D.228 – La communauté et rien d’autre

 

Document de réflexions personnelles sur mon appartenance à l’Église Universelle de Dieu, entre 1974 et 1995, et sur la communauté chrétienne du Nouveau Testament.

par Daniel Dion

• Une approche différente

Je suis un idéaliste. Je vois l’Église de Dieu, celle du Nouveau Testament (NT) et celle en devenir, comme une communauté. Il y a dix ans, ce mot a pris un sens que je ne soupçonnais pas et j’en ai été profondément étonné et reconnaissant. J’ai ressenti à ce moment une sorte de libération, de délivrance et de renaissance.

Je vais tenter d’expliquer dans ce document que l’église universelle de Dieu (éuD), de laquelle j’ai été membre pendant 22 ans, était une pseudo-communauté, c’est-à-dire qu’elle n’était pas une communauté accomplie. Elle n’en était qu’au premier stade de développement d’une communauté, sans connaître son besoin d’en devenir une et sans connaître le chemin par lequel elle devait passer pour y arriver. À des yeux non exercés, par exemple les miens en 1974, l’éuD donnait l’impression d’en être une et d’être la « vraie Église » décrite dans la Bible.

L’éuD s’est disloquée en de nombreux groupes et bien des membres se sont sentis abandonnés et trahis. Je vais donner ma perception de ces événements.

Dans ma réflexion, je vais m’arrêter sur certaines questions et tenter de donner des explications : que manquait-il à l’éuD pour être une communauté et être semblable à l’Église du NT ? Comment les bouleversements vécus par les membres dispersés s’expliquent-ils ? Sont-ils responsables de leur désarroi ? Où est la faute s’il y en a une ? Comment bâtir sur de nouveaux fondements et éviter les erreurs du passé, comme celles qui ont créé des traumatismes graves chez de nombreux membres ? Est-ce seulement possible ?

Un livre a été écrit par Scott Peck concernant la communauté : La Route de l’Espoir. Je vais l’utiliser pour commenter l’église dont j’ai fait partie, ainsi que celle du NT, et visualiser l’Église à venir. Je vais aussi puiser dans mes expériences personnelles pour en dégager des leçons.

Cette façon d’aborder le thème de l’Église pourrait sembler incongrue (déf. : qui ne convient pas, qui n’est pas conforme aux exigences de la situation). Pourquoi m’inspirer des principes d’un livre « non inspiré » et de mes expériences personnelles pour analyser une chose sacrée ?

L’Église de Dieu (celle du NT, pas l’éuD) mérite une analyse sérieuse. Je ferai de mon mieux, mais je ne suis pas un spécialiste. En l’approchant par l’angle communautaire comme celui exposé par M. Peck, j’espère en avoir une perspective différente. Je souhaite comprendre l’étendue, l’utilité, les bases, la structure, le but, les fonctions de la communauté de l’Église et le faire en rapport avec mes perceptions au sujet de l’éuD. Le livre de M. Peck n’est pas la Bible, mais je vous propose de le lire avant de vous en faire une opinion.

Une recherche des tenants et aboutissants de la forme communautaire pourrait me permettre de prendre du recul, de mieux comprendre et de dégager les principes des succès de la communauté de l’Église du NT et les causes des échecs de la pseudo-communauté, comme celle de l’éuD. Je considère que cela n’est pas réducteur. Tout dépend de l’esprit dans lequel les choses sont faites.

J’ai été très impressionné par le contenu du livre de M. Peck. L’analyse qu’il a fait de l’organisation des groupes est basée sur une expérience extraordinaire, acquise sur le terrain. Je vois en cette expérience une manifestation de l’Esprit de Dieu. L’auteur s’est senti inspiré par les Écritures et, à moins d’erreur de ma part, le cheminement qu’il a entrepris devrait servir dans la formation d’un groupe communautaire.

Le but de M. Peck n’était pas d’analyser l’Église du NT. Même s’il est clair qu’il voit l’Église de Dieu du NT comme une communauté, il n’en a pas fait une analyse biblique détaillée. Néanmoins, son livre est une source d’inspiration.

Cet auteur a aussi écrit des livres à succès comme Le Chemin le Moins Fréquenté et Les Gens du Mensonge, qui ont aidé des milliers de lecteurs. À l’aide de son épouse et d’un groupe, il a créé une fondation pour favoriser la création de communautés de par le monde. Ce ne sont pas des communautés ayant une orientation religieuse.

Il pourrait arriver que quelqu’un trouve des défauts dans le livre de Scott Peck ou dans sa façon de concevoir la communauté. Toutefois, la Bible et la communauté de l’Église du NT demeurent les références de base. Le livre de M. Peck est une aide dans la compréhension du fonctionnement d’une communauté.

L’Église de Dieu n’est pas un groupe ordinaire, dans ce sens qu’on ne pourrait lui appliquer sans nuances des règles s’appliquant à des groupes communautaires tels qu’on pourrait en rencontrer ailleurs. Par exemple, une communauté répondant au modèle du livre La Route de l’Espoir fonctionne sans chef. L’Église de Dieu n’est pas comme cela puisqu’elle a un chef : Jésus-Christ.

• Des problèmes

Lorsqu’on regarde l’Église du NT, entre autres choses, on y voit des problèmes. Une bonne partie des livres du NT parle de problèmes vécus par les membres de l’Église et leurs communautés naissantes.

Nous pouvons déjà en tirer une leçon : on ne reconnaît pas l’Église de Dieu par l’absence de problèmes, ni chez les individus, ni au sein du groupe. L’Église n’est pas un groupe parfait composé de gens parfaits. Les croyances des membres ne sont pas parfaites. Il est arrivé que des membres aient été en conflit les uns avec les autres. Il est arrivé que des communautés soient devenues peu à peu aveugles et qu’elles aient eu besoin de se faire réveiller. Il est arrivé que des personnes chargées de responsabilités s’égarent. Il y a eu certains désordres et des fausses doctrines étaient parfois répandues.

Certaines communautés faisaient preuve de maturité et il y avait chez elles très peu de choses à corriger. Pourtant, l’ensemble formait toujours la vraie Église du NT.

Il semble même qu’il y ait eu des différences entre les apôtres. Paul a semblé sévère à l’occasion. Jean a semblé plus souple, moins pressé. Pierre était parfois fort et parfois faible. Il y eut entre eux des divergences. Pouvons-nous en tirer une autre leçon ? Les différences entre les anciens existent au sein de l’Église du NT. Et encore celle-ci : divergences et différences ne signifient pas sectarisme, séparations et luttes de pouvoir.

D’autre part, on ne voit pas dans le NT une sorte d’autorité centrale, un siège social, une personne ou un comité, qui déciderait de toutes les choses importantes se passant dans l’Église. Certains voient dans un chapitre du livre des Actes la justification d’un « pouvoir central ». On voit plutôt en Actes 15 comment fonctionnait l’Église de Dieu. Il y avait un problème qui touchait la communauté d’Antioche et qui risquait de se répandre dans toutes les Églises locales. Une décision fût prise par consensus (il y a plus loin des explications au sujet de ce mot) à Jérusalem par les anciens et les apôtres réunis. Le problème venait de la région de Judée où se situe Jérusalem. C’est donc au point d’origine que fût réglé le problème. Ensuite, une lettre rédigée lors de cette réunion circula pour informer les communautés de la solution proposée. Le problème ne touchait pas une seule communauté, mais potentiellement l’ensemble des communautés. C’est ce qui explique l’aspect extraordinaire de cette réunion.

L’autorité centrale est donc Jésus, Sa parole est notre référence, le St-Esprit est notre guide et l’Église est le Corps de Christ.

Scott Peck résume un peu les choses de cette façon, à la page 86 de son livre :

« …des gens en conflit se disent… “Si nous sommes capables de résoudre nos conflits, un jour alors nous serons capables de vivre au sein d’une communauté.” Mais se pourrait-il qu’il faille voir les choses complètement à l’opposé ? Et que le véritable rêve s’énonce ainsi : “Nous pourrons résoudre nos conflits si nous pouvons vivre au sein d’une communauté” ? »

À la page 106 de son livre, Scott Peck a écrit ceci :

« La dynamique fondamentale de la pseudo-communauté est d’éviter les conflits. En soi, l’absence de conflits au sein d’un groupe n’est pas un diagnostic. Les communautés authentiques peuvent avoir d’agréables et parfois de longues périodes exemptes de conflits. C’est qu’elles ont appris à composer avec les conflits plutôt qu’à les éviter. La pseudo-communauté évite les conflits ; la véritable communauté les résout. »

L’éuD n’était pas un groupe parfait, loin de là. Mais cela ne suffit pas pour la commenter ou pour savoir si elle était vraiment l’Église de Dieu ou pas. Ce à quoi sert cette reconnaissance d’imperfection de l’Église de Dieu est seulement pour dire que si l’on cherche un groupe parfait composé de gens parfaits, on ne trouvera pas l’Église de Dieu, comme celle du NT.

• Des solutions

On enseignait, dans l’éuD, l’analogie de l’apôtre Paul concernant le Corps de Christ : il y a la tête, les yeux, les mains, les pieds, etc. (I Cor. 12:12).

À la tête, il y avait les anciens. Eux, ils pouvaient penser, décider et trancher sans tenir compte de ce que les autres parties du corps pouvaient penser. Après tout, il n’y a que la tête qui pense, n’est-ce pas ? Nous, nous pouvions exécuter sans nous poser trop de questions. En haut la tête, en bas les pieds. De là à dire que les pieds n’ont pas de tête, il n’y a qu’un pas que les pieds pouvaient rapidement franchir. On peut bien en rire un peu…

C’était par un usage tordu de cette Écriture, entre autre, que ceux qui clamaient leur devoir d’autorité justifiaient leurs positions et leurs décisions. Leur manquer de confiance était, selon une grande partie d’entre eux, une preuve de rébellion, de fort mauvaise attitude ou de manque de foi en Dieu.

La considération, la reconnaissance des dons, les services rendus par les membres doivent être des choses naturelles, reconnues et appuyées par la communauté.

Nous le savons : au sein de l’éuD, la plupart du temps, des suggestions et des solutions concernant le fonctionnement de l’église ne pouvaient pas venir des « membres ». Le « pouvoir » ou le leadership n’étaient pas partagés. En passant, le mot membre ne semblait pas s’appliquer de la même façon à certains anciens qu’à la majorité, comme s’ils se plaçaient au-dessus des autres membres de l’église.

Les dons des membres n’étaient pas assez mis à profit (sauf les dons monétaires), ils n’étaient pas assez recherchés, enseignés ou encouragés. L’autoritarisme et le dogmatisme étaient choses courantes. L’éuD se comportait comme une secte ; son sectarisme et son totalitarisme nous semblent évidents aujourd’hui. Comme le mot secte nous faisait horreur à l’époque ! Quelle inconscience nous animait ! Que Dieu nous garde de ce piège et des autres qui pourraient nous guetter !

Les solutions aux problèmes étaient mises en place et autorisées par certains des anciens. Aujourd’hui, il apparaît évident qu’une bonne partie d’entre eux ne nous faisaient pas confiance.

C’est Jésus qui est la Tête du Corps de l’Église (Col. 1:18). Prendre le contrôle de l’Église (ou de ses membres, ce qui revient au même) n’est ni plus ni moins que d’usurper l’autorité de Jésus en prenant la place de la Tête. C’est Lui qui place les membres là où Il les veut en leur donnant les dons qu’Il veut bien.

Lorsqu’un élément contrôlant décide de placer un membre ici ou là et de lui donner ou lui enlever une responsabilité, sans considération pour cette personne et sans considérer les besoins, la reconnaissance et l’appui de la communauté et sans la consulter, il peut facilement y avoir faute. Les « décideurs » ne devraient pas cacher leurs motifs et ne pas craindre de s’adresser à la communauté pour faire les meilleurs choix. Mieux encore, les décisions prises en communauté sont les plus susceptibles d’être sages et de porter de bons fruits. Le contraire met en péril la communauté elle-même puisqu’elle y introduit un contrôle anti-communautaire.

En rapport avec les Écritures, j’en retire ceci : un enseignement apparemment supporté par un groupe  pourrait partiellement ou complètement être vidé de son contenu, détourné de son sens, comme on l’a vu dans l’usage souvent fait par l’éuD de l’analogie du Corps de Christ ; il y a aussi le verset disant : « Dis-le à l’Église » qui était utilisé pour lui faire prendre le contraire de son sens.

Je me permets d’énoncer une évidence : tous les appelés et baptisés sont des membres, quels que soient leurs titres et leurs fonctions.

Tous les membres ont une tête, mais ne sont pas à la tête. Chacun doit se servir de sa tête, apprendre à penser par et pour lui-même, en harmonie avec la communauté, conformément aux enseignements d’amour envers Dieu et le prochain. Nous avons tous le libre arbitre et devons nous en servir.

Cela est bien loin de ce que j’avais entendu dire par un pasteur qui était extrêmement fatigué d’entendre des membres dire : « Moi, je pense ceci ou cela. » Il trouvait que les membres n’étaient pas, et je cite : « …équipés pour penser » ! C’était une insulte à l’intelligence des gens et un manque de confiance flagrant en ceux qui sont appelés de Dieu. Cela pouvait installer un doute permanent et malsain au sujet de notre propre jugement, outil que l’on doit développer pour faire la part des choses, distinguer le bien du mal et « vérifier toutes choses ». Quelle tragédie que de rendre les gens dépendants du jugement d’une autre personne ! Cela explique en partie les longues files d’attente qu’il y avait dans l’église de Montréal pour « parler au ministre », à ce ministre, en l’occurrence. Une personne en visite à Montréal, membre d’une église hors Québec, m’a confié sa grande surprise face à ces files d’attente.

Je pense que l’on peut dire aussi que la confiance première va envers Dieu et en Son jugement. Dieu n’appelle-t-Il des « membres » que pour supporter l’œuvre financièrement parlant ou parce que chacun a sa place dans l’Église, au sein de la communauté, dans le Corps de Christ, avec son rôle bien à lui, distinct et complémentaire à celui des autres membres et des anciens ? Poser cette question, c’est un peu y répondre aussi. La confiance devrait aller dans ces deux sens : de tous envers Dieu et entre nous tous.

•  Le doute

Scott Peck exhorte dans son livre, à la page 244 :

« Pour autant que je puisse en juger, l’un des plus grands péchés commis par notre église chrétienne et pécheresse fut, tout au cours de son histoire, de décourager l’expression du doute. Ce faisant, la communauté de l’église s’est constamment aliéné des gens en pleine croissance spirituelle qu’elle a souvent condamnés à une résistance perpétuelle aux intuitions d’ordre spirituel. À l’inverse, l’église ne pourra jamais faire face à ce défi si elle n’en vient pas à considérer carrément le doute comme une vertu chrétienne ― pour tout dire, une responsabilité chrétienne. Notre croissance ne peut et ne devrait pas faire l’économie de cette remise en question. »

Il n’était pas de bon ton, pour dire le moins, d’avoir des doutes dans l’éuD, encore moins de les exprimer. Les personnes estimées fortes étaient celles qui ne doutaient de rien. On ne nous invitait jamais à exprimer nos doutes. Il n’y avait que les certitudes conformes aux enseignements reçus qui étaient bien accueillies. Cela nous permettait de poser des questions et les réponses que l’on recevait devaient dissiper les doutes. Revenir sur la question et/ou sur la réponse pouvaient être considéré comme une manifestation de mauvaise attitude. Et ça, c’était vivre très dangereusement, sur le bord de la porte.

C’est cela qui, très souvent, faisait dire aux non membres que nous étions victimes de lavages de cerveau. On nous appelait aussi des « armstrongistes ». Peu nous importait, puisque nous nous moquions bien de ce que les gens pouvaient penser de nous. Il nous était simple de rejeter ces choses du revers de la main en nous disant qu’elles n’avaient aucune valeur puisqu’elles venaient « du monde ». S’il était facile pour des gens de nous affubler de ce nom qui se voulait une insulte, il ne l’était pas pour eux de nous expliquer calmement en quoi nous nous trompions ou en quoi M. Armstrong était fautif. Si nous ne leur étions pas ouverts, il est aussi vrai que, très souvent, ils ne l’étaient pas pour nous démontrer ce en quoi nous aurions pu errer.

C’est trop facile de dire que quelqu’un s’est fait « laver le cerveau » et d’en rester là. C’est plus difficile de l’approcher respectueusement dans le but de l’aider vraiment, sans condescendance. Toutefois, il était plutôt ardu de nous approcher puisqu’il nous avait été inculqué que le « tentateur » pouvait se servir des gens pour nous détourner de la vérité.

De toute façon, il ne s’agit pas de nous soucier ou non de ce que les gens pensent de nous. Il s’agit de savoir si nous faisons la volonté de Dieu.

Les doctrines, ou ce qu’on nous disait être des doctrines, n’étaient pas des éléments dont on pouvait douter. Est-il étonnant que nous ayons pu nous sentir à l’étroit, par moments ? En tout cas, ce n’est pas la parabole de la porte étroite qui m’a permis de me sentir plus à mon aise, si on l’utilisait pour me commander de rentrer dans le rang sans mes doutes.

La définition suivante du doute exprime bien les choses : incertitude concernant quelque chose. Un membre incertain devant une autorité sans incertitude faisait figure de faible. Je me souviens d’une affirmation venant d’une autorité de l’éuD : « Le doute est un signe de non intelligence. » Le moindre doute pouvait faire se sentir idiot le plus brillant ou zélé des chrétiens. De chrétien, il devenait crétin.

Non seulement le doute doctrinal était proscrit, le doute de toute autre chose venant de l’éuD l’était aussi.

Pour se créer, subsister et prospérer, la communauté doit respecter, accueillir, considérer et aborder les doutes sans culpabilisation, ni menaces.

Manifester respectueusement un doute devant la communauté est un exercice salutaire, utile à tous les membres, source de discussion et d’approfondissement des Écritures, des occasions de cimenter les liens entre membres, un enrichissement collectif intense, des occasions de manifester des dons et que sais-je encore…

•  La pensée unique

Il fut un temps où je croyais en la pensée unique. Je pensais qu’il fallait trancher les choses nettement pour plaire à Dieu. Je me ralliais aux enseignements venant du ministère. Je réagissais mal aux idées différentes et je ne donnais aucun espace aux nuances.

La pensée unique était très à la mode dans l’éuD. Elle était favorisée et encouragée.

Maintenant, je pense qu’il y a tellement de choses que je ne sais pas que je ne peux me permettre d’être tranchant. Il vaut mieux, je pense, dire à Dieu et aux gens qu’on ne sait pas vraiment, après avoir fait des efforts de compréhension, que de se prononcer catégoriquement sur une chose qui serait nébuleuse ou qui serait comprise différemment par d’autres gens.

Chacun a le droit de penser ce qu’il pense, mais n’a pas le droit de juger celui qui pense différemment et le qualifier d’hérétique. Sous prétexte d’avoir une pensée pure et conforme à une compréhension « saine » de la Parole de Dieu, on peut vite devenir intolérant et être tenté de coller une étiquette, de harceler afin de forcer sa compréhension des choses et/ou d’exclure quelqu’un.

Un petit groupe de personnes et moi (environ huit personnes) avons récemment démarré une nouvelle communauté se réunissant dans nos maisons. Nous nous inspirons du fonctionnement de l’Église du NT et nous laissons Dieu nous diriger par Sa Parole que nous lisons à haute voie à chaque réunion. Nous étudions en groupe certaines doctrines qui nous touchent plus directement.

À ce jour, je n’ai pas vu une seule église qui permet ouvertement de ne pas avoir une pensée unique. Y en a-t-il ? Notre groupe naissant serait-il une exception ?

Dans notre groupe naissant, je pense que nous pourrions permettre des opinions différentes concernant la doctrine après avoir examiné les choses en groupe, sans être arrivé à une vision uniforme.

Jusqu’à un certain point, la pensée unique est rassurante. Mais, à la limite, elle finit toujours par heurter quelqu’un quelque part. La tolérance au sujet des croyances et des opinions n’est pas une chose qui nous a été enseignée. On nous a plutôt inculqué que la certitude est une obligation et que les zones grises du doute sont des lieux fort inconfortables, voire très dangereux. Combien d’églises se sont-elles formées sur des différences doctrinales ? Et qu’est-ce qui est à l’origine de ces dislocations si ce n’est l’intolérance face aux idées différentes ?

Je précise que la tolérance dont je parle est la capacité d’un individu à accepter une chose avec laquelle il n’est pas en accord. Il ne s’agit pas de l’acceptation de choses qui seraient contraires à la Parole de Dieu.

•  Les doctrines

Wikipedia (dictionnaire encyclopédique Internet) définit ainsi le mot doctrine : « Une doctrine (mot attesté en 1160, du latin doctrina, enseignement, théorie, méthode, doctrine) est un ensemble systématique de conceptions d’ordre théorique enseignées comme vraies par un auteur ou groupe d’auteurs. »

En ce qui nous concerne ici, la doctrine est ce qui enseigné dans la Bible. On peut considérer la doctrine dans son ensemble ou les doctrines comme les enseignements bibliques.

D’autre part, il y a l’interprétation que font les églises et les gens des enseignements. Cette interprétation dépend de plusieurs facteurs : connaissances, érudition, croyances de base, soumission à l’autorité, culture, références, préjugés, bon sens, etc.

Dans l’éuD, à partir de sa création jusqu’en 1995, une des doctrines de base était celle voulant que nous soyons encore sous l’Ancienne Alliance, sauf en ce qui concerne le système sacrificiel qui avait été, disait-on, aboli par le sacrifice de Jésus. Il y avait donc les fêtes, les dîmes, les commandements et les lois sur les viandes pures et impures qui étaient encore en vigueur, croyions-nous.

Coup de théâtre en 1995 : nous nous étions trompés… la Nouvelle Alliance est en vigueur et change tout notre système de doctrines. Plus rien n’est obligatoire. Les dîmes, l’observance des fêtes et du sabbat, les lois sur les viandes, toutes ces choses étaient maintenant révolues et pouvaient être ou non observées, à part les commandements renouvelés dans le NT. Le reste était devenu volontaire.

De nouveaux enseignements se sont ajoutés. L’un d’eux a créé de grandes controverses : la nature de Dieu. Cela a pu ouvrir la porte à ce qui est venu plus tard dans l’enseignement concernant la trinité.

Des membres étaient bouleversés. Selon certains, nous ressemblions de plus en plus à l’Église catholique. C’était très loin d’un compliment, bien entendu. C’était l’amorce de l’éclatement.

Tout au long des changements doctrinaux, la structure de l’éuD est restée la même. Tout venait d’en haut. Les doutes étaient tolérés, mais encore mal vus. J’ai quitté à ce moment, mais pas pour des raisons doctrinales ou à cause des changements.

Comment passer d’un mode de croyances à un autre en si peu de temps ? Un jour, on nous dit que la vérité est une chose et le lendemain, on dit que c’est autre chose. Tout venait d’en haut, de la part des mêmes personnes, avec la même structure d’autorité. Le système de croyances venait d’en haut de la pyramide d’autorité de l’éuD. On nous disait, en quelque sorte : « Voici ce en quoi vous devez croire, maintenant. »

Or, la confiance dans les leaders de l’église avait été minée. Comment être sûr que ces gens ne se trompaient pas dans ces changements importants ? Était-ce par l’étude de la Bible, selon le plan suggéré venant des mêmes dirigeants ? L’interprétation du Livre qui avait servi à établir le premier mode de croyances pouvait-il servir à renverser ce mode et en établir un autre ? Les personnes qui étaient prêtes à nous exclure, peu de temps auparavant, si nous ne croyions pas en leur première interprétation étaient-elles assez crédibles pour nous enseigner une autre façon de voir les choses ? Je trouve qu’il y avait là une grande absurdité. De plus, rien ne s’est fait de façon communautaire à ce moment.

Cette façon d’établir un nouveau mode de croyances était vouée à l’échec pour de nombreux membres, on aurait dû s’en douter. Certains ont quand même intériorisé les nouveaux enseignements, les ont acceptés comme doctrine. D’autres n’ont pas pu et ont cherché à s’assembler avec ceux qui partageaient leurs croyances. Plusieurs ont abandonné toute appartenance. De part et d’autre, les jugements envers ceux qui ne partageaient pas leurs croyances pouvaient être sévères. Cela a brisé des relations, des amitiés. Cela a brisé le momemtum de la mission du groupe.

Wikipedia définit ainsi le mot croyance : « Dans son sens le plus courant, croyance est un terme qui s’applique à l’adoption d’une vision du monde qui n’est pas fournie par l’expérience ou la science, mais par les échanges entre divers individus ou par divers textes dogmatiques. Ainsi, la croyance est l’attitude de l’esprit qui affirme, selon des degrés plus ou moins grands de possibilité, la vérité ou la réalité d’une chose, sans pouvoir fournir de preuve, ni qu’il soit possible de pouvoir fournir la preuve de sa fausseté. »

Il ne semble pas possible qu’il puisse y avoir de croyances sans interprétations. Lorsqu’une croyance est énoncée et publiée officiellement, les membres du groupe peuvent décider de l’examiner ou non. Ils peuvent l’accepter ou la rejeter. Ils peuvent se dire que c’était mieux avant pour toutes sortes de raisons.

Il y avait beaucoup de certitudes dans l’éuD. On ne peut passer d’un mode de croyances à un autre rapidement sans qu’il y ait des incertitudes. Personne n’avait été formé pour vivre avec les doutes qui sont apparus. Une bonne partie des membres et des ex-membres étaient bouleversés parce qu’ils avaient des doutes et qu’ils n’avaient aucune idée de ce qu’ils devaient en faire.

Scott Peck explique, à la page 269 de son livre :

« Ceux qui cherchent les certitudes, ou qui proclament la certitude de leur savoir, sont incapables de tolérer l’ambiguïté. Le mot “ambigu” signifie “incertain”, “douteux”, ou “susceptible de revêtir plus d’un sens”. Parce que cela signifie qu’on ne sait pas ― et peut-être qu’on ne sera jamais capable de savoir ―, notre culture a beaucoup de difficulté à tolérer l’ambiguïté […] Nous commençons (lorsque le groupe est devenu une communauté) à comprendre que tout n’est pas “blanc ou noir”, que les choses ont plusieurs dimensions, souvent des significations contradictoires. Voilà pourquoi les mystiques de toutes les cultures et de toutes les religions parlent en termes paradoxaux ― non en terme de “soit l’un/soit l’autre”, mais en termes de “à la fois l’un et l’autre”. La faculté de tolérer l’ambiguïté et de penser de façon paradoxale est une des vertus du vide en même temps qu’elle est un préalable à l’avènement de la paix. »

L’éuD avait un énoncé de croyances dans les derniers temps où j’étais membre. Il était sensé contenir des doctrines de base. Il a changé au fil du temps. Les croyances de base ont changé. Un changement et hop, un nouvel énoncé !

La compréhension des choses évolue avec le temps et c’est normal. Il existe ce qui s’appelle une « révélation progressive ». Un énoncé, en ce qui me concerne, fige les croyances dans le temps, jusqu’au prochain. C’est un non-sens, pour moi, de produire un énoncé en disant que cela représente les croyances ou La croyance, puisqu’elles évoluent avec le temps. Même si la vérité ne change pas, sa compréhension et ses implications peuvent évoluer. Tout est dans la Bible. L’énoncé de croyances est là. Il me semble que l’on peut discuter de notre compréhension des choses. Il s’agit d’une compréhension, pas d’une condition pour être sauvé.

Certains ressentent le besoin de se distinguer des autres groupes en utilisant un énoncé de croyances. Je ne ressens pas ce besoin. D’autres se sentent rassurés par un énoncé, je pense. Je ne suis pas de ceux-là. Au contraire, un tel énoncé me mettrait mal à l’aise. Par contre, j’imagine qu’un énoncé de pratiques et de mission pourrait être utile au groupe.

La Bible recèle des trésors qui nous sont révélés au fil du temps. Je ne pense pas que je me sentirais à l’aise que notre communauté mette par écrit ses croyances. Toutes les personnes qui la composent se sentiraient obligés d’y croire. Ce n’est pas à l’énoncé auquel je voudrais me référer, c’est au manuel qui nous est commun, écrit depuis longtemps, c’est à l’Esprit qui agit en nous. C’est l’amour qui témoigne de qui nous sommes, pas nos croyances.

Un des effets pervers d’un énoncé de croyances est le sentiment d’obligation de croire en son contenu pour faire partie du groupe, comme si c’était une liste de conditions. En ce sens, l’énoncé prend plus d’importance que le livre qui est sensé l’inspirer. C’est donc pour moi un sérieux effet réducteur qui ne m’inspire pas du tout.

Si un énoncé de croyances était fait, je pense qu’il devrait refléter les compréhensions différentes existantes dans le groupe. Je pense qu’il devrait aussi, dans son préambule, exposer clairement la notion de compréhension et préciser qu’il ne s’agit pas de dogmes.

Autre chose : dans l’éuD, il me semble que la notion d’unité était confondue avec celle d’uniformité. Nous devions tous croire dans les mêmes choses et obéir à un chef humain, en croyant que c’était faire preuve de soumission envers Dieu et d’unité. C’était un détournement de l’autorité de Dieu et c’était de l’uniformité.

On nous citait à ce propos la soumission de Josué envers Moïse. Il était un exemple à suivre, un modèle. En étant soumis comme lui à l’autorité, nous étions soumis à Dieu. Cela semble raisonnable, mais il y a de grandes nuances à faire. Moïse était vu directement par tout le peuple au quotidien et tous savaient que Dieu l’avait choisi, sans aucun doute possible. Moïse ne commettait aucun abus et le seul qu’il a fait a été jugé par Dieu comme devant l’empêcher d’entrer en terre promise (Nb 20:12). Cela montre à quel point Dieu ne badine pas avec la question de l’autorité, non ?

Il faudrait être un peu ou très naïf pour croire que Moïse, d’une part, et n’importe quel leader religieux, d’autre part, seraient aussi légitimes l’un que l’autre. Comment arriver à les comparer, sans étirer l’élastique jusqu’à ce qu’il se brise ?

Jusque dans les années 1970, M. Armstrong (dont je parle plus loin) a fait plusieurs prédictions reliées aux temps de la fin et à la grande tribulation. Il est un fait indéniable que ses prédictions (ou prophéties) ne se sont jamais accomplies, comme dans d’autres confessions religieuses. Il est pourtant clair qu’on ne doit pas essayer de prédire l’avenir, il me semble.

Waterhouse, un évangéliste dans l’éuD qui allait dans toutes les assemblées de l’éuD de par le monde, a comparé M. Armstrong, après sa mort, à Moïse et son successeur, M. Joseph W. Tkach, à Josué. Il avait pourtant dit que si M. Armstrong mourait avant la grande tribulation, ce serait une preuve qu’il était un faux prophète. M. Waterhouse changea donc d’avis et récupéra la mort du « chef » à l’avantage de l’éuD. Comme on le dit dans des circonstances semblables : « C’est n’importe quoi ! »

Il n’y a pas que les questions doctrinales qui puissent contribuer à l’éclatement d’un groupe et aux désaffections religieuses, il y a aussi l’abus spirituel.

•  Abus spirituel

Je commencerai à commenter cette section en énonçant une constatation évidente : tous les abus spirituels que j’ai connus ont été commis par des individus et non par une communauté. Il ne m’est jamais arrivé, pas plus qu’aux membres que je connais, d’avoir eu à vivre des abus et des injustices par décision de l’église réunie (la communauté).

De nombreuses décisions importantes et fâcheuses ont été prises par des personnes en autorité derrière des portes closes. Leurs motivations et les sources de leurs choix n’étaient pas dévoilées aux « membres », comme si ces choses n’étaient pas de nos affaires. Qu’un membre soit mis à la porte, qu’un autre soit menacé de l’être parce qu’un ministre interprète mal ce qu’il veut faire, qu’un autre soit mis en probation, que le baptême soit refusé à quelqu’un, qu’un ministre soit déplacé sans qu’il y ait une véritable urgence, qu’un ministre expérimenté soit écarté volontairement de ses fonctions, qu’un mariage ou un divorce soient acceptés et d’autres refusés, qu’un ministre traite mal des membres, ces choses et tout le reste se passaient comme si nous n’étions que les employés d’une compagnie, sans aucun égard pour nos sensibilités, nos besoins, nos opinions, enfin, sans considérer tout ce que Dieu avait placé en nous. L’obéissance était la valeur la plus importante, semble-t-il. Parfois, la seule.

« L’église n’est pas une démocratie », nous disait-on pour justifier ces comportements. Aujourd’hui, je répondrais ceci : « Qu’est-ce donc que l’Église ? Est-elle une dictature dont vous seriez un des maîtres ? Ne devrait-elle pas être une communauté, comme celle du NT ? Qui êtes-vous pour contrôler le groupe et les membres de l’Église de Dieu ? » Mes questions me vaudraient de me faire mettre à la porte. Et là je dirais : « Qui êtes-vous pour vous opposer à Dieu ? Jésus n’a-t-Il pas dit : « Tous ceux que le Père me donne viendront à moi, et je ne mettrai pas dehors celui qui vient à moi » ?

C’est bien le fun d’avoir de bons mots une quinzaine d’années après…

Si ma constatation au sujet des abus est évidente, elle n’en est pas moins importante. La solution à l’abus spirituel, à l’autoritarisme, au totalitarisme et au dogmatisme passe par la communauté. Comment pourrions-nous démarrer un groupe dont les structures seraient pareilles ou très proches de celles que nous avons connues, sans tomber dans les mêmes erreurs, panneaux et abus ? Je crois que cela serait impossible, malgré toute la bonne volonté possible. Ce serait une erreur de nous penser meilleurs que les autres. Un fonctionnement communautaire protège des abus.

Il me semble légitime de souhaiter faire partie d’un groupe où nous aurions l’assurance de ne pas vivre d’abus comme nous en avons vécus dans l’éuD. Les choses se passaient dans ce groupe comme si aucun recours n’était possible. Il était pourtant bien possible et avait été institué par Christ, mais il n’était pas appliqué.

Il ne s’agit pas de s’imaginer qu’une communauté ne connaîtra jamais de problèmes. Toutefois, étant une communauté, elle reçoit de Dieu ce qui lui est nécessaire pour les régler. Toute la communauté retire un bénéfice de régler en commun les problèmes qui la concernent. Lorsque l’on traite sans fin les gens comme des enfants, sans confiance, le groupe et ses membres ne progressent pas, ou progressent moins qu’ils ne pourraient. C’est une forme d’abus que de priver les gens de ce qui touche leur croissance au sein de la communauté.

Lorsqu’une personne prend sur elle ce qui appartient à la communauté, elle lui nuit. Elle usurpe une responsabilité collective en en faisant une responsabilité individuelle. Une personne qui se croit capable d’être à la tête des membres doit être remise à sa place par la communauté avant qu’elle ne crée des problèmes.

Mon impression est que la structure pyramidale est propice aux abus tandis que la structure communautaire nous en libère. À mon avis, c’est à cause de la structure pyramidale que nous avons été privés des dons de nos sœurs et frères, que l’amour que nous aurions pu développer les uns pour les autres a été freiné et que l’église qui aurait dû être notre oasis de paix a été pour plusieurs un fardeau qui est devenu insupportable.

Une croyance populaire veut que tout groupe ait besoin d’un chef, visible et bien identifié. La communauté de l’Église a besoin d’un chef. Elle en a un, Il est connu, mais Il est invisible. Cela peut ne pas suffire à certaines personnes. C’est dommage pour eux et je ne sais quoi leur dire. Je ne pourrais plus faire partie d’un groupe dont le chef est un être humain faillible, comme tous les autres.

Au sein de l’éuD, nous nous moquions bien de la notion de l’infaillibilité du pape. Bien voyons donc, comment un homme peut-il être infaillible ? Il est d’une évidence criante que c’est impossible. Pourtant, dans l’éuD, nous nous contentions bien d’un chef humain et par conséquent faillible, alors que celui qui a fondé l’Église est immortel, infaillible et tout-puissant. C’était « pas catholique » et très catholique en même temps de penser comme nous pensions et de penser ce que nous pensions.

Quelle différence y avait-il entre M. Armstrong, avec ses délégués, et le clergé des grandes églises connues, au-delà des appellations et des soutanes ? Les deux règnent/régnaient en maîtres sur leurs groupes et pratiquent/pratiquaient l’élitisme, dont voici une définition : « attitude — politique ou culturelle — de clivage entre une classe dirigeante et une classe dirigée, qui ne prend pas en compte les préférences d’une majorité. » Je me souviens très bien que l’on ne nous demandait pas quelles étaient nos préférences dans l’éuD.

La Parole de Dieu n’appartient pas à un clergé et ce n’est pas à une élite à tout contrôler, croyant que ses talents lui en donne le droit ou qu’elle en aurait le devoir. C’est aux fruits qu’on reconnaît les chrétiens et ce qu’ils pourraient faire dans l’Église, mais cela ne devrait jamais aller dans le sens d’une autorité telle qu’elle était exercée dans l’éuD.

Dans l’éuD, on nous a souvent lu le passage d’Hébreux 13:17 : « Obéissez à vos conducteurs et ayez pour eux de la déférence, car ils veillent sur vos âmes comme devant en rendre compte ; qu’il en soit ainsi, afin qu’ils le fassent avec joie, et non en gémissant, ce qui ne vous serait d’aucun avantage. » En chaire, on faisait souvent des assemblages de versets pour nous convaincre et nous enjoindre d’obéir au ministère. On ne faisait pas le lien entre ces versets et les responsabilités individuelles et communautaires.

Sur un site Internet (http://www.croixsens.net/sermons/pasteurs.php) se trouve ce texte concernant la soumission :

« Pareillement, notre soumission envers ceux qui sont en autorité sur nous (Ep.5:20) est à l’image de notre soumission envers Christ, car c’est Christ qui habite dans nos pasteurs et qui nous dirige à travers eux.

« Si nous ne sommes pas soumis aux autorités visibles, c’est le signe que nous ne sommes pas soumis non plus à l’autorité invisible de Dieu sur notre vie.

« Nous pouvons donc évaluer notre soumission à Christ par notre soumission aux autorités qu’il a établies sur nous. »

Un peu plus loin, dans le même texte :

« Ce n’est pas qu’il faut suivre aveuglément tout ce qu’ils enseignent, l’église est appelée au discernement. 1Th.5:19-21 (“N’éteignez pas l’Esprit. Ne méprisez pas les prophéties. Mais examinez toutes choses ; retenez ce qui est bon ;”) mais c’est avec humilité qu’on doit apporter nos objections, s’il y a lieu, avec une attitude prête à être enseignée. »

On parle peu ou pas de la soumission du pasteur à Dieu. On ne parle pas de la possibilité d’abus et du rôle de la communauté. On ne parle pas des instructions importantes de Matthieu 18. On ne parle pas non plus de la responsabilité de lier et de délier qui a été confiée à la communauté comme au ministère.

Dans ce texte, les choses sont présentées comme si chaque difficulté était d’ordre individuelle seulement et devait être abordée seul à seul avec le pasteur. On ne parle pas de témoins ni de l’appel à l’Église qui a été institué par Christ. Malheureusement, sans les témoins et la communauté, les possibilités d’abus et d’erreurs demeurent.

• Mission

En voici quelques définitions prises sur Internet :

Charge donnée à quelqu’un de faire une chose.
Fonction temporaire dont un gouvernement charge un ou plusieurs agents spéciaux.
Les personnes chargées de cette fonction.
But, objectif que l’on s’efforce d’atteindre.
Suite de prédications, de conférences religieuses.
Établissement de missionnaires chrétiens.

Une mission peut être une chose personnelle, de couple, de groupe et/ou communautaire. Elle peut être décidée, suggérée, inspirée ou imposée.

Je trouve logique que si une communauté adopte une mission, elle le fait volontairement. Une personne ne peut imposer une mission à une communauté puisque, par définition, une communauté ne se soumet pas à  l’autorité d’une personne, mais prend ses décisions par consensus.

Que dire alors d’un sentiment de mission intense, urgent, ressenti comme une obligation par une personne ? Il m’est impossible de  répondre à cette question trop personnelle par une affirmation générale. Toutefois, je pense que l’urgence s’applique d’abord à la personne concernée. Et elle doit prendre garde de ne pas interpréter cette urgence dans un sens qui s’oppose au principe de la communauté, outil privilégié créé par Christ.

Dans l’éuD, la mission générale était de proclamer la bonne nouvelle à travers le monde. Nous avions, par M. H. W. Armstrong, l’impression de comprendre ce qu’était l’Évangile et une façon de voir comment il devait être prêché dans le monde et auprès des chefs des nations.

Il n’était pas question de remettre en question cette mission, ni dans sa définition ni dans son interprétation. De toute évidence, rien de cela n’était communautaire.

Il y avait quand même des personnes « volontaires », les membres de l’église, se considérant des appelés de Dieu, pour assister les personnes « en charge » dans l’exécution de cette mission. Pendant que j’étais membre, il ne m’est jamais arrivé de douter de cette mission.

Aujourd’hui, j’aurais un esprit plus critique. J’étudierais le sens du mot « Évangile ». J’étudierais le sens du mot « proclamer ». Je réfléchirais sur le sens de ma participation. Je considérerais la structure du groupe.

J’aurais besoin que les personnes avec lesquelles j’en discuterais fassent preuve d’ouverture et ne me donnent pas le sentiment de m’imposer leur point de vue. J’aurais besoin de me sentir libre et d’avoir envie de participer. J’aurais besoin de ne pas ressentir un fardeau supplémentaire et de sentir que mes sœurs et frères ne se sentent pas accablés par la mission ou par les sentiments d’une personne, aussi bien intentionnée soit-elle, qui pousse fortement sa vision de la mission du groupe. J’insisterais sur la communauté.

Il est prématuré, dans ma compréhension des choses, de discuter d’une mission chrétienne, aussi noble soit-elle, avant que le groupe devienne une communauté.

Je me sens très inconfortable avec ce qui a été énoncé par un des initiateurs d’un groupe comme ce qui devrait être notre mission, c’est-à-dire d’aller vers nos anciens sœurs et frères de l’éuD qui sont sans appartenance, pour inviter ceux qui aimeraient en avoir une en rappelant à l’ordre ceux qui « vivent dans le péché » et afin de vivre ensemble l’amour de la vérité.

D’abord former une communauté, et la mission lui sera révélée après par Jésus-Christ. Comment savoir à ce stade-ci, c’est-à-dire, avant de former une communauté, quelle devrait être sa mission ? Comment savoir d’avance ce que Dieu voudra nous inspirer en tant que groupe ? Nous ne pouvons pas préméditer de ce que Dieu fera de nous. Nous devons attendre la manifestation de Sa volonté au sein du groupe.

Pour cela, il faut croire que Dieu est capable de travailler au sein d’un groupe et avoir la patience d’avancer comme Il le souhaite.

Nous savons déjà ce que certains au sein du groupe pensent au sujet de leur vision d’une mission. Ce n’est pas parce que le livre d’Aggée parle de la reconstruction du temple et que l’amour de la vérité est annoncé avec force dans toute la Bible, surtout dans le NT, que la mission devient automatiquement claire et nette pour tous. Chacun vit son cheminement à sa vitesse et personne ne peut juger des motivations profondes des autres ou de leur absence apparente.

Le livre d’Aggée peut être vu de différentes façons. Une de celles-ci pourrait être en rapport direct avec la communauté : la reconstruction du temple comparée à celle de la construction de la communauté de l’Église. … Est-il possible que je voie dans ce livre ce que je souhaite bien y voir ?

• Allergie

Les abus dont j’ai fait l’objet et ceux qui m’ont été racontés par des sœurs et frères dans l’église ont créé en moi un état que je qualifierais de conscience aiguë à propos des sujets d’ordre spirituels et religieux.

Je ne fais plus taire mes sentiments et mes perceptions sur les choses d’ordre spirituel. Je n’essaie plus de tout rationaliser en fonction d’une croyance, de la doctrine d’une église ou du jugement d’une personne, fût-elle considérée sage. Je ne me laisse plus manipuler ou influencer outre mesure par des perceptions ou des interprétations.

Ce que j’entends dire à propos de la religion, de la spiritualité, d’une mission ou sur une perception me concernant crée en moi une réaction comparable à une allergie, au point où, peut-être, certaines bonnes choses pourraient être mise en veilleuse. Je dois les analyser à tête reposée, les laisser mijoter doucement en moi et les laisser faire leur chemin. Je me suis rendu compte qu’il est facile de se tromper avec une Bible en main ou d’être trompé, même par des personnes bien intentionnées.

Les choses venant de Dieu qui passent par mon cœur sont aussi filtrées par mes expériences, soupesées, réfléchies et méditées. Je ne suis pas naïf au point de penser qu’il devient alors impossible que je me trompe, ou que j’atteins toujours cet idéal d’agir au mieux.

L’enjeu ici est très important pour moi et pour toutes les personnes du groupe. Il risque de changer dramatiquement ma vie et je ne m’engagerai pas à la légère. Je pense avoir une bonne idée de ce que veut dire donner sa vie à une cause ou s’engager dans une entreprise comme celle d’une communauté chrétienne. Je ne supporterai pas sans protester de ressentir une pression et si je ne me sens pas respecté, je me retirerai. Mais il me semble que cela ne pourrait pas arriver au sein d’une communauté.

• Structure et leadership

L’éuD avait une structure hiérarchique pyramidale. Il y avait un leader international ; c’était le fondateur du groupe, M. Herbert W. Armstrong. Il constituait l’autorité centrale, était le pasteur général et avait accepté le titre d’apôtre que lui avait donné une personne de son entourage. Il arriva un temps où il se dit le seul apôtre de notre époque et il prenait les décisions concernant l’église ; il se voyait comme celui devant trancher au sujet des croyances et des doctrines ; il prenait les décisions quant à la façon de prêcher l’évangile ; il procédait aux ordinations des évangélistes qui ordonnaient les pasteurs, qui ordonnaient les anciens locaux, qui ordonnaient les diacres… c’était à peu près comme ça.

Voyant sa fin approcher, M. Armstrong a désigné son successeur, M. Joseph W. Tkach. Celui-ci a procédé à une réforme majeure dans l’église, concernant les alliances, ce dont j’ai parlé plus tôt.

Il y avait un journal réservé aux membres de l’église, le Worldwide News. Il y a eu en page titre d’un de ses numéros un schéma de structure, telle que perçue par M. Armstrong. Tout en haut, il y avait Dieu le Père. Sous lui, il y avait Jésus-Christ. Sous Jésus, il y avait lui-même. Sous lui, les évangélistes et sous eux, les pasteurs. Ensuite, il y avait les anciens locaux, puis les diacres et enfin, tout en bas de la structure, les membres.

Je ne me souviens pas des détails, mais il devait être question d’une structure d’autorité et administrative. Il ne s’agissait pas d’introduire des intermédiaires entre Dieu et les hommes, enfin j’espère.

D’autre part, dans la vie de l’église, le pasteur général se voyait en autorité sous Jésus. Il déléguait une autorité aux évangélistes qui en déléguaient aux pasteurs. Tous ces gens avaient de l’autorité sur les « membres ». Cette structure semblait légitime, mais l’était-elle vraiment ? Cette « autorité » sur les membres n’était pas seulement administrative.

Lorsqu’il s’agissait de se soumettre à Dieu ou de chercher à appliquer les Écritures, pourquoi fallait-il en parler au pasteur ? Pourquoi ne pouvait-on pas en parler à l’église, c’est-à-dire aux membres, sans être soupçonné de chercher à créer des troubles ou d’être un rebelle ? C’est que nous n’étions pas la communauté de l’Église. On voulait contrôler ce qui se passait, craignant quelque chose. Le pasteur était, soi-disant, le gardien de la paix, le bon berger, comme Christ L’est sur toutes les brebis. Or, lorsqu’un pasteur empêche les membres de se parler, craignant qu’ils ne se rebellent ou que des troubles n’éclatent, il y a un problème. Les brebis sont-elles « bêtes » à ce point qu’elles vont assurément faire du trouble si on les laisse libres de s’exprimer ? N’y a-t-il que le pasteur qui possède assez de sagesse pour juger de ces choses ? Les brebis manquent-elles à ce point de jugement qu’on ne peut leur faire confiance ?

Ce n’est qu’une analogie, mais, dans les champs, les bergers n’empêchent pas les brebis de bêler. Ils les écoutent et sait que leurs « voix » peuvent lui dire quelque chose. A-t-on déjà vu un berger museler une brebis ? Le berger se méfie des loups, pas des brebis. Il devrait savoir distinguer les unes des autres. Mais ce ne semblait pas être le cas dans l’éuD.

Malgré cette crainte des troubles dans l’église et toute la soi-disant prudence pour y faire face, on ne les empêchait pas totalement d’arriver… et on en créait d’autres ce faisant. Dans ce contrôle, les membres ne gagnaient pas en expérience, ils n’évoluaient pas comme ils auraient dû. Comme le dit Scott Peck, « la pseudo-communauté évite les conflits ; la véritable communauté les résout. »

Ce tableau publié dans le Worldwide News faisait état d’une perception de l’autorité et de la soi-disant légitimité de M. Armstrong et de ceux qu’il avait choisis pour diriger l’église. Comme je l’ai vu peu de temps avant mon départ de l’éuD, il s’agissait, dans cette structure hiérarchique, bien plus d’être soumis aux humains qu’à Dieu. J’ai eu beau me baser sur les Écritures, sur des ordres textuels de Jésus pour faire face à un conflit, on m’a empêché d’aller jusqu’au bout, sans justifier ce refus d’aucune façon. Cela n’aurait pas pu arriver dans une communauté.

Un égarement temporaire est humain. Voilà pourquoi Dieu nous a donné un livre d’instructions appelé la Bible pour corriger l’égarement. Il y a un problème majeur lorsqu’une personne, en autorité ou non, refuse de se laisser corriger par cette même Bible qu’il accepte et/ou enseigne pourtant comme étant la Parole de Dieu. Lorsque cela arrive, c’est tout le groupe qui souffre de l’égarement de son leader. Il faut examiner toutes choses et cela inclut le travail fait par les anciens.

Armstrong avait l’habitude de toujours signer ses lettres et articles par « Au nom de Jésus-Christ », comme si ce qu’il disait venait de Dieu. C’était usurper le nom et l’autorité de Dieu.

Tant qu’on pourra très clairement identifier un « chef » très contrôlant et bien visible sous Jésus, je ne me sentirai ni à ma place, ni en sécurité.

L’Église relève de l’ordre spirituel. Devrait-on pouvoir l’identifier comme si c’était un bâtiment ou comme un groupe dont le chef humain est bien en évidence, comme si c’était son groupe ? Le Chef, c’est Dieu. Si on peut identifier un autre chef, ce n’est pas l’Église de Dieu, d’après ce que je sais, puisque son chef n’est pas Dieu.

On dit aujourd’hui : « De quel groupe s’agit-il ? » Et on répond : « Il s’agit du groupe de M. Meredith… de M. Flurry, etc. » On ne dit pas que MM Meredith et Flurry font partie d’un groupe, on dit que ce sont leurs groupes.

Cela ne rend pas l’Église de Dieu facile à trouver selon les standards humains. Mais qui se soucie des standards humains à ce sujet ?

Le thème de l’allégeance à un leader a été abordé dans les Écritures : l’un se réclamait d’un certain apôtre tandis qu’un autre membre voulait être associé à un autre. Le Corps de Christ n’est pas ainsi divisé. C’est l’Église de Dieu, ne l’oublions pas. Si ce n’est pas le Corps de Christ qui constitue la structure, ce n’est pas l’Église de Dieu.

Il ne suffit donc pas de dire qu’un groupe est l’Église de Dieu. Si elle est soumise à un chef humain, ou à des chefs, comme l’était l’éuD, si sa structure est hiérarchique comme elle l’était, elle aura beau croire et se prétendre être l’Église de Dieu, elle se trompe.

Voici ce que Scott Peck dit au sujet des expériences communautaires qu’il a vécues :

« En tant que chef d’un groupe, j’ai découvert que ma fonction est terminée dès que le groupe forme une communauté. Je peux alors m’asseoir, me détendre et n’être qu’une personne parmi d’autres, pour la simple raison qu’une autre des caractéristiques de la communauté est le caractère entièrement décentralisé de l’autorité. Rappelons-nous que la communauté est par essence anti totalitaire. Ses décisions s’obtiennent par consensus. On dit souvent que les communautés sont des groupes sans chef. Mais il est plus précis de dire que la communauté est le groupe de tous les chefs. Dans la communauté, qui est un endroit sûr, les leaders nés se sentent libres ― souvent pour la première fois de leur vie ― de ne pas mener. Et ceux qui sont habituellement timides ou réservés se sentent libres de mettre de l’avant leurs qualités de leadership jusque-là tenues en veilleuse. Il en résulte que la communauté est le corps décisionnel idéal. »

Dans une communauté de l’Église de Dieu, il ne peut être question de se trouver « sans chef », ni d’être « le groupe de tous les chefs ». Il est clairement établi que le Chef de l’Église est Jésus-Christ. N’oublions pas que M. Peck ne parle pas spécifiquement de la communauté du NT, mais des autres communautés non religieuses.

• La communauté

Une communauté est formée de volontaires engagés qui décident par consensus de la mission, du fonctionnement et des activités de leur  groupe. On y reconnaît les dons individuels et leurs manifestations est favorisée par le groupe. Tous y ont un droit de parole égal.

Dans la formation des groupes communautaires auxquels Scott Peck a participé, il a observé quatre étapes. Celles-ci sont :

–> La pseudo-communauté
–> Le chaos
–> Le vide
–> La communauté

Il serait trop long ici de donner tous les détails expliquant chacune des étapes. Le livre La Route de l’Espoir les explique en détail.

Je précise que la communauté dont il est question ici est celle de l’Église du NT. Il ne s’agit pas d’une commune, de communisme, d’habiter tous au même endroit, d’abandonner ses possessions, de quitter son emploi ou sa famille, de s’habiller tous de la même façon, de sortir nos enfants des écoles ou que sais-je encore. Il ne s’agit pas non plus d’une « communauté religieuse » comme on l’entend souvent au Québec, comme celles des Sœurs de la Providence ou les Frères de l’Instruction Chrétienne, par exemple.

Rien de ce qui touche à la communauté ne devrait se faire en cachette ou sans lui être soumis, cela est sous-entendu.

J’ai retenu quelques énoncés du livre de M. Peck :

–> Les membres ont appris à communiquer honnêtement entre eux.
–> Ils ont développé des relations allant au-delà d’une maîtrise de soi apparente et ainsi qu’un profond désir de « se réjouir ensemble, de souffrir ensemble », de « prendre plaisir à la compagnie des autres et de faire leur la condition d’autrui ».
–> La communauté est quelque chose de plus que la somme de ses parties, de ses membres individuels.
–> La communauté fait et doit faire preuve d’ouverture.
–> Le pire ennemi de la communauté est l’exclusion.
–> L’ouverture n’est jamais totale. Les communautés à long terme luttent inévitablement pour déterminer leur degré d’ouverture.
–> C’est un groupe qui a appris à transcender ses différences individuelles.
–> Elle encourage les expressions de l’individualisme et ne peut jamais être totalitaire.
–> La véritable communauté est immunisée contre la psychologie de masse, parce qu’elle encourage l’individualisme et fait place à un éventail de points de vue. Un phénomène de psychologie de masse ne peut avoir lieu dans un environnement où les individus sont libres de dire ce qu’ils pensent et de nager à contre-courant.
–> Des décisions réalistes sont plus susceptibles d’être prises dans une communauté que dans tout autre environnement humain.

• Consensus

Ce qui suit est extrait du site Internet de Wikipédia, à l’article Consensus :

« Un consensus est un accord général (tacite ou manifeste) parmi les membres d’un groupe, pouvant permettre de prendre une décision sans vote préalable. Bien que le consensus désigne un accord unanime (ou plutôt, l’absence d’opposition), l’usage récent en fait parfois l’opinion ou le sentiment d’une forte majorité. Le consensus comme méthodologie de prise de décision cherche à mettre l’accent sur la validité de l’opinion de chaque participant et se refuse à entériner un choix qui n’aurait pas au moins l’accord de tous.

« Consensus et pensée collective

« De nos jours, on confond souvent consensus et “choix collectif”. Il existe des degrés de variation toujours possibles entre individus, et il doit y avoir une implication individuelle forte pour faire suivre la prise de décision de l’action. Auquel cas, la prise de décision nécessite une négociation au bout de laquelle les autres participants au débat seront satisfaits.

« L’opinion collective n’est pas un consensus, mais une opinion reçue, un alignement sur une orthodoxie ― éventuellement à partir d’une manipulation mentale (gouroutisme) ou de la propagande. Des études sur les effets de groupes et des foules affirment l’existence des consensus émotionnels pouvant aller jusqu’à l’hystérie collective.

« Il existe plusieurs débats et recherches à la fois sur les notions d’intelligence collective et de prise de décision par consensus ― discutés dans d’autres articles. Cet article traite de l’idée de consensus dans son sens le plus strict, et non pas de ses implications en politique ou en économie (domaines dans lesquels non seulement le consensus importe mais également l’action subséquente).

« Consensus et dictature de la majorité

« Le terme consensus implique également des notions de compromis. Plutôt qu’une opinion adoptée par une majorité, le consensus suggère l’apport de multiples opinions différentes, et leur adaptation progressive jusqu’à ce qu’une solution satisfaisant le plus grand nombre de personnes puisse être dégagée. Le consensus ne signifie pas forcément que tout le monde est satisfait du résultat, mais suggère plutôt que tout le monde peut juger le résultat acceptable et que la majorité est satisfaite. On doit donc apporter un soin particulier à la définition de cette majorité représentative de l’ensemble, faute de quoi ce compromis peut s’éloigner de la réalité pourvu que le consensus se construise, au vu de la subjectivité de l’estimation de la “représentativité” de chaque personne. Ce type de consensus, limant les divergences au profit des similitudes, manifeste la justesse de l’opinion répandue. On peut considérer que le consensus se construit avec la loi de juste milieu (pris dans le sens d’un milieu acceptable pour les différentes parties). Certains considèrent alors que l’objectivité, si ce n’est la vérité, répond à la courbe de Gauss où les 20 % restant sont quantité négligeable et, de ce fait, inutiles à conserver. Ce type de solution est souvent appelé consensus, mais n’en est pas un à proprement parler.

« Plus généralement, on considère la prise de décision par consensus comme la recherche d’une solution de résolution, où le compromis doit être une proposition originale, qui tienne compte des positions de chacun et essaye de satisfaire tous les participants au débat. Ce type de compromis est nommé gagnant-gagnant. Chaque proposition doit être évaluée pour ce qu’elle est et non pour ce que chacun en imagine, l’imagination portant le plus généralement sur l’émetteur de la proposition.

« Certains considèrent que dans le cas où un compromis gagnant-gagnant ne peut être construit, on peut alors enregistrer les dissensions (ou dissensus) car elles sont considérées comme plus proches de la réalité décrite et susceptibles de faire avancer le problème. Cette solution peut satisfaire la majorité des participants au débat. D’autres considèrent qu’il s’agit alors d’un échec de consensus, car chacune des parties étant restée sur ses positions, le problème débattu n’est pas réellement réglé. Ceci dit, la recherche du consensus permet d’éviter que la majorité impose ses décisions à la minorité, puisque le veto permet à chacun de refuser une solution qui ne lui convient vraiment pas (à condition de ne pas en abuser, auquel cas c’est une autre forme de dictature de l’individu sur le collectif).

« Prise de décision par consensus

« Il y a de nombreuses façons, pour un groupe, de prendre des décisions, et aucune d’elles n’est parfaite. La plupart d’entre nous avons été élevés dans une culture qui considère que la démocratie occidentale est la meilleure, et que le vote est le seul pouvoir qui peut servir les gens. Il apparaît pourtant une grande désillusion quant aux potentiels de ce système pour une collégialité dans la prise de décision, et encore plus, à une plus grande échelle, pour changer quoi que ce soit dans le système. La démocratie devient le système qui permet soit d’élire un gouvernement, soit un exécutif ou comité de pilotage, qui prend toutes les décisions, et déçoit trop souvent.

« Habituellement, lors d’un vote démocratique, à n’importe quelle échelle, une minorité importante est mécontente du résultat. Et même si cette minorité accepte la décision prise, parce qu’elle accepte la “règle du jeu”, elle résistera activement ou essayera d’atténuer les conséquences de cette décision jusqu’au prochain scrutin.

« Le compromis est une autre méthode pour prendre une décision, habituellement par la négociation. Deux parties, ou plus, annoncent leur position respective et la changent petit à petit, par des concessions mesurées. La négociation peut conduire à une insatisfaction des deux parties, car personne n’est totalement satisfait.

« A côté de ça, le consensus est un moyen de prendre une décision qui fait appel à la créativité de chacun. C’est un processus dans lequel aucune décision ne peut être prise tant que tous les participants ne l’acceptent. Ça peut être long à mettre en place, car le consensus est le produit patient de toutes les meilleures idées et volontés dans un groupe, dans un esprit de cohésion et d’équilibre. Les minorités sont entendues au cours du processus, et pas seulement à la fin : la décision est élaborée collectivement.

« Mise en place du processus

« Il y a de nombreuses façons pour trouver un consensus, mais nous vous proposons cette procédure simplifiée, pour comprendre les mécanismes.

« Le problème, ou la décision à prendre, est défini et nommé. Cette étape préliminaire aide à séparer la problématique à traiter des enjeux personnels.

« Faire fuser toutes les solutions possibles (brainstorming) pour résoudre le problème ou répondre à la question. Les écrire toutes, même les plus folles.

« Se réserver un moment dans le processus pour les questions diverses et la clarification de la situation.

« Discuter et débattre des propositions écrites, les modifier, les regrouper, et en faire une liste, la plus courte possible. Lesquelles sont les préférées du groupe ?

« Bien expliquer toutes les propositions, et leurs différences pour que tout le monde comprenne bien (on peut utiliser là l’ancienne méthode qui consiste à donner un temps égal à quelqu’un qui est pour et quelqu’un qui est contre la proposition pour s’exprimer).

« Discuter les “pour” et les “contre” de chaque proposition. Faire en sorte que chacun puisse s’exprimer (tour de table, petits groupes…).

« S’il y a une opposition majeure, recommencer au point 6. Il est parfois nécessaire de recommencer au point 4.

« S’il n’y a pas d’opposition majeure, faire état de la décision et voir s’il peut y avoir un accord.

« Reconnaître les objections mineures et incorporer des petits amendements.

« Discuter de la proposition, et vérifier le consensus.

« Le droit de veto

« Le droit de veto, détenu par chacun sur une proposition du reste du groupe, est la pierre angulaire de la méthode du consensus. La “permission” de chaque membre du groupe est indispensable pour prendre une décision, c’est pourquoi écouter et répondre à tous les participants et prendre en compte tous les avis devient la préoccupation du groupe dans son ensemble.

« Ce qui fait que le résultat n’est pas seulement un groupe plus égalitaire, mais aussi un groupe plus “satisfait”, dans lequel chaque membre a une chance de se sentir important au sein du groupe. Les responsabilités sont mieux partagées, les membres sont plus réceptifs aux autres, et l’envie de faire des choses ensemble est partagée. Le veto sur une proposition qui a demandé de longues discussions et une synthèse ardue est un acte sérieux. Il peut être fait en ayant bien pesé le pour et le contre, comme un ultime recours, sur des bases éthiques, ou à cause des conséquences qu’une décision peut avoir. Il peut aussi être fait à cause d’une émotion forte (peur, dégoût), mais en aucun cas à cause de préférences personnelles ou d’impulsions égocentriques.

« Quand la prise de décision a fait son chemin, prenant en compte des opinions diverses, se modifiant, et que quelqu’un est toujours en désaccord avec la solution trouvée, il y a d’autres formes que le veto à envisager, qui ne contrent pas le processus. Par exemple, ne pas soutenir une décision : “Je ne ressens pas le besoin de ça, mais je peux quand même participer”. Ou encore rester réservé : “Je pense que ça peut être une erreur, mais je peux l’assumer”. Ou ne pas s’impliquer : “Je ne participerais pas, mais je n’empêcherais pas les autres de le faire”.

« Dans certaines descriptions du processus de prise de décision par consensus, la notion existe que quelqu’un qui sent le besoin de faire un veto sur une proposition devrait envisager de se retirer du groupe, au moins pour un temps. Or, cette idée tend à l’inverse extrême du but de la méthode : plutôt que d’encourager l’inclusion des opinions et des souhaits de tous, ceux et celles qui ont une opinion minoritaire risquent de se sentir obligés de s’exclure du groupe. L’éventualité d’une exclusion du groupe est, pour certaines gens, un mécanisme tout à fait opposé au principe d’inclusion de la méthode de consensus, tendant à exclure ceux et celles qui sont non conformistes, plutôt que d’encourager les critiques envers l’opinion majoritaire.

« Les prises de décision par de nombreuses communautés virtuelles suivent souvent ce type d’approche. »

• Hiérarchie anti-communautaire

J’ai quitté l’éuD en 1995, lorsque je me suis buté à sa structure hiérarchique. Les choses se sont passées comme si j’avais commencé à aspirer à la communauté, sans trop m’en rendre compte.

En 1995, je vivais une situation conflictuelle. Pendant des années, nous avions entendu prêcher dans l’éuD que nous devions, en tant que chrétiens, d’abord essayer de nous entendre entre nous, sans impliquer une autre personne. Si cela ne fonctionnait pas, chacun devait alors prendre une ou deux personnes, des témoins, et tous nous réunir pour discuter des problèmes et de leurs solutions. Si cela ne fonctionnait toujours pas, la prochaine étape était de le dire à l’église (Matt. 18).

Je voulais appliquer cette démarche, même si cela ne s’était jamais fait pour le type de problème que je vivais. Le verset auquel je fais référence ne parle pas d’exceptions au niveau du type de problème et ne distingue pas des situations ou des personnes qui en seraient exemptées.

J’ai expliqué mon idée au pasteur local qui semblait la trouver intéressante, en tout cas au moins assez pour en parler à son supérieur. C’est ce dernier qui a empêché que le principe soit appliqué.

C’était rater une belle occasion de pratiquer ce processus commandé par Jésus-Christ. C’est cela qui a scellé mon départ de l’église, de ma propre volonté.

La méthode commandée par Jésus-Christ, le fondateur de l’Église, n’était pas autorisée. Elle dépendait de la volonté du pasteur et de son supérieur ! Quelle folie !

Dans l’éuD, ce qui concernait les membres leur était interdit à cause de et par la structure hiérarchique. La communauté, en ce sens, était inexistante. Un verset dit clairement « …dis-le à l’Église ». Mais cela nous était expliqué en détournant le sens de ce qui était écrit, encore une fois. C’était devenu : « … dis-le au pasteur » ou « …dis-le au ministère (au clergé) », en réalité. C’était anti-communautaire de procéder ainsi. C’était du contrôle et de l’hommerie. Il est clair que la communauté n’était pas impliquée. Je n’impute pas de mauvais motifs aux personnes qui ont détourné le sens de ce verset. Il n’en reste pas moins que c’était un détournement et/ou une compréhension tordue.

Comment un homme, aussi expérimenté dit-il être, aussi fort dans l’enseignement des Écritures qu’il semble l’être, aussi aimable et charmant semble-t-il paraître, détenant son « autorité » de la hiérarchie de l’éuD, peut-il empêcher l’application d’un principe biblique ?

Comment se faisait-il qu’il ait fallu demander la permission à un homme pour appliquer un principe biblique ? N’est-ce pas une aberration ?

J’ai vu cet homme agir durement, manquer de bon sens, être insensible et refuser de s’expliquer. Je l’ai vu s’esquiver et feindre. Je l’ai vu aussi imaginer de soi-disant « conflits » entre les frères francophones et anglophones alors que notre entente était extraordinaire dans la très grande majorité des cas. J’ai su qu’il donnait des ordres à ses subalternes pour expulser des membres de l’église, ne faisant pas ce sale boulot lui-même. Je l’ai vu magouiller pour se débarrasser de quelqu’un qui le gênait dans le ministère.

Cette conduite indigne était le fait d’un homme qui n’agissait pas selon les principes de la communauté et qui était tombé dans un état d’autoritarisme.

La chaîne de commandement au-dessus de lui, la structure hiérarchique de l’éuD, lui permettait d’agir de la sorte, sans considération pour les membres qui en souffraient. Et il avait toujours le front de se justifier avec les Écritures.

Il y a eu des ministres qui ne sont pas tombés dans ce panneau. Ceux-là ont dû en payer le prix. Servir Dieu plutôt que son supérieur était le principe enseigné, mais pas celui qui était généralement pratiqué.

Je pense que, dans notre communauté naissante, nous devons nous assurer de ne jamais laisser à personne autant de possibilités de n’en faire qu’à sa tête, sans avoir de moyens de l’arrêter et le remettre à sa place. La structure et le fonctionnement du groupe doivent lui permettre de rester communautaire et empêcher qu’une ou plusieurs personnes en prennent le contrôle.

Est-ce seulement parce que j’ai vécu une expérience malheureuse que je pense et dis cela ? Non, c’est à cause des expériences traumatisantes vécues par tous mes sœurs et frères que je souhaite voir notre groupe ne pas tomber dans les vieux panneaux du passé.

Je n’ai fait référence ici qu’à des situations que j’ai vécues, qu’à des choses que j’ai vues et non pas à des choses qui m’auraient été rapportées.

Dans notre groupe, il ne s’agit pas d’étouffer l’éclosion des dons ou d’essayer d’empêcher Dieu d’en être le Chef. Au contraire, il s’agit d’empêcher quelqu’un de prendre la place de Dieu et de favoriser la manifestation des dons que Dieu donne à Ses enfants.

• Création

Jésus a dit : « Et moi, je te dis que tu es Pierre [petros], et que sur cette pierre [petra]  je bâtirai mon Église, et que les portes du séjour des morts ne prévaudront point contre elle. Je te donnerai les clefs du royaume des cieux: ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux, et ce que tu délieras sur la terre sera délié dans les cieux.» (Matthieu 16:18-19).

Ces versets ont été interprétés de deux façons :

  1. Jésus est le rocher sur lequel s’appuie l’Église
  2. Jésus transfère Son autorité à Pierre et bâtit Son église sur ce dernier

Il y a, sur Internet et dans des livres, des explications très techniques quant au sens de ce qu’a dit Jésus à Pierre. Il serait trop long ici d’en faire un résumé.

Les principes donnés par Christ pour régler les conflits dans la communauté pourraient venir en aide dans la méthode à adopter pour chercher à comprendre certains versets sujets à interprétations (deux ou trois témoins…). Regardons donc quelques versets :

Actes 4:11 : « C’est lui qui est cette pierre que vous, architectes, avez rejetée et qui a été faite la première pierre de l’angle. » Il me semble que l’on voit bien ici comment l’apôtre Pierre avait compris le sens des paroles de Jésus.

Matthieu 18:20 : « Car là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux. » Lorsque Christ est là, dans nos assemblées, a-t-on besoin d’un autre chef ?

I Pierre 2:4 : « Approchez-vous de lui [Jésus], pierre vivante, rejetée par les hommes, mais choisie et précieuse devant Dieu.» Jésus est la pierre vivante, pas Pierre. Pierre est mort, Christ est vivant.

Matthieu 16:18 : «  je bâtirai mon Église…» Pierre est-il le bâtisseur de l’Église ou est-ce Christ qui L’est ?

Ephésiens 2:20 : « Vous avez été édifiés sur le fondement des apôtres et des prophètes, Jésus Christ lui-même étant la pierre angulaire.» Christ est le Bâtisseur et les apôtres sont le fondement, pas Pierre et ceux qui seraient venus après lui.

I Corinthiens 10:1-4 : « … nos pères … ont tous bu le même breuvage spirituel, car ils buvaient à un rocher spirituel qui les suivait, et ce rocher était Christ.  » Christ était le Rocher de l’Ancienne Alliance et Il est la Pierre vivante de la Nouvelle Alliance.

Certaines personnes pourraient citer d’autres versets pour étayer la seconde interprétation des paroles de Christ à Pierre. Je pense les avoir tous lus et examinés attentivement. Je crois sincèrement qu’ils ne prouvent pas que Christ a transmis Son autorité à Pierre. Christ a été et est toujours le Chef et le Bâtisseur de Son Église. Pierre et les autres apôtres ont eu une grande importance, c’est certain. Mais cela ne permet pas de croire qu’un d’entre eux aurait reçu une autorité transmissible sur l’Église.

En parlant à Pierre, Jésus ne disait-Il pas déjà que Son Église ne reposerait pas sur un homme ou sur des hommes ou sur une succession d’hommes, mais qu’Il allait Lui-même en être le Fondement, le Chef ?

Je crois comprendre qu’on peut dégager de l’affirmation de Christ que, pour reconnaître la vraie Église, ce n’est pas l’histoire de certains leaders que l’on doit retracer, comme si l’on cherchait des personnages jugés légitimes s’étant transmis les uns aux autres les rênes d’un pouvoir. Ce serait plutôt un groupe ayant obéi aux principes enseignés par Jésus.

Ne voit-on pas que la responsabilité de « lier et délier » est aussi donnée aux disciples, c’est-à-dire aux membres de la communauté ? En effet, on lit en Matthieu 18:18 : « Je vous le dis en vérité, tout ce que vous lierez sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous délierez sur la terre sera délié dans le ciel. » Au verset 1 de ce chapitre, on voit que Jésus S’adresse aux disciples, à la communauté, donc à l’Église.

Cette responsabilité était donc partagée entre le ministère ordonné et tout le groupe communautaire. Un partage : pas un contrôle, pas un conflit, pas une lutte de pouvoir, pas une lutte entre le clergé et les laïcs. C’était une complémentarité qui allait permettre à la communauté d’avoir un recours au cas où un dirigeant déraperait.

L’Église catholique a répertorié les noms des leaders de cette église depuis l’apôtre Pierre. Ses membres croient ainsi pouvoir identifier leur groupe comme étant la vraie Église, celle fondée par Jésus. Mais c’est exagérer l’importance de l’apôtre Pierre et celle du pouvoir et/ou de la hiérarchie.

Tous les hommes de Dieu qui ont œuvré dans Son Église se sont soumis à Christ et n’ont pas usurpé Son pouvoir. On a tellement insisté sur « Je te donnerai les clefs du royaume des cieux : ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux, et ce que tu délieras sur la terre sera délié dans les cieux. » On y lit le contraire de ce que Jésus a dit, car on l’interprète en disant que Pierre est le chef de l’Église. On ajoute, pour ne pas trop heurter les gens, que Pierre en serait le chef terrestre tandis que Jésus en serait le chef céleste. Une telle distinction devient une façon de tordre le sens premier de cette Écriture.

Ce passage dit que ce qui est fait selon la volonté de Jésus dans l’Église de Dieu relève de Son autorité exercée depuis Son trône. Rien de plus, rien de moins. Il ne faut pas y voir une infaillibilité transmise à un homme, comme si tout ce que ce dernier allait décider devenait une obligation pour Dieu. Qui serait le chef dans un tel cas, cet homme ou Dieu ? Il est tout à fait ridicule de penser que Dieu Se soumettrait à une quelconque volonté humaine, soi-disant instituée par Lui.

Certains préfèrent croire que Dieu habite à ce point en un homme qu’Il rend celui-ci infaillible. Est-ce ce que l’Écriture dit ? Ne voit-on pas, en Galates 2:11, que Pierre s’est fait reprendre par Paul ? L’infaillibilité est exigeante et ne tolère aucune exception. Pierre s’était trompé… pouf, partie en fumée, l’infaillibilité ! L’infaillibilité ne peut être attribuée qu’à Dieu. Se dire infaillible (ou le laisser sous-entendre) revient à se prendre pour Dieu.

D’autre part, je ne crois pas que Jésus ait créé une hiérarchie de domination et de subordination dans Son Église. Il en est le Chef et cela devrait suffire. Jésus a d’ailleurs fait cette importante recommandation : « Et Jésus les ayant appelés, leur dit : vous savez que ceux qui dominent sur les nations les maîtrisent, et que les Grands d’entre eux usent d’autorité sur elles. Mais il n’en sera pas ainsi entre vous ; mais quiconque voudra être le plus grand entre vous, sera votre serviteur. Et quiconque d’entre vous voudra être le premier, sera le serviteur de tous » (Marc 10:42-44). Cela n’empêche pas de s’exercer une structure ordonnée, les dons et leur exercice au sein de l’Église. Mais cela devrait empêcher la prise du contrôle de l’Église et les abus d’autorité.

On ne devrait pas confondre la communauté de l’Église avec toute autre forme de communauté. L’Église a un Chef, elle a un livre sacré et l’Esprit de Dieu est dans ses membres baptisés. Aucun autre type de communauté n’est égal à elle. Le livre de Scott Peck a été pour moi une aide pour comprendre le fonctionnement d’un groupe sans chef humain et il a contribué à m’ouvrir les yeux sur le fonctionnement de l’Église du NT.

Il nous faut un chef physique, diront certains. Tant pis pour eux, alors. Ils s’exposent ainsi à des erreurs, des abus et à la dépendance en ces chefs qui peuvent se raviser. Les adeptes des chefs humains à la tête de leur groupe ne peuvent imaginer un fonctionnement sans avoir un dirigeant bien identifié. Selon eux, par exemple lors d’une assemblée, quelqu’un doit être « en charge ». Ça devrait être le chef du groupe, pensent-ils. Je ne crois pas que cela soit nécessaire. J’ai suivi une formation de groupe autonome dans une grande compagnie dont j’étais un employé. Dans nos réunions, il y avait une personne chargée d’agir en tant que facilitateur pour sa durée. Cette personne présidait, mais n’avait aucun pouvoir sur le groupe. Toutes les décisions se prenaient par l’ensemble du groupe en consensus. Lorsque nous n’y arrivions pas, nous faisions un vote et la majorité l’emportait. Mais cela nous éloignait du consensus et l’harmonie au sein du groupe en souffrait lorsque cela arrivait. À la prochaine réunion, c’était une autre personne qui était le facilitateur. Le système militaire, le système politique et les compagnies capitalistes en général fonctionnent sur une base hiérarchique parfois très rigide. Ils sont à l’opposé de la communauté. Se pourrait-il que les églises institutionnalisées d’aujourd’hui aient volontairement emprunté ces modèles pour asseoir leur pouvoir ?

Pourquoi une église ne pourrait-elle pas s’inspirer du fonctionnement communautaire ?

Encore, selon certains, il est plus simple qu’un chef humain soit corrigé en cas d’erreur que de corriger tout un groupe. On aura tout vu… un chef dans l’erreur entraîne avec lui tout son groupe, non ? Le groupe tout entier ne doit-il pas être corrigé dans les deux cas ?

S’en remettre à un chef humain peut facilement devenir une forme de déresponsabilisation. « Ce n’est pas ma faute, c’est le chef qui en a décidé ainsi ! » Comme dans l’armée : « Je n’y peux rien, ce sont les ordres ! » Chacun a la responsabilité d’examiner toutes choses selon les limites des capacités qu’il possède, pas une seule personne ou une minorité parmi un groupe.

Le Chef de l’Église ne peut-Il pas la diriger depuis le ciel ? Est-il en mal d’une personne pour prendre les rênes du pouvoir ? Est-Il incapable de diriger ce qui se passe ? Peut-Il corriger des erreurs humaines qui pourraient se glisser ? Jésus n’a-t-Il pas dit qu’Il bâtirait Son Église ? Cela signifiait-il qu’Il en remettait les rênes à des hommes et qu’Il allait les laisser se débrouiller après ?

On pourrait me blâmer de voir dans les Écritures ce qui fait bien mon affaire. Il est clair que je préfère maintenant être dans un groupe dont le Chef n’est pas un être humain. D’autre part, la possibilité de voir ce qui nous convient en ignorant le reste peut s’appliquer aussi aux tenants de la « théorie des leaders ». Ne voit-on pas dans certains groupes des assoiffés de pouvoir dirigeant leur groupe avec une main de fer et s’en justifier par les Écritures ? J’en ai connus et il doit y en avoir un peu partout, connaissant la nature humaine.

C’est une tentation commune de projeter dans les Écritures ce qui pourrait nous convenir. Un avertissement à cet effet a été donné : « …sachant tout d’abord vous-mêmes qu’aucune prophétie de l’Écriture ne peut être un objet d’interprétation particulière, car ce n’est pas par une volonté d’homme qu’une prophétie a jamais été apportée, mais c’est poussés par le Saint-Esprit que des hommes ont parlé de la part de Dieu » (II Pierre 1:20-21).

Le NT parle-t-il d’une Église communautaire dirigée par Jésus-Christ ou d’une église totalitaire comme l’était l’éuD ? Lier et délier revient-il seulement aux chefs ou à l’Église aussi ? J’ai déjà répondu à cette question. Dans ce sens, est-ce moi qui vide les Écritures de leur sens ou ceux qui ont dirigé l’éuD ?

On a vu M. H. W. Armstrong souligner sa légitimité en disant qu’il avait été ordonné apôtre dans une église de l’ère de Sardes. Cela n’est pour moi qu’une autre démonstration de cette soif de soi-disant légitimité et de l’incapacité répandue de bien juger des fruits portés par une personne ou par un groupe.

Je crois que, si les membres d’un groupe demandent à Christ de bâtir Son Église et qu’ils font ce qu’Il demande, leur Chef sera au milieu d’eux. Ce sera une part de l’Église de Dieu, comme on en voit dans le livre des Actes.

L’œuvre de création de Dieu n’est pas terminée, en ce qui concerne Son Église. Elle se poursuit et nous pouvons en être des témoins et des participants.

Je crois donc qu’on ne peut pas justifier par les Écritures du NT une autorité centrale autre que celle de Christ. Je crois qu’on ne peut pas plus justifier par les Écritures une hiérarchie de forme pyramidale comme celle exercée dans l’éuD.

Je pense que, dans l’éuD, on a grandement exagéré la dimension personnelle du ministère ordonné. On l’a fait au détriment de la dimension communautaire et cela a occasionné nombre d’abus. Dans notre groupe naissant, la majorité, sinon tous, ont souffert d’abus occasionnés par des ministres qui exerçaient leur autorité sans notion communautaire.

D’autre part, il ne faudrait pas exagérer la dimension communautaire au détriment des dons accordés à certaines personnes pour un service particulier, soit la dimension individuelle. Les choses doivent se faire en complémentarité et non en opposition. Un ministre doit se rappeler qu’il est au service de Dieu dans la communauté et celle-ci doit pouvoir agir dans le cas où un ministre agirait de façon unilatérale et abusive.

Il y a de nombreux passages que je n’ai pas commentés et mon but n’était pas de tous les passer au crible. J’espère pouvoir aborder plus tard les versets bibliques parlant de la communauté et de la vie communautaire de l’Église.

D’autre part, ce n’est pas parce qu’il n’y pas une autorité hiérarchique telle qu’elle était conçue et appliquée dans l’éuD qu’il n’y a pas d’autorité du tout. Dieu est en charge, le ministère ordonné et la communauté ont la responsabilité de lier et de délier, c’est-à-dire de prendre des décisions. Exclure la forme d’autorité exercée dans l’éuD, pendant que j’en étais membre, ne signifie pas anarchie et chaos.

• Des fruits

On a déjà vu que l’Église n’est pas un groupe sans problèmes. Je pense que l’Église devrait porter ces fruits :

–> Elle est une communauté.
–> Elle se soumet à Dieu et se réunit dans le nom de Jésus.
–> On ne peut l’identifier par un chef humain.
–> Elle laisse se manifester les dons que ses membres ont reçus de Dieu.
–> Elle étudie les Écritures.
–> Elle se sert des ressources disponibles sur le marché et sur Internet pour l’aider dans sa recherche de compréhension de la volonté de Dieu.
–> Le groupe et ses membres cherchent à se perfectionner.
–> Elle se laisse inspirer et corriger par Christ et les Écritures.
–> Sa mission est inspirée par Christ.
–> Elle aide d’abord ses membres et fait preuve d’ouverture. Elle n’est donc pas sectaire.
–> Elle fait face à ses problèmes.
–> Elle ne s’immisce pas dans les affaires personnelles de ses membres.
–> Elle encourage l’expression des doutes et des préoccupations communautaires de ses membres.
–> Elle exhorte ses membres, mais ne fait pas pression sur eux.
–> Elle ne fait pas de menaces d’excommunication afin de manipuler ses membres.
–> Elle ne laisse pas un de ses membres ou plusieurs d’entre eux arriver à diriger le groupe, ni de façon directe ni de façon détournée.
–> Elle fait preuve de vigilance face aux difficultés qui pourraient menacer son existence et fait face à ce type de problème le plus rapidement possible.
–> Elle n’est pas condescendante envers les personnes faisant partie d’autres groupes ou envers des gens n’ayant aucun intérêt pour Dieu et la religion.
–> Elle ne se fait pas une priorité de se distinguer des autres pour montrer sa supériorité ou pour une autre raison.

Chaque groupe pourrait avoir des défis particuliers à relever, puisque les individus qui le composent sont différents. L’âge moyen, la présence d’enfants et d’adolescents, le degré d’éducation, la condition sociale, l’état moyen des finances, la possibilité de se réunir une journée ou une autre, la géographie, les besoins de guérison physique et spirituelle, et combien d’autres choses encore feront que les groupes locaux seront différents, mais tous animés par l’Esprit de Christ.

• Apostasie

En faisant une recherche au sujet de l’apostasie sur Internet, j’ai trouvé un groupe (l’église de Dieu restaurée, créée par un ministre et ex-membre de l’éuD) qui explique la dislocation de l’éuD comme étant une sorte d’accomplissement d’une prophétie concernant l’apostasie.

Voici d’abord une définition de ce mot : « L’apostasie (du grec ancien απόστασις (apostasis), se tenir loin de) est l’attitude d’une personne, appelée un apostat, qui renonce publiquement à une doctrine ou une religion. »

Voici ce qu’a déclaré M. David C. Pack (SVP, ne pas confondre ce nom avec celui de M. Scott Peck) sur le site : « Une apostasie majeure s’est produite à nouveau, dans l’Église, à la fin du vingtième siècle — exactement comme Pierre et Paul avaient dit qu’elle se produirait dans l’Église du premier siècle. »

Il fait référence à ce qu’on lit dans les Actes : « Prenez donc garde à vous-mêmes, et à tout le troupeau sur lequel le Saint-Esprit vous a établis évêques, pour paître l’Église du Seigneur … Je sais qu’il s’introduira parmi vous, après mon départ, des loups cruels qui n’épargneront pas le troupeau, et qu’il s’élèvera du milieu de vous des hommes qui enseigneront des choses pernicieuses, pour entraîner les disciples après eux » (20:28-30).

C’est trop facile d’affirmer catégoriquement que ce qui est arrivé dans l’église après le décès de M. Armstrong représente cette apostasie. Il faut faire de la gymnastique de haut niveau et avoir de grandes œillères pour attribuer sans nuances à M. H. W. A. l’expression de la vérité et ensuite celle du mensonge à ceux qui sont venus après lui.

Selon ce groupe, M. H. W. Armstrong a été l’Élie des temps de la fin et tout ce qu’il a enseigné devait être restauré et rien ne devrait être changé. Cela veut dire que les façons de faire de l’époque de M. Armstrong et la vision des doctrines de son époque sont jugées comme parfaites. Cela signifie que la vérité concernant les Alliances et la question de la communauté sont d’avance jugées comme des hérésies. Cela signifie aussi que les abus d’autorité faits à l’époque de M. Armstrong ne sont pas jugés comme tels et que les ministres de leur groupe possèdent la même autorité sur les membres et que la communauté ne peut rien corriger.

Ce groupe semble donner aux paroles de M. Armstrong valeur d’évangile, plus que l’Évangile même. On explique qu’il avait le droit d’établir les doctrines et de les changer, lui seul. Depuis qu’il est mort, tout doit rester tel quel, comme si c’était s’opposer à Dieu de penser seulement à changer la moindre chose. Je ne me souviens pas de tout ce qu’a écrit M. Armstrong, mais je ne me souviens pas qu’il ait dit que rien ne devait changer jusqu’au retour de Christ. S’il l’a dit, c’est une folie supplémentaire. Sinon, c’est ce  groupe qui erre.

Le chef de ce groupe (l’église de Dieu restaurée), M. H. W. Armstrong en fait, est un homme mort.

Pack explique aussi que la forme d’autorité exercée dans l’éuD sous le leadership de M. Armstrong était juste et légitime. Il omet de parler que le fait de lier et délier avait été confié aussi à la communauté. Il ne tient aucunement compte des ravages épouvantables qui ont été causés par ces soi-disant leaders « légitimes » dans l’éuD. Il ne propose aucune solution communautaire. Il semble être aussi centralisateur que M. Armstrong l’était.

En faisant tout comme par le passé, on est condamné à répéter les mêmes erreurs. Comme c’est triste de ne pas tirer de leçons de l’histoire.

D’autre part, la question de la légitimité des leaders fausse les choses en ce qui concerne l’Église de Dieu. Chacun est responsable pour lui-même de prouver toutes choses, de chercher la vérité de toutes ses forces. Personne ne devrait se fier aveuglément ou sans vérifier à qui que ce soit, fût-il M. Herbert W. Armstrong, Mahomet ou le pape. Apparemment, bien des groupes donnent trop d’importance à leur leader, comme si celui-ci était responsable de leur salut, sans que les membres prennent vraiment leurs responsabilités. Remettrions-nous notre salut entre les mains d’un homme ? Ne serait-ce pas une grave erreur ?

Les croyances et/ou l’appartenance à un certain groupe ne sont pas plus importantes que la pratique de l’amour, sur laquelle tout est basé, puisque Dieu est amour.

Des gens doivent-ils être nécessairement réunis sous un même toit ou être identifiables par des moyens physiques pour faire partie du groupe spirituel de l’Église ? Bien sûr que non. Il est possible d’être un chrétien et de ne pas faire partie d’aucun groupe identifiable autrement que par Dieu Lui-même. D’autre part, le St-Esprit doit habiter dans une personne pour que celle-ci soit chrétienne. On nous enseignait un mensonge en nous disant que si nous en arrivions à être hors de l’éuD, nous n’étions plus chrétiens.

La vraie Église est celle que Dieu voit lorsqu’Il la regarde. Elle est composée d’individus que Dieu a personnellement choisis et qu’Il a mis à part pour Christ, afin de devenir les élus de Son Royaume. Je ne peux pas la nommer ou l’identifier, simplement parce que les élus ne sont pas tous au même endroit, dans le même bâtiment. Seul Dieu le peut.

S’agit-il pour autant de ne plus chercher à prouver « toutes choses » ? Non, bien entendu. Au contraire, Paul nous dit de le faire afin d’éviter de sombrer dans l’erreur. Mais ne donnons pas plus d’importance à ce qui en a moins. Et cette expression au sujet de « toutes choses » serait à développer. On pourrait perdre notre temps à vouloir prouver des choses qui ne sont pas dignes de notre attention.

C’est une pensée très souffrante pour celles et ceux qui croient que l’apostasie a frappé la vraie Église et qu’ils se sont éloignés du Corps de Christ ou que ce dernier est devenu moribond. Ils croient avoir été séduits et/ou que les nouveaux dirigeants ont enseigné des mensonges qui ont éloigné la majorité des membres de la vérité. Ils ressentent un inconfort profond et atroce, voire une culpabilité. Leurs croyances les portent parfois à juger très sévèrement et à se fermer à tout ce qui a un rapport avec ce qui est perçu comme ne faisant pas partie de leur interprétation de la saine doctrine. Mais personne ne détient toute la vérité et personne ne peut nous en éloigner sans notre consentement. Si on s’éloigne de quelque chose sans s’en rendre compte, je ne crois pas que ce soit de la vérité. Notre relation avec Dieu et avec le Corps de Christ ne devrait pas être affectée par les déboires ou les succès de l’éuD.

L’Église du Dieu vivant ne peut être détruite et si l’éuD est ou a été la vraie Église, elle subsistera. L’éuD que j’ai connue à Montréal était une secte et j’ai quitté pour cette raison. C’est de mon appartenance dont j’ai à juger, pas de celle des autres. L’expérience des autres est bien différente de la mienne. Ce qui est dommage est que lorsque l’on quitte un groupe pour des raisons qui sont personnelles et que l’on sait être bonnes pour soi-même, on est jugé comme hérétique, méchant ou perdu.

Pourquoi ne croit-on pas qu’une personne pourrait avoir eu de bonnes raisons de partir ? Parce que l’on craint de tiédir, de s’éloigner de Dieu et de devenir dignes d’être vomis de sa bouche. Mais lorsque c’est l’Esprit Lui-même qui nous pousse à sortir d’un groupe, que doit-on faire ? Résister en pensant que l’Esprit ne pourrait faire une chose pareille ? Résister en pensant que ce doit être Satan qui est en train de nous séduire afin de nous sortir du Corps de Christ ? Ne lit-on pas dans les Écritures qu’il faut juger aussi de l’esprit des choses à savoir s’il est ou non de Dieu ? Je peux comprendre que cela fasse peur puisque je l’ai vécu. Le temps m’a montré que ma décision de quitter était la bonne et je n’ai aucun regret. Et personne ne peut juger des choses spirituelles qui me concernent, à part Dieu. Je crois que de soumettre mon jugement à celui d’un autre relèverait de l’idolâtrie et me mettrait en grave danger.

Le passage cité plus haut, en Actes 20:28-30, montre que des dangers guettent la communauté et qu’il faut être prudent. Les membres de la communauté doivent en prendre soin. Mais l’apostasie mentionnée en Actes 20 ne s’est pas produite au sein de l’Église de Dieu.

Le livre le Mystère des siècles de M. Armstrong ne mentionne rien concernant la communauté. Voyez par vous-mêmes ici :

http://www.thetrumpet.com/s/mysteryoftheages/index.php

(page Internet avec le texte original en anglais)

• Survol de quelques versets concernant l’Église, la communauté

Le chapitre 18 de l’Évangile de Matthieu est appelé parfois « le discours communautaire ». Il revêt une grande importance en ce qui concerne les relations entre membres de la communauté. Dans les Évangiles, on y retrouve deux des trois usages que fait Jésus du mot « Église ».

Col 1:18 « Il est la tête du corps de l’Église » Christ est le Chef. (Eph 1:22 aussi)
Matt 16:18 «  Et moi, je te dis que tu es Pierre, et que sur cette pierre je bâtirai mon Église1, et que les portes du séjour des morts ne prévaudront point contre elle. » Christ est l’architecte et la pierre angulaire de l’Église et Il la garde vivante.
Matt 16:19 « Je te donnerai les clefs du royaume des cieux : ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux, et ce que tu délieras sur la terre sera délié dans les cieux. » Christ confie à Pierre la responsabilité de prendre des décisions concernant l’Église, sous condition de ce qu’Il a dit au verset précédent.
Matt 18:1 « En ce moment, les disciples s’approchèrent de Jésus, et dirent : Qui donc est le plus grand dans le royaume des cieux ? » Christ S’adresse aux disciples qui ont pour souci de savoir lequel est le plus grand dans le royaume.
Matt 18:2-4 « Jésus, ayant appelé un petit enfant, le plaça au milieu d’eux, et dit : Je vous le dis en vérité, si vous ne vous convertissez et si vous ne devenez comme les petits enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux. C’est pourquoi, quiconque se rendra humble comme ce petit enfant sera le plus grand dans le royaume des cieux. » C’est celui qui est humble comme ce petit enfant qui pourra entrer dans le royaume et être le plus grand.
Matt 18:5-9 «  Et quiconque reçoit en mon nom un petit enfant comme celui-ci, me reçoit moi-même. Mais, si quelqu’un scandalisait un de ces petits qui croient en moi, il vaudrait mieux pour lui qu’on suspendît à son cou une meule de moulin, et qu’on le jetât au fond de la mer. Malheur au monde à cause des scandales ! Car il est nécessaire qu’il arrive des scandales ; mais malheur à l’homme par qui le scandale arrive ! Si ta main ou ton pied est pour toi une occasion de chute, coupe-les et jette-les loin de toi ; mieux vaut pour toi entrer dans la vie boiteux ou manchot, que d’avoir deux pieds ou deux mains et d’être jeté dans le feu éternel. Et si ton oeil est pour toi une occasion de chute, arrache-le et jette-le loin de toi ; mieux vaut pour toi entrer dans la vie, n’ayant qu’un oeil, que d’avoir deux yeux et d’être jeté dans le feu de la géhenne. » On doit aussi faire le maximum pour se débarrasser de ce qui, en soi, nous dévie de la voie de Christ.
Matt 18:10-14 « Gardez-vous de mépriser un seul de ces petits ; car je vous dis que leurs anges dans les cieux voient continuellement la face de mon Père qui est dans les cieux. Car le Fils de l’homme est venu sauver ce qui était perdu. Que vous en semble ? Si un homme a cent brebis, et que l’une d’elles s’égare, ne laisse-t-il pas les quatre-vingt-dix-neuf autres sur les montagnes, pour aller chercher celle qui s’est égarée ? Et, s’il la trouve, je vous le dis en vérité, elle lui cause plus de joie que les quatre-vingt-dix-neuf qui ne se sont pas égarées. De même, ce n’est pas la volonté de votre Père qui est dans les cieux qu’il se perde un seul de ces petits. » Chaque brebis de Christ lui est précieuse. On ne peut en négliger aucune dans la communauté, comme notre Père le fait pour nous.
Matt 18:15-17 « Si ton frère a péché, va et reprends-le entre toi et lui seul. S’il t’écoute, tu as gagné ton frère. Mais, s’il ne t’écoute pas, prends avec toi une ou deux personnes, afin que toute l’affaire se règle sur la déclaration de deux ou de trois témoins. S’il refuse de les écouter, dis-le à l’Église ; et s’il refuse aussi d’écouter l’Église, qu’il soit pour toi comme un païen et un publicain. » Christ explique comment on doit s’y prendre pour faire face aux conflits entre membres de la communauté : on se parle d’abord en privé entre frères en espérant que ça fonctionne. Aucune distinction n’est faite quant à la gravité de l’offense. C’est d’abord une démarche individuelle dans laquelle le clergé n’est pas impliqué. Si ça ne fonctionne pas, on demande l’assistance de deux ou trois membres de la communauté. Si ça ne fonctionne pas, on s’adresse alors à toute la communauté. En cas d’échec, la personne fautive serait exclue de la communauté. Cette marche à suivre n’appartient pas au ministère, mais à l’Église.
Matt 18:18 « Je vous le dis en vérité, tout ce que vous lierez sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous délierez sur la terre sera délié dans le ciel. » Christ confie à la communauté la responsabilité de prendre des décisions concernant les disciples fautifs, après avoir rempli les conditions précédentes.
Matt 18:19-20 « Je vous dis encore que, si deux d’entre vous s’accordent sur la terre pour demander une chose quelconque, elle leur sera accordée par mon Père qui est dans les cieux. Car là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux. » Christ est présent lorsque deux ou trois de Ses disciples s’assemblent en Son nom. Christ affirme qu’une demande faite à Dieu par deux membres sera exaucée. Cette promesse est faite dans le contexte de la communauté.
Matt 18:21-22 « Alors Pierre s’approcha de lui, et dit : Seigneur, combien de fois pardonnerai-je à mon frère, lorsqu’il péchera contre moi ? Sera-ce jusqu’à sept fois ? Jésus lui dit : Je ne te dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à septante fois sept fois. » Pour que la communauté soit harmonieuse, il faut que le pardon règne entre ses membres. Sinon c’est la pagaille. La parabole du serviteur impitoyable (versets 23 à 35) qui suit sert à illustrer l’importance que Dieu accorde au pardon des offenses entre membres de la communauté. S’adresser au frère qui a péché et lui pardonner sont deux devoirs complémentaires et indissociables.
Gal 6:1-5 « Frères, si un homme vient à être surpris en quelque faute, vous qui êtes spirituels, redressez-le avec un esprit de douceur. Prends garde à toi-même, de peur que tu ne sois aussi tenté. Portez les fardeaux les uns des autres, et vous accomplirez ainsi la loi de Christ. Si quelqu’un pense être quelque chose, quoiqu’il ne soit rien, il s’abuse lui-même. Que chacun examine ses propres oeuvres, et alors il aura sujet de se glorifier pour lui seul, et non par rapport à autrui ; car chacun portera son propre fardeau. » Ces versets montrent dans quel esprit les choses doivent se faire : « un esprit de douceur. » Celui qui redresse pourrait être tenté d’en manquer. En partageant les fardeaux des membres de la communauté, on aime son prochain comme soi-même. Celui qui redresse doit prendre garde de ne pas chercher à se comparer à celui qu’il a aidé, de peur qu’il ne s’estime supérieur.
Matt 23:8-12 « Mais vous, ne vous faites pas appeler Rabbi ; car un seul est votre Maître, et vous êtes tous frères. Et n’appelez personne sur la terre votre père ; car un seul est votre Père, celui qui est dans les cieux. Ne vous faites pas appeler directeurs ; car un seul est votre Directeur, le Christ. Le plus grand parmi vous sera votre serviteur. Quiconque s’élèvera sera abaissé, et quiconque s’abaissera sera élevé. » Sœurs et frères dans l’Église sont égaux sous l’autorité de Christ. Celui qui veut s’élever en autorité au-dessus des disciples de Christ sera abaissé par Lui. Celui qui sert la communauté sera élevé par Christ.
I Cor 6:1-8 « Quelqu’un de vous, lorsqu’il a un différend avec un autre, ose-t-il plaider devant les injustes, et non devant les saints ? Ne savez-vous pas que les saints jugeront le monde ? Et si c’est par vous que le monde est jugé, êtes-vous indignes de rendre les moindres jugements ? Ne savez-vous pas que nous jugerons les anges ? Et nous ne jugerions pas, à plus forte raison, les choses de cette vie ? Quand donc vous avez des différends pour les choses de cette vie, ce sont des gens dont l’Église ne fait aucun cas que vous prenez pour juges ! Je le dis à votre honte. Ainsi il n’y a parmi vous pas un seul homme sage qui puisse prononcer entre ses frères. Mais un frère plaide contre un frère, et cela devant des infidèles ! C’est déjà certes un défaut chez vous que d’avoir des procès les uns avec les autres. Pourquoi ne souffrez-vous pas plutôt quelque injustice ? Pourquoi ne vous laissez-vous pas plutôt dépouiller ? Mais c’est vous qui commettez l’injustice et qui dépouillez, et c’est envers des frères que vous agissez de la sorte ! » Paul fait référence dans ces versets à la responsabilité et à l’autorité qui a été conférée à l’Église en tant que groupe pour exercer un jugement. Il semble évident que cela s’inscrit dans le contexte de l’injonction de Jésus dans Matthieu 18.
Matt 7:1-5 « Ne jugez point, afin que vous ne soyez point jugés. Car on vous jugera du jugement dont vous jugez, et l’on vous mesurera avec la mesure dont vous mesurez. Pourquoi vois-tu la paille qui est dans l’œil de ton frère, et n’aperçois-tu pas la poutre qui est dans ton œil ? Ou comment peux-tu dire à ton frère : Laisse-moi ôter une paille de ton oeil, toi qui as une poutre dans le tien ? Hypocrite, ôte premièrement la poutre de ton oeil, et alors tu verras comment ôter la paille de l’œil de ton frère. » Un chrétien doit prendre garde à sa façon de juger. Il doit d’abord chercher à se juger lui-même. Il ne lui est pas interdit de juger, comme on le voit dans d’autres versets. Mais il peut facilement arriver qu’il s’indigne de choses beaucoup moins importantes chez ses sœurs et frères que celles dont il est lui-même responsable.
Jean 7:24 « Ne jugez pas sur l’apparence, mais jugez d’un juste jugement.” (Version Chouraki) Un chrétien doit apprendre à exercer sagement son jugement.
I Cor 12:28 « Et Dieu a établi dans l’Église premièrement des apôtres, secondement des prophètes, troisièmement des docteurs, ensuite ceux qui ont le don des miracles, puis ceux qui ont les dons de guérir, de secourir, de gouverner, de parler diverses langues. » Ce verset nous a été présenté le plus souvent pour nous convaincre au sujet d’une chaîne d’autorité. Les premiers membres de l’Église ont été les apôtres, les douze. Il semble que l’on parle ici de chronologie, pas d’autorité.
I Cor 3:5 « Quand l’un dit : Moi, je suis de Paul ! et un autre : Moi, d’Apollos ! n’êtes-vous pas des hommes ? Qu’est-ce donc qu’Apollos, et qu’est-ce que Paul ? Des serviteurs, par le moyen desquels vous avez cru, selon que le Seigneur l’a donné à chacun. » Paul ne se cherchait pas des disciples, pas plus que les autres serviteurs de Dieu. Si quelqu’un en arrivait dans l’Église à avoir des disciples, il faudrait le remettre à sa place, pour son bien et celui de la communauté.

1- C’est la première fois que Jésus dit le mot « Église » dans les Évangiles. Il le dira encore à deux reprises en Matthieu 18. On ne retrouve le mot nulle part ailleurs dans les Évangiles. Le mot est mentionné 114 fois dans le NT.

• Quelques mots de vocabulaire grec relatifs à la communauté

Mot grec Traduction ou sens Versets
adelphotès fraternité (communauté des sœurs et des frères) I Pierre 2:17 et 5:9traduit par « frères » dans la plupart des versions
philadelphia amour fraternel Rom 12:10 « Par amour fraternel, soyez pleins d’affection les uns pour les autres »
ekklèsia assemblée, église(communauté)sens littéral : par convocation Ac 15:22 « Alors il parut bon aux apôtres et aux anciens, et à toute l’Église, de choisir parmi eux et d’envoyer à Antioche… »
adelphè frère (membre de la famille physique) I Jean 3:12 « …et ne pas ressembler à Caïn, qui était du malin, et qui tua son frère. »
adelphè (même mot) Frère (membre de l’Église, de la communauté) Matt 23:8 « vous êtes tous des frères »
mathètès disciple [261 fois dans le NT] (chrétien, membre de la communauté) Matt 18:1 « …les disciples s’approchèrent de Jésus » Ac 11:26 « Ce fut à Antioche que, pour la première fois, les disciples furent appelés chrétiens. »

• Conclusion

Comme Scott Peck, je crois que la communauté est non seulement possible, elle est indispensable. L’auteur de La Route de l’Espoir affirme que la communauté est la dernière chance de l’humanité. En ce qui concerne l’Église de Dieu du NT, sa forme communautaire est particulière, comme on le voit à la lecture des Écritures. Elle doit prendre la forme que son Chef a voulu lui donner.

Dans une structure pyramidale comme celle de l’éuD, les membres de l’église ne réussissaient pas à s’épanouir et n’atteignaient pas leur plein potentiel. Dans ce cas, l’église non plus n’atteignait pas son potentiel puisqu’elle ne fonctionnait pas comme Christ le voulait.

L’étude du NT dans une perspective nouvelle, l’écriture de ce document, mon interaction avec des frères, la relecture de certains passages du livre de Scott Peck et ma participation aux réunions m’ont aidé à mieux cerner mes aspirations profondes. C’est à la communauté de l’Église que j’aspire. Je ne pourrais me contenter de rien de moins.

En 1997, un frère et grand ami, et moi avions lancé une invitation à une quinzaine de personnes à une première rencontre-discussion sur la formation d’une communauté : il y a eu deux participants à cette réunion : mon ami et moi. Le moment n’était peut-être pas encore venu. L’est-il maintenant ?

Où retrouve-t-on aujourd’hui cette communauté, pratiquée par un groupe ? Je ne sais pas. Nous pourrions peut-être la chercher pour nous y joindre. D’autre part, il ne semble pas être défendu d’en démarrer une, là où Jésus Se trouverait, puisque nous serions réunis en Son nom.

Je pense qu’il y a un problème dans le christianisme actuel. Des milliers d’églises utilisant la même Bible, prétendent-elles, parlant de Dieu et de Jésus, mais en contradiction ou en conflit les unes avec les autres. Cela ne m’attire pas. Au contraire, cela me rend malade. Une église dont on peut identifier trop facilement le chef ou le fondateur, ayant un contrôle sur les membres, que les gens suivent, qui fonctionne selon une forme pyramidale, qui n’écoute pas ou très peu ce qui passe par l’esprit des membres, qui décide de tout ou presque, tout cela me pousse maintenant à m’éloigner et à refuser de participer.

J’ajoute ici que tout ce qui est venu de l’éuD n’était pas nécessairement faux et mauvais. Mon but ici n’est pas de faire l’inventaire du vrai et du faux ou du bien et du mal, mais de traiter de ce qui concerne la communauté, en quoi l’éuD n’en était pas une et comment je vois les choses dans notre groupe, sans bien sûr en faire une obligation, puisque je n’en suis pas le chef.

J’invite ceux qui prennent connaissance de mes réflexions à me faire part de leurs commentaires afin que je puisse bénéficier de leurs points de vue et l’enrichir. Je parle de réflexions. Je ne suis pas un enseignant au niveau des doctrines, un psychologue ou un érudit.

Comme me le disait un frère, cette quête que je « souhaite d’une communauté en est une pointée sur un rassemblement de gens sans prétentions, modestes chrétiens qui languissent après un véritable amour fraternel en action, amour qui nous a tous tellement manqué dans l’église qui devait en être l’oasis… » Commencer par ça, ce serait déjà très beau et très bon. Ne serait-ce pas une belle mission ?

Aucun groupe formé d’êtres humains n’est parfait. Faute de voir Dieu descendre du ciel et créer Lui-même un groupe à Son image et à Sa ressemblance, je crois que la forme communautaire qui se dégage de la lecture et de l’étude du NT est celle que devrait prendre le groupe que nous souhaitons avoir comme Église de Dieu.

• Remerciements

Je tiens à remercier chaleureusement mes amis Roch Richer et Joseph Sakala qui m’ont aidé dans ma réflexion en m’apportant des éléments auxquels je n’avais pas pensé. Je remercie de la même façon les membres de la petite communauté dont je fais maintenant partie, puisque c’est d’abord avec eux que  j’ai eu le bonheur de voir se concrétiser la promesse de Jésus d’être au milieu de nous.

Daniel Dion, 2007

dan-dion@videotron.ca