, comme une enseignante avec des petits enfants. Certes, le temps est court pour cela, quand on croise une personne et que l’on ne dispose que de quelques heures ou de quelques minutes. On ne connaît pas la personne, on ne sait pas ce qu’elle a traversé, ce en quoi elle croit et ce qu’elle refuse de croire. On ne voit pas ses blessures. On ne sait rien d’elle. Evangéliser de cette manière équivaut à distribuer des tracts à la sortie d’une école, tandis que les jeunes ne cherchent qu’à décompresser et que le sol se recouvre de ce que personne n’est prêt à recevoir.

J’ai compris que la réelle évangélisation dans ce monde si complexe ne peut se faire qu’en partenariat avec Dieu, et uniquement avec l’ouverture d’esprit que suscite la compréhension de Son Amour. L’expérience personnelle de ce partenariat divin, de cette alliance d’Amour extraordinaire, surtout dans les péripéties les plus éprouvantes, conduit inexorablement à véhiculer quelque chose de spécial, d’indescriptible autour de soi. Cela nous pousse à aller à la rencontre de certaines personnes pour qui le Seigneur éprouve une grande affection, et souvent elles viennent d’elle-même, poussées par une force invisible.  Des personnes qui se trouvent à un croisement de leur vie, qui ont ou auront besoin de quelque chose : d’une parole, d’un geste, d’une rencontre.

Il ne s’agit pas de leur réciter la Bible, mais de leur parler du meilleur des partenaires. Il ne s’agit pas de sauver leur âme – car cela seul Dieu peut le faire – mais d’ajouter l’ingrédient particulier qui manque à leur cheminement spirituel. Il n’y a pas de recette, pas de directive générale, seulement un Partenariat surnaturel duquel découlent chaque moment spécial, chaque situation qui puisse contribuer au développement de chacun. Un partenariat à toute épreuve.

Je souhaite à chacun de vivre ce Partenariat chaque jour toujours plus, jusqu’à son dernier souffle. Je souhaite à chacun de voir les épreuves et les défis, les changements imprévus et les nouvelles difficultés comme faisant partie de ce Partenariat. Non comme des contraintes, mais comme une alliance. Puisque c’est ainsi que notre Roi veut agir dans ce monde, laissons-nous librement guider par notre Partenaire céleste, cherchons avant tout la sécurité de Son Amour et reposons-nous toujours sur Sa Sagesse, en toutes circonstances. Cette alliance ne consiste pas à vouloir tout diriger et à vouloir tout comprendre. Cette alliance est notre force et notre liberté dans ce monde. Je vous souhaite de vivre réellement cette alliance.

Que Dieu vous bénisse. Qu’Il nous apporte l’ingrédient manquant dans notre cheminement spirituel. Qu’Il le fasse pour tous ceux qui cherchent en Lui leur refuge, dans ces temps où il se passe de plus en plus d’événements étranges et de tragédies. Et qu’Il le fasse aussi pour les autres, parce que Son Amour couvre toute la terre et que la perdition n’est pas Sa volonté.

« Je recommande donc, avant toutes choses, qu’on fasse des requêtes, des prières, des supplications et des actions de grâces pour tous les hommes ; […] afin que nous puissions mener une vie paisible et tranquille, en toute piété et honnêteté. Car cela est bon et agréable aux yeux de Dieu notre Sauveur, qui veut que tous les hommes soient sauvés, et qu’ils parviennent à la connaissance de la vérité » (1 Timothée 2:1-4).

« Il faut secourir les faibles, et se souvenir des paroles du Seigneur Jésus, qui a dit lui-même : Il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir » (Actes 20:35).

« [Dieu] nous a rendus capables d’être ministres de la nouvelle alliance, non de la lettre, mais de l’Esprit ; car la lettre tue, mais l’Esprit vivifie » (2 Corinthiens 3:6).

« Tous les sentiers de l’Éternel ne sont que bonté et fidélité, pour ceux qui gardent son alliance et ses témoignages » (Psaume 25:10).

« Le secret de l’Éternel est pour ceux qui le craignent, et il leur fera connaître son alliance » (Psaume 25:14).

Anne-Gaëlle

 




T.031 – Des créatures inachevées

Ce jour a été pour moi vraiment spécial : après de longs mois d’attente, j’ai revu une personne dont j’avais une très mauvaise opinion et Dieu m’a donné une bonne leçon…

En effet, je nourrissais semaine après semaine de la rancune envers cet homme – qui se trouve être de ma parenté – parce que j’avais cru ses beaux discours avant de devenir sa locataire et de venir m’installer dans ce village que j’ai tellement méprisé par la suite. Après avoir amèrement regretté, j’ai organisé peu à peu mon départ et lutté de toutes mes forces pour témoigner de mon zèle dans les conditions les plus difficiles. Tous les efforts et la fatigue pour repeindre les murs et arranger cet appartement, qu’il m’était impossible d’affectionner, tout cela nourrissait en moi une sensation d’injustice.

Il avait empoché la caution de mon prédécesseur sans rien arranger dans le logement et m’avait demandé de tout remettre en bon état par mes propres moyens, ce qui équivalait pour moi à faire le travail d’un autre sans aucune aide ni rémunération. En d’autres termes, il fallait que je répare les bêtises et enlève la saleté d’un autre, et que je le fasse gratuitement… Comme le Christ le fait pour nous tous ! Mais Lui le fait sans broncher, sans Se plaindre une seule fois, tandis que moi, j’ai laissé ma perception m’induire en erreur et je me suis lamentée…

Outre les questions d’appartement, je reprochais à mon oncle de ne pas s’être occupé de nous, de ne nous avoir jamais invitées, ma fille et moi, alors que nous nous étions géographiquement rapprochées de lui. Je lui reprochais de ne pas avoir tenu sa promesse de me présenter à ses amis. Je lui en voulais de nous avoir laissées dans la plus grande des solitudes pendant toute une année, ce qui nous a semblé être une éternité.

J’étais tellement déçue et écœurée par sa négligence, tellement irritée par l’esprit de profit que je lui attribuais, que je n’ai eu cesse ces dernières semaines de le critiquer et, dans mon indignation, de médire sur sa personne devant d’autres. Tandis que je me préparais à affronter la dureté et l’intransigeance de cet oncle que je prenais pour un monstre, le Seigneur m’a rappelé à l’ordre…

J’ai passé beaucoup de temps à repeindre, à nettoyer, à retoucher, à rafistoler, de manière à ce qu’il se plaigne le moins possible, car je ne pouvais pas répondre parfaitement à toutes ses exigences. J’étais malade d’angoisse. C’est alors qu’il est arrivé : il nous a immédiatement invitées au restaurant, où nous avons mangé copieusement. Il s’est montré très courtois avec moi. Il nous a posé beaucoup de questions et a fait preuve d’un grand intérêt pour notre avenir, ainsi que d’une grande curiosité vis-à-vis de notre future cadre de vie. Nous avons agréablement bavardé et j’en ai oublié toutes mes craintes !

L’état des lieux fut rapide : il ne regarda rien en détail, il s’exclama d’admiration devant la blancheur des murs, lorsque je lui montrai fièrement que j’avais également repeint le salon, qui est la pièce la plus vaste. Il jeta de brefs coups d’œil dans les autres pièces, tandis que je le guidais en commentant mon travail. Après avoir rempli son formulaire, il resta encore pour écouter mes mésaventures concernant la préparation de mon déménagement, ainsi que le récit de mes difficultés. Puis il sortit un moment et revint en me tendant une liasse de billets, ceci en me souhaitant un bon nouveau départ.

Telles furent ses paroles : « Pour t’aider à redémarrer… Parce que tu le mérites : tu as un cœur en or ». J’en fus complètement bouleversée, d’autant plus qu’il me serra dans ses bras et m’embrassa à deux reprises. Cet oncle que j’avais tendrement aimé dans mon enfance, et que la vie avait éloigné de moi jusqu’à ne devenir dans mon ressentir qu’un glacial inconnu, un lointain propriétaire…

Moi, le monstre de médisance, le puits de rancune. Moi au cœur si noir d’impuretés, j’avais à ses yeux un cœur en or ! Ai-je déjà reçu dans ma vie leçon plus parlante que celle-ci ? Oui, je le crois bien : une fois ou deux, peut-être plus, mais ces leçons furent vite oubliées… Comment mon Seigneur et Père peut-Il encore, après tant d’années et après tant d’erreurs de ma part, avoir si grande compassion pour m’offrir une autre leçon, d’une façon si aimante ? Serrée, embrassée, complimentée de manière injustifiée sur ce cœur qui est le mien et que Lui seul connait vraiment. Et avec tant de générosité, puisque ce sont des coups de règle sur les doigts que je méritais, et non une liasse de billets avec un copieux repas !

Mon oncle m’offrit également un très joli stylo, celui-là même avec lequel j’écris ces mots dans mon journal. Ce stylo est muni au bout d’une petite lampe : c’est pour me rappeler symboliquement que j’ai besoin de lumière. La Lumière de Dieu, je ne peux pas la générer en moi. La miséricorde de Dieu, je ne peux pas la générer en moi. Je ne peux rien générer de bon en moi, je veux dire, rien de pur.

Tous les êtres humains – chrétiens, païens ou athées – ont en eux de bonnes et de mauvaises choses, mais rien de pur, rien de parfait. Je crois que c’est cela que l’apôtre Paul voulait dire quand il a écrit que le bien n’habite pas en l’homme : il n’y a rien de vraiment parfaitement bien dans l’être humain, car le bien qu’on trouve est souvent limité et corrompu par le mal. Quand on le sait déjà, on est moins déçu par les fausses promesses, les mensonges, les fraudes et autres supercheries, puis on se pose moins de questions quant à la versatilité de certains caractères.

Mais ne voir dans l’homme que le mal et le péché est une attitude bien dangereuse : cette attitude pousse inévitablement à adopter une tournure d’esprit très étroite qui assèche le cœur et nous place là où nous n’avons pas le droit de nous placer : dans la position de juge suprême. Et pour sûr, cette attitude nous rend à la longue méprisant et rancunier, et donc incompétent en qualité de justice.

L’être humain qui ne perçoit que les travers de son prochain en oublie qu’ils ne sont tous deux que des humains et donc, par définition, des créatures petites et inachevées pour lesquelles le Créateur a encore beaucoup de leçons en réserve…

La médisance est une épice nocive dont on pourrait tous se passer. Et pourtant, elle assaisonne les conflits et les guerres, et les engendre parfois. Mais même si elle peut être basée sur des faits réels, rien ne la justifie, car elle ne révèle au mieux qu’une partie de la réalité : seul Dieu omniscient connaît la totalité des faits dans toute leur vérité. Seul Dieu peut soulever le rideau de chaque existence, de chaque vie privée, de chaque vie secrète. Seul Dieu peut révéler ce qui se cache derrière : les sacrifices des uns et des autres faits en silence dans l’anonymat, les douleurs qui poussent les uns et les autres à mal agir, les difficultés que les uns ou les autres traversent sans forcément le laisser paraître, la fiabilité du succès – friable ou solide – dont les uns et les autres peuvent de vanter… Dieu sait tout en vérité tandis que nous, nous ne savons rien, et bien souvent nous nous trompons sur les autres, tout comme nous nous trompons sur nous-mêmes.

Ainsi, il est impératif pour moi d’écrire mes erreurs et, par la grâce de Dieu, de les corriger, et nécessaire d’avertir les uns et les autres, en toute humilité. Même si cela me coûte cher, car nombreuses sont les larmes que j’ai versées et grande est l’humiliation que j’éprouve. Quand notre Père nous reprend, c’est douloureux et soulageant à la fois. Cela blesse l’orgueil, cela brise le cœur qui se remplit de honte. Mais cet embarras est salvateur, puisqu’il est précurseur du salut. La Rédemption par le sang parfait du Christ est un baume qui apaise et guérit. Comme un baume gras sur une cuisante brulure, le pardon du Père efface progressivement la douleur et le trouble. Quelle joie soudaine, là où il n’y avait que honte et regrets !

Dieu est un Père qui pardonne tout en offrant Sa sagesse pour continuer la route. Il offre Sa sagesse divine sous la forme de conseils bienveillants, d’une affection palpable et de multiples bienfaits, jusque dans les détails pratiques et les besoins les plus matériels. Avec tant d’attentions, il est difficile de concevoir combien nos offenses et tout le mal que nous avons fait peuvent Le tourmenter. Et pourtant, Il en souffre. Il souffre pour nous, Il prend tout sur Lui et Il nous tend Sa main. Toujours et encore, encore une autre fois.

Je découvre en Dieu toujours plus l’image d’un Père, une image qui se renouvelle chaque jour : il le faut, car l’image terrestre de ce que l’on appelle un « père » est souvent tellement déformée… Ce père-là, certains ne veulent même pas y penser. Pour moi comme pour bien d’autres, ce sont des eaux troubles et amères, des mers agitées, un océan d’abandon, un iceberg de solitude, des orages de colère. Ce sont des paysages désolés, des croquis inachevés, des mélodies muettes, des plaies béantes. C’est tout un univers de glace que peut renfermer en soi le seul mot « père ».

Alors, il faut réapprendre à aimer ce mot. Il faut le comprendre à nouveau, se faire une nouvelle image de sa réelle définition, de sa véritable signification dans les cieux. Jour après jour, déception après déception, l’Esprit de Dieu œuvre en ce sens afin de faire régner la miséricorde divine dans nos cœurs d’enfants de Dieu, ainsi que dans notre perception trop humaine.

En apprenant à mesurer l’Amour du divin Père au-travers de Sa parfaite éducation à notre égard, nous deviendrons assez petits pour relativiser tout le mal qui nous pousse à nous haïr les uns les autres, et assez grands pour déceler de la lumière même chez nos ennemis, puis assez sages pour percevoir les lueurs du bien dans chaque être humain avant de le condamner et de le mépriser.

Que Dieu nous offre Son regard juste et miséricordieux, ainsi que l’humilité et la patience nécessaires pour nous modérer dans nos élans négatifs.

Soyez richement bénis !

Anne-Gaëlle

« Car je sais que le bien n’habite point en moi, c’est-à-dire, dans ma chair, parce que j’ai la volonté de faire le bien ; mais je ne parviens pas à l’accomplir » (Romains 7:18).

« De la plante du pied jusqu’à la tête, il n’y a rien de sain ; ce ne sont que blessures, meurtrissures et plaies vives, qui n’ont point été pansées, ni bandées, ni adoucies avec l’huile » (Esaie 1:6).

« Si quelqu’un d’entre vous pense être religieux, et ne tient point sa langue en bride, mais trompe son cœur, la religion d’un tel homme est vaine » (Jacques 1:26).

 « Celui qui n’aime point [son prochain], n’a point connu Dieu ; car Dieu est charité » (1 Jean 4:8).

« Pour nous, nous avons connu et cru l’amour que Dieu a pour nous : Dieu est charité ; et celui qui demeure dans la charité, demeure en Dieu et Dieu en lui » (1 Jean 4:16).

« Et quoi que vous fassiez, faites-le de bon cœur, comme pour le Seigneur, et non pour les hommes » (Colossiens 3:23).