D.214 – L’INEXTRICABLE TOILE D’HERBERT W. ARMSTRONG – Partie 16

 

Regard interne sur l’Église Universelle de Dieu

Par DAVID ROBINSON

 

Chapitre 15

POIGNARDÉ DANS LE DOS

 

Environ une semaine après être revenu de la conférence de Tucson, en janvier 1979, je reçus l’appel d’un ami, tard dans la soirée. En substance, un membre de l’église de la Louisiane, déclarant avoir pris contact avec le bureau de Stan Rader à Pasadena, avait appelé ici, à Tulsa, une famille qu’il avait connue auparavant en Louisiane pour essayer de découvrir tout ce qu’il pouvait à mon sujet. Je connaissais un peu cet homme, mais je n’avais pas idée qu’il puisse ainsi être utilisé par le bureau de Rader. J’avais perçu chez lui un homme sans éducation, sans envergure, ni réputation dans l’église, mais ambitieux. J’allais découvrir rapidement que c’est le genre de personne qu’employaient ceux qui contrôlaient de facto à Pasadena.

Il y a deux heures de décalage entre Pasadena et ici, à Tulsa ; donc, j’appelai immédiatement Rod Meredith chez lui. Je lui parlai de l’appel en lui mentionnant le nom de l’homme de la Louisiane. Il m’avoua ne rien savoir à cet égard. Je pensais alors, et je le pense toujours, qu’il ne savait pas grand-chose des activités du groupe de Rader. Mais je lui dis que je me rendrais là-bas pour lui parler. Il accepta tout de suite. Il m’apparut amical au téléphone. En fait, je ne voyais aucune raison pour qu’il ne le soit pas. Nous avions toujours été sincères l’un envers l’autre et je ne voyais pas la nécessité de changer cette approche.

Donc, à la toute fin de janvier, je m’envolai pour Pasadena. Lorsque j’arrivai au Hall d’Administration, la secrétaire de Rod me dit qu’il ne pourrait me voir que le jour suivant ― à 10h00. Dans l’intervalle, je visitai plusieurs de mes amis sur le campus, dans l’après-midi et dans la soirée, soupant chez des amis de très longue date. Le lendemain matin, je me rendis aux services ministériels où Ted Herlofson me montra un certain nombre de graphiques très intéressants qu’il avait compilés. En plus d’être un bon historien, Ted était aussi un statisticien passionné. Ses graphiques indiquaient un désastre imminent pour l’église.

La secrétaire de Rod m’appela pour me dire que celui-ci était prêt à me recevoir. J’arrivais à l’ascenseur quand les portes s’ouvrirent sur Sherwin McMichael qui en sortit. Il sembla plutôt surpris ― même troublé. Il me demanda si je pouvais m’avancer juste un peu, histoire d’avoir un entretien en privé. Je regardai autour et ne vis personne dans les alentours. Il se déplaça pour que j’avance un peu plus vers un ameublement servant à faire la conversation, dans le coin nord-ouest du lobby.

« Bon, qu’y a-t-il ? » lui demandai-je.

Il voulait m’expliquer que la rumeur était partie dans sa famille que mon fils John et moi-même avions été excommuniés. Il me dit que tout cela était une terrible erreur. Je lui répondis que, si j’avais été excommunié, je pense que je le saurais. Il me dit être désolé et que cela n’aurait pas dû arriver, mais il était sûr que je comprenais ce que sont les rumeurs.

Je ne fus jamais aussi en colère de toute ma vie. Je le fixai droit dans les yeux et lui lançai : « Sherwin, les rumeurs courent partout sur tout le monde. Je suis sûr qu’il y en a plein à ton sujet. Et je suis certain qu’il y en aura encore ». Sur ce, je le quittai et je ne lui ai pas reparlé depuis. (Le lendemain du Jour du Souvenir, je me rendis à son bureau pour lui parler, mais il n’était pas là. C’est probablement mieux ainsi.) Je n’avais pas entendu parler de ces rumeurs avant qu’il me les annonce à ce moment-là. Mais depuis lors, j’en ai entendu d’autres. Et j’en connaissais les raisons. Elles n’étaient pas honorables.

Quand Rod ouvrit la porte de son bureau, je remarquai que Raymond McNair était là aussi. J’en étais content. John avait eu un long entretien avec eux deux dans la semaine précédente et il avait trouvé que Raymond était plus compatissant et plus raisonnable que Rod. Dennis Pyle me rendit plus tard le même témoignage. Je devais constater la même chose en deux occasions. Raymond fait très bonne impression, seul à seul ― beaucoup, beaucoup plus que lorsqu’il est en groupe.

Je débutai la conversation en mentionnant que j’étais venu trois fois dans ce bureau, lors des trois derniers mois, et que j’avais parlé à trois hommes différents ayant occupé le poste. « Rod, » demandai-je, « combien de temps croyez-vous vous asseoir ici ? » Raymond McNair répondit en disant : « Nous croyons que c’est Dieu qui nous a installés ici et que seul Dieu peut nous y enlever. »

« C’est à peu près la philosophie que vous devez avoir, » répliquai-je. Je leur dis ensuite que, même si j’avais été mécontent des événements ayant eu lieu pendant l’office de Rod, j’étais véritablement heureux qu’il y soit et je lui souhaitais le meilleur. C’est vraiment le sentiment que j’avais, à l’époque. J’en savais un bout sur ce qui s’était passé et je désapprouvais absolument la conduite des deux hommes lors du fameux, ou de l’infâme, vendredi. En me basant sur de nombreux rapports, Raymond me faisait penser au John Brown de Harper’s Ferry, tel que décrit dans les bouquins scolaires du Sud d’il y a un demi siècle. Mais Rod avait été trop avide de pouvoir. Néanmoins, Dieu l’utilisait peut-être maintenant dans un travail spécial, et Rod pouvait en ressortir comme le leader ecclésiastique que nous attendions tous. Je ne pensais pas que ce fut vraiment possible. Je réagis donc en me fondant là-dessus. Je leur dis que je les aiderais de toutes les façons possibles. Je leur demandai s’ils savaient contre quoi ils se dressaient. Leur réponse circonspecte indiquait, soit la prudence, soit le manque d’information. À mesure que la journée s’écoula, je pus voir qu’il y avait un peu des deux. Je leur fis savoir que j’avais passé plusieurs heures à converser avec Stan Rader, une couple de mois auparavant et que je voulais qu’ils sachent à quoi ils avaient affaires. Stan ne serait pas leur ami.

Rod et Raymond sortirent tous deux des tablettes de papier jaune format légal et commencèrent à prendre des notes. Je leur demandai ce qu’ils voulaient en faire et ils me répondirent qu’ils reverraient plus tard la réunion afin de mieux savoir comment procéder pour protéger leur poste. Je n’étais pas complètement rassuré, mais je décidai que cela ne faisait pas grande différence. Après tout, Dieu enregistrait tout, de toute façon. Je savais que j’allais assez bien me rappeler de ce qui s’était dit ce jour-là ― du moins, en substance. Raymond s’assit en face de l’énorme bureau de Rod et à ma gauche.

Il ne me regarda pas souvent ; la plupart du temps, il regardait Rod ou le sol. Je dois rapporter que, durant les 6 ½ heures de conversation, Raymond, quoi qu’il démontrait plus d’empathie que Rod, donna l’impression d’être lent à comprendre et à percevoir. Rod était passablement plus rapide à comprendre, mais tout de même beaucoup plus lent que, disons, Stan Rader. On doit épeler les mots pour Rod, mais pas pour Stan. Après avoir décortiqué les choses pour Rod, je dus ensuite les expliquer davantage pour le bénéfice de Raymond. Ce fut ainsi pendant toute la conversation. Je faisais vraiment face à deux niveaux différents de compréhension. Dans l’avion, j’avais pris quelques notes de la conversation que j’avais eue avec Stan Rader dans le but de décrire à Rod ce qu’il devait savoir. Il me dit que je n’avais pas à m’en faire au sujet d’une prise de pouvoir de l’église de la part de Stan Rader, car lui-même, Raymond, Leon Walker et quelques autres qu’il me nomma étaient maintenant sur le Comité de Directeurs. Stan ne pouvait d’aucune façon prendre le pouvoir de l’église. Mon regard sceptique transmit mon désarroi. Les événements subséquents démontrèrent la médiocrité de Rod et son inexpérience.

La vérité toute simple, c’est que ni Rod, ni Raymond ne comprenaient les forces contre lesquelles ils luttaient, et ils ne comprenaient pas suffisamment la loi corporative pour prendre des décisions intelligentes. Ils n’avaient pas non plus de budget ou la faculté d’engager un bon avocat corporatif, et ils n’avaient donc pas de base de pouvoir dans l’église pour assurer leur continuité à leur poste.

La route qu’ils empruntèrent dès le début les condamnait à un échec assuré. Si, dès le commencement, ils avaient prêché avec puissance la loyauté envers Dieu, envers la Bible, envers l’église et envers la vérité, ils auraient obtenu le support nécessaire. S’ils avaient enseigné la compassion et la miséricorde, et s’ils avaient pratiqué ces vertus, les résultats auraient été fort différents. Si Rod avait refusé de réagir aux messages de Rader commandant l’excommunication de confrères ministres lors du sabbat suivant l’échauffourée de Pasadena, il aurait acquis de la force. Une fois qu’il eût accepté la note des mains de Stan et permit à ce dernier de s’emparer du podium lors du premier sabbat, il se compromit de même que le ministère.

Stan savait ce qu’il faisait. Rod, lui, était dans le brouillard. Et voilà maintenant qu’il disait avoir été plus fin que Stan. Quelle naïveté !

Je suis assuré que Rod n’a jamais assisté de toute sa vie à la réunion d’un comité vraiment solide. Comment aurait-il pu ? Herbert Armstrong, dans ses conversations avec Wayne Cole enregistrées sur ruban, appelait fièrement le comité des directeurs de l’église son « comité d’idiots ».

De la manière que se passèrent les choses, Rod établit un nouveau record de temps occupé au poste de directeur de l’Administration pastorale. Il avait ridiculisé Wayne Cole, son prédécesseur, citant le peu de mois qu’il avait occupé le poste, mais Rod mordit la poussière en moins de temps encore ! En vérité, Rod s’arrangea très bien pour pouvoir durer les huit ou neuf mois qu’il fut en poste, car son utilité avait déjà pris fin avant la Pâque.

Il semble, d’après ce que Rod et Raymond dirent à l’époque, que Dieu ne les ait pas mis en poste ; cela revenait à une couple d’hommes. Et ce sont ces mêmes hommes qui les déplacèrent. Ils ne jouaient pas le jeu avec assez de talent. C’est de ça que je les avais avertis.

Je confiai à Rod que Herbert Armstrong avait dit de lui : « Rod Meredith est si juste qu’il en devient injuste ». C’est Stan qui me l’a dit. Et, d’après plusieurs rapports, il traitait Raymond McNair de « bouffon ». Et voilà qu’il les avait utilisés pour une courte période de temps seulement, à sa convenance. Rod croyait que c’était Dieu qui l’utilisait. Je demandai à Rod, comme à Raymond, si le Message d’avertissement avait touché tout notre pays, ou s’il restait encore beaucoup à faire. Je l’appelle le « Message d’Ézéchiel » parce qu’une grande partie se trouve dans le livre de ce prophète. Ceux qui pleurent et qui soupirent à cause de toutes les abominations qui se commettent dans notre pays sont loués, alors que ceux qui emploient le nom de la religion pour se faire leur propre chemin et qui corrompent le pays y sont déclarés dignes de mort. Je pense que le terme est bien choisi en cette circonstance. Tous deux pensaient qu’il reste beaucoup à faire pour remplir notre mission envers le pays et les autres nations que l’église appelle l’Israël moderne. Si ces pays sont réellement les descendants modernes de l’ancien Israël, alors il y a encore énormément à faire pour une église active et nette ― c’est-à-dire, si l’enseignement de l’église est exact.[1]

Nous étions d’accord sur le sujet. Le seul point de désaccord que j’ai pu détecter était à savoir envers qui nous nous disions loyaux. À cette époque, je croyais qu’en fin de compte, HWA voudrait faire les choses correctement et continuer l’œuvre consistant à avertir le monde occidental et ensuite les autres nations. Je ne connaissais tout simplement pas l’étendue de son enchevêtrement avec le monde. Cette connaissance n’allait me venir que plus tard. Des renseignements additionnels me feraient aussi comprendre ce qui s’était passé pendant des années à Pasadena et pourquoi l’église avait été stoppée dans son élan, il y a quelques années. Stan avait frappé au sommet. Rod le savait peut-être à l’époque. Certains disent aujourd’hui qu’il le savait. Je ne sais pas. Il n’a pas donné d’indice qu’il le savait, mais je devais apprendre, plus tard au printemps, qu’il était très habile à cacher de l’information et à la ménager afin qu’elle vienne à servir ses propres intérêts. On vit, on apprend. Cette journée-là, nous discutâmes beaucoup du personnel ministériel, donnant notre opinion en long et en large. Je fus surpris de constater qu’il s’était forgé une haute opinion de certains hommes que je pensais ineptes à servir l’église, et je découvris qu’il avait piètre opinion d’autres personnes que je croyais essentielles. Nous fûmes néanmoins d’accord sur quelques points.

Il n’a pas réagi devant les choses que je savais être formelles concernant plusieurs personnes qui sont encore dans les environs, mais qui se sont compromises au sein du ministère à maintes et maintes reprises. Rod me dit qu’il respectait mes opinions, et je le crois. Elles se fondaient sur beaucoup d’informations.

J’avais pris quelques documents dans ma mallette. Je l’ouvris et commençai à lui tendre des choses à lire dont certaines portions étaient soulignées. Il me dit que John était arrivé la semaine précédente avec une mallette pleine de documents à lui montrer. Rod avait ridiculisé cette approche, ayant le sentiment que tout cela n’avait pas d’importance. Tout ce qui lui importait, c’était de supporter « l’apôtre ». Rien d’autre ne comptait. En tout cas, c’est le propos qu’il tenait à ce moment-là. Stan Rader, c’était autre chose. Il y avait un problème en ce qui le regardait. Qu’importe les contradictions qu’ait pu écrire Herbert Armstrong, on ne gagnait rien à en tenir compte.

J’élaborai ensuite en détail sur mon impression de Stan, ses habiletés, ses faiblesses, ses opinions et ses plans selon ce que je pouvais en discerner. Je pensais qu’il n’y avait pas moyen de séparer les destins de Stan Rader et d’Herbert Armstrong à ce moment-là. Seuls la mort ou l’État de la Californie pouvaient le faire. Il sembla que les choses s’étaient agencées de manière à les joindre comme des frères siamois. Il y avait des raisons, bien rapportées au moulin à rumeurs, qui expliquaient cet état de fait. Les enregistrements de Lochner en étaient une.

Puis, je parlai à Rod et à Raymond de la conduite d’HWA aux Pocono, en 1976, quand HWA m’avait confié ses habitudes de masturbation et montré sa tenue de livre sur son auto-érotisme. Rod me demanda si ça m’en avait bouché un coin. J’admis que cela m’avait passablement secoué, en particulier à cause des enseignements d’HWA à ce propos. Je pensais également qu’il était tout à fait inhabituel qu’un homme enregistre régulièrement une telle conduite.

Rod m’avoua que cela ne le bouleversa pas du tout, lui. Pourtant, Rod avait enseigné ce sujet plus que n’importe quel autre ministre dans toute l’église. En outre, il enseigna pendant des années au collège les cours traitant des Épîtres de Paul. Ces cours comprenaient les enseignements sur le premier chapitre de l’épître aux Romains qui, selon l’église, interdit cette pratique. Je demandai à Rod si c’était bien le cas. Eh bien, oui, acquiesça-t-il, c’était bien le cas. Raymond parla ensuite de la solitude de M. Armstrong et tout ce qu’il souffrait depuis la mort de son épouse. Lui, Raymond, déclara alors avoir souffert quand sa propre épouse le quitta et partit avec la plus grande part de son argent. Elle lui avait tellement coûté, dit-il, qu’il pouvait comprendre que la solitude affectât HWA.

Je leur rappelai à tous deux que HWA pratiquait la masturbation alors que Mme Armstrong était toujours vivante. Que dites-vous de ça ? Rod dit qu’il savait que Loma Armstrong passait pour être froide de nature. Et qu’il ne dirait rien de la conduite d’HWA. Je lui répliquai que Tony Hammer avait menacé un jeune homme d’excommunication, au sud du Texas, il y a quelques années, à cause de l’enseignement de l’église sur la masturbation, et voilà que l’homme qui occupait le sommet la pratiquait depuis toujours. Dieu faisait-Il acception de personne ? Il répondit que, si Tony l’avait appelé, à l’époque, il lui aurait dit de ne pas se montrer si dur envers le jeune homme. (Ceux qui se rappelleront les enseignements de Rod à ce moment-là, trouveront cela difficile à avaler.)

Ensuite, je leur parlai de la nudité de M. Armstrong le lendemain matin et ils exprimèrent tous deux leur incrédulité. Je pus le voir dans leurs yeux. Je leur dis : « Soit que je le raconte tel que c’est arrivé, ou soit que cette histoire est totalement fausse. Maintenant, regardez-moi droit dans les yeux et voyez si je vous dis la vérité. » Rod dit me croire. Il me connaissait plus que Raymond. Mais Raymond résista et parla de la modestie de M. Armstrong et du fait qu’il était prudent. Je lui répétai que soit que c’était vrai, soit que c’était faux. Il me regarda, puis dit me croire. Rod parla ensuite de certains grands hommes qui aimaient se promener nus ― comme Winston Churchill. Il pouvait imaginer que M. Armstrong, aussi un grand homme, était sans doute comme ça aussi. En fait, il s’enthousiasma à l’idée et sembla l’apprécier.

C’était l’heure du dîner et Rod voulut aller là où l’on trouverait de l’intimité. Nous trouvâmes un endroit à l’est du campus. J’ai oublié le nom de la place, mais c’était bruyant. Rod voulut que nous nous référions à l’homme dont nous parlions en le nommant par un chiffre pendant le dîner. Puis, il décida qu’il y avait tellement de bruit que personne ne nous entendrait de toute façon. Je lui dis que, pour ma part, cela ne faisait pas de différence. Nous pouvions utiliser son nom ou un chiffre. Ce fut un dîner fort aimable et il appert qu’en général nous étions d’accord. Ensuite, nous retournâmes au bureau où Rod s’assit à nouveau derrière son énorme pupitre. Nous couvrîmes un certain nombre de choses et, aux alentours du milieu de l’après-midi, je ramenai la discussion sur ce pourquoi j’étais là. Rod changea complètement de comportement. Il prit une attitude autoritaire et se laissa aller en arrière dans son gros fauteuil. Il m’informa que je devais venir au collège à Pasadena immédiatement. Je le questionnai sur le pastorat à Tulsa. Il me dit que j’en étais relevé. Je lui demandai depuis quand. Il me répondit depuis tout de suite. Pourquoi ? lui rétorquai-je. À cause de ceci et de cela, me dit-il. Il me parla vraiment par détours. Finalement, il m’avoua que c’était HWA qui l’avait ordonné. J’avais deux options : soit de venir au collège Ambassadeur immédiatement, ou je serais complètement expulsé du ministère. Je m’assis un moment en regardant par la fenêtre. Le bureau de Rod, qui le fut peu de temps, est situé au coin nord-ouest du Hall d’Administration. Je jetai un coup d’œil par delà le Boulevard Colorado et la Banque Wells Fargo, sur les collines au loin. La journée était claire. Rod se mit à rire en disant : « Dave, vous êtes perdu dans vos rêveries. » « Rod, » répliquai-je, « je suis perdu dans bien plus que ça. » Raymond parla de déménager tout de suite. Il me dit que je pouvais mettre mes meubles en entreposage et prendre un appartement meublé ici même. Il mentionna quelques autres personnes ayant fait la même chose.

Rod commença à me dire qu’on me ferait honneur lorsque j’arriverais. Je ne serais pas déshonoré. Ils prendraient personnellement soin de moi et je pouvais compter sur leur amitié.

Je leur dis que j’avais près de 57 ans et que déménager maintenant était hors de question. De même, je ne pouvais prendre sur moi de demander pareille chose à mon épouse. Rod voulut savoir si je voulais rester un soir de plus avant de prendre une décision. Demain matin, les choses deviendraient plus claires. Je lui dis qu’il faudrait pas mal plus qu’une autre nuit.

Il commença à m’expliquer qu’une formation collégiale supplémentaire m’aiderait dans l’église. Je pourrais en sortir dans une couple d’années, peut-être, pour obtenir un autre pastorat. Je n’avais pas fait autant de collège que la plupart des hommes dans le domaine. Cela leur permettrait de me respecter plus que jamais. Il mentionna que Ray Wooten en était un autre qui avait besoin de faire davantage de collège. (On avait déjà fait de Ray un coordonnateur régional, mais cela n’avait pas encore été annoncé. J’allais en entendre parler plus tard. Cela illustre la méthode de Rod, car Ray a moins de collège que moi.)

Je demandai à Raymond, qui était alors vice-chancelier du collège, quels cours me seraient offerts. Il se questionna et ne put me répondre. Il ne savait même pas ce qui se passait dans sa propre école. Pourtant, voilà un homme qui rabaissait avec emphase les universités de notre pays et qui avait fortement critiqué le collège l’automne précédent, à Big Sandy, devant six mille personnes. Il se croyait qualifié pour administrer un collège et, pourtant, il ne savait pas ce qui se passait dans son propre petit établissement.

On peut dire que, si j’avais quelque intention d’aller au Collège Ambassadeur, ma confiance n’était pas renforcée par sa performance. Je leur dis que je n’avais vraiment pas de temps à perdre dans la vie. J’avais le sentiment que je ne devais rien gaspiller et je leur posai la question à savoir s’ils croyaient que je n’y perdrais pas mon temps.

Les événements qui suivirent ont prouvé que mes inquiétudes étaient bien fondées. Que vaudrait maintenant l’amitié de Rod Meredith à Pasadena ? De même que celle de Raymond ? Si ce n’était des autres problèmes, j’aurais encore préféré celle de Stan Rader. Au moins, il joue au bridge. Et il peut parler intelligemment. Je ne suis pas sûr qu’il ne soit pas plus fiable. Mais on apprend, à la longue.

Puis, Rod mit de la pression pour obtenir une réponse immédiatement. Mais Raymond vint à mon aide. Dans les moments cruciaux, il montre beaucoup plus de compassion que Rod. Je déclarai que je devais y penser quelques jours. Raymond poussa Rod à accepter. Vint ensuite la question de savoir ce qu’il fallait faire pour le prochain sabbat, à Tulsa. Il me demanda si je voulais donner un dernier sermon. Je répondis que oui. Je lui demandai s’il avait un sermon enregistré à faire jouer. Je le ferais jouer et j’annoncerais ensuite que c’étaient mes derniers moments à Tulsa. Il me donna un enregistrement à faire passer ― un des siens.

Il était maintenant cinq heures et je voulais me rendre au bureau du personnel pour voir quel genre d’arrangements financiers on pouvait me faire au cas où je quitterais l’emploi de l’église. Rod ne le savait pas. Il était perdu, dans ce domaine, de toute façon. Je lui dis que je voulais aller vérifier avant que Ted Gould quitte pour la journée.

Le bureau du personnel était au troisième étage et Raymond me reconduisit à l’ascenseur ; il s’arrêta à la balustrade qui surplombait le lobby. Nous y bavardâmes quelques temps. Il continua à m’encourager à venir au collège. Au moins, il semblait intéressé à mon bien-être. J’allais découvrir plus tard que ça le préoccupait beaucoup plus que Rod ne l’eût jamais fait. Pendant que nous parlions, je vis Sherwin McMichael marcher dans le lobby. Il leva la tête en passant devant nous. Ce fut la dernière fois que je le vis.

Je me rendis parler à Ted Gould. Il se préparait à quitter le bureau, car il était passé cinq heures depuis longtemps. Ted fut aussi coopératif qu’un homme sans pouvoir peut l’être. Il m’expliqua quelle était la politique et ce qui arriverait. La politique du personnel était celle d’une corporation qui, à cause de ses relations religieuses, pouvait faire à peu près ce qu’elle voulait. Et, par conséquent, elle choisit d’être parfaitement égoïste. La corporation ne portait aucun intérêt pour ceux qui l’avaient servie pendant des décennies. Ce fait sautait immédiatement aux yeux, au grand embarras de Ted Gould.

Il était également limpide qu’un seul homme, c’est-à-dire, Stan Rader, était complètement aux commandes de ce domaine. S’il ne l’était pas en théorie, il l’était de fait. On ne se préoccupait pas le moins du monde de ce qui arrivait aux gens qui avaient tellement donné dans le passé. Je trouvai rapidement ce que je voulais savoir.

Je me rendis chez un vieil ami pour souper et, ensuite, je pris la direction de l’Aéroport International de Los Angeles. J’y appelai ma femme Margaret pour lui donner des nouvelles. Elle téléphona alors à ses amies dans l’église et les anciens de Tulsa nous accueillirent à souper le vendredi soir. Voilà comment débuta pour nous le mois de février 1979.

Plus tard, Rod Meredith dit à quelques personnes qu’il était désolé de m’avoir fait ce coup-là, mais il avait dit à des gens qu’il allait le faire et il ne voulait pas leur paraître faible. Voilà pour la réputation de courage de Rod !

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[1] N. du T. : La doctrine de l’anglo-israélisme prônant que les pays anglo-saxons sont les descendants modernes de l’ancien Israël (plus spécifiquement les Dix Tribus Perdues) est effectivement une fausse doctrine créée au 19e siècle en Angleterre par une société secrète et reprise ensuite par Herbert Armstrong.